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Nos Lecteurs ont la Parole

II – Le Liban, doublement otage des machines de mort

Par Joseph E. Nehmé
Le deuxième événement est représenté par les deux discours successifs du secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, qui clôturent le feuilleton télévisé des faux témoins et du TSL lancé en août dernier (voir L'Orient-Le Jour du 23 décembre 2010).
Le charismatique orateur avait pour l'occasion savamment calculé le timing et le cadre, appelant les fidèles à commémorer en masse le souvenir du martyre de Hussein. Maniant avec brio le doigt inquisiteur et le sourire charmeur, il harangue les foules et profère ce qu'il exige que soient désormais nos vérités et nos principes nationaux : les Nations unies et le Conseil de sécurité sont des conspirateurs et des criminels manipulés par les États-Unis et par Israël ; le Tribunal spécial pour le Liban est l'outil d'Israël pour éliminer et éradiquer la Résistance islamique et provoquer la discorde. C'est tout juste si le sayyed n'avait pas accusé la communauté internationale, les États-Unis et Israël réunis d'avoir comploté pour l'assassinat du Premier ministre martyr Rafic Hariri afin de constituer un tribunal international qui, lui, aurait la mission d'achever le parti de Dieu. Ubuesque logique à laquelle certains Libanais, pourtant diligemment instruits et moyennement rationnels, se sont ralliés ; tout Libanais qui compose avec le TSL est un traître et un collabo ; le Conseil des ministres protège les faux témoins (entendre renégat lui aussi !). Il est sommé donc de le renier illico et de nous laisser faire (le Hezbollah) ; nous (sic) ne reconnaîtrons jamais l'existence d'Israël et appelons le monde arabe à la résistance (armée) contre Israël.
Toute analyse foncièrement objective des points du discours de clôture du feuilleton, qui a tenu en haleine les Libanais durant près de quatre mois, ne saurait qu'aboutir à une seule conclusion : le Hezbollah passe à la vitesse supérieure et entame l'exécution de son coup d'État. Et si sa première tentative de la prise et du contrôle de la capitale, le 7 mai 2008, avait à l'époque avortée, il n'en reste pas moins qu'il n'en ait pas démordu. Ainsi, l'affaire Shoucair et des caméras de 2008 comme celle aujourd'hui, des faux témoins, ne sont que des prétextes de diversion. L'accord de Doha du 23 mai 2008 n'aurait été qu'une hydre qui, pour peu qu'elle ait tenté d'endiguer la prolifération d'un mal galopant, aurait donné au seigneur de la Résistance islamique le temps et les opportunités de mieux se préparer à l'assaut final dont l'ultime objectif n'est rien moins que le renversement pur et simple du pouvoir. Sinon comment expliquer l'acharnement du Hezbollah à détruire et à miner toutes les institutions du pays, son système parlementaire démocratique et son système judiciaire ? Comment expliquer autrement la marginalisation, la banalisation, la déformation et l'ignorance éhontée des résultats des élections législatives du 7 juin 2009 ? C'est vrai que l'alliance du 14 Mars a gagné les élections, comme le reconnaissait Hassan Nasrallah. Mais nous avons la supériorité populaire, disait-il.
Depuis plus de cinq ans, le parti de Dieu procède à un travail systématique de sape de tous les fondements qui ont régi la vie du pays, pourtant particulièrement tumultueuse. Seuls nos lois, nos institutions et notre pluralisme avaient réussi à transcender tous les écueils.
Fort d'un arsenal militaire impressionnant, le Hezbollah tient le pays en otages. Nous..., martelait le sayyed dans son dernier discours. Résumait-il déjà le Liban pluriel et tous les Libanais dans sa personne ? L'État tout court ? S'arrogeait-il déjà le pouvoir et tous les pouvoirs et tous les droits, dont celui de vie et de mort de toute une population ?
Jamais dans l'histoire les armes n'ont mené à bon port, même les causes les plus justes et les plus légitimes. Seuls la raison et l'esprit conciliatoire et la rencontre ont triomphé de toute forme et de fondamentalisme ou d'extrémisme. Le parti de Dieu est appelé à réfléchir sur cette réalité. L'âge d'adolescence des armes n'est que le prélude au passage à l'âge adulte. La fougue et l'emportement céderont la place à la sagesse et à la raison. C'est ainsi que les Libanais, toutes croyances confondues, seront en mesure de se retrouver et de décider, ensemble, du devenir de leur pays.
Quel Liban voulons-nous ?
En défiant Israël avec son armement, le Hezbollah non visible ne laisse au puissant ennemi voisin, farouche, violent et sans retenue, que l'alternative de s'en prendre directement à l'Etat du Liban. Lui-même nanti d'une machine militaire ultrapuissante et sophistiquée. Pris en otages entre deux machines de mort, le citoyen libanais ne représente dans les calculs de guerre qu'un dommage collatéral.

Joseph E. Nehmé
Avocat à la Cour
Responsable des relations extérieures du parti des Forces libanaises

Le deuxième événement est représenté par les deux discours successifs du secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, qui clôturent le feuilleton télévisé des faux témoins et du TSL lancé en août dernier (voir L'Orient-Le Jour du 23 décembre 2010). Le charismatique orateur avait pour l'occasion savamment calculé le timing et le cadre, appelant les fidèles à...

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