Hasards et coïncidences
Pour ce quatrième ouvrage, à la couverture évoquant le bois de cèdre, l'artiste a décidé de franchir le pas et de passer au digital après « huit ans d'hésitations et de déni, dit-il. J'ai enfin réalisé que c'était plus sensible à la lumière. »
Max Milligan possède une ferme au Pérou, mais lorsqu'on lui demande où il est établi au juste, il répond simplement : « Je suis entre Londres, le Pérou et Kfarhabab. » En effet, depuis que le projet lui a été commandité et au fil de ses allers-retours, le photographe est tombé sous le charme du Liban - « pourtant ça n'a pas été le coup de foudre », dit-il dans l'introduction de l'ouvrage.
Ainsi, tout a commencé par une sorte de jeu de hasard. Invité à un dîner de gala au Ghana, Milligan est assis à côté d'une Libanaise qui s'avérera être la maman de son ancien camarade de dortoir à l'université, à Londres. Le photographe entre en contact avec lui et ce dernier l'invite à venir visiter le Liban. « Le projet était prévu pour 2006, mais il a été retardé en raison des circonstances », dit Milligan
C'est donc, sans idées préconçues ni préjugés que le photographe débarque dans le pays du Cèdre. Pendant deux ans, du Nord au Sud, il va sillonner les villes et les villages, les moindres petits recoins, en quête du détail et de l'image qui suscite ce « waw » venu du cœur.
Ce n'est ni un travail de journaliste ni des images de cartes postales, mais un regard personnel que porte le photographe sur l'éventail de populations, leurs us et coutumes. Du citadin au paysan et du plus bourgeois à l'homme du peuple, l'artiste ne néglige rien. Il effectuera même sa propre carte géographique, mettant en évidence la flore et la faune originales du pays, en faisant découvrir des sites inexplorés. « Ce travail n'est pas adressé à la diaspora libanaise ni aux touristes pour les encourager à venir au Liban, mais à ceux qui habitent leur pays sans vraiment bien le connaître. »
Tout près du sujet
The Lebanon de Max Milligan n'est pas un album de photos, mais un album vibrant de vie. « Je n'emploie ni flash ni filtre et ne fais pas de manipulations, car je n'aime pas tricher avec les clichés. Tout se situe entre l'œil et le moment. »
Comment réussit-il à concilier les émotions reproduites et la photo qu'il parvient à rendre vivante ? C'est parce que chaque cliché évoque en filigrane une histoire vécue. En effet, en construisant une relation avec ses sujets (les caractères humains), Milligan sonde leur intérieur. Quant aux paysages ou bêtes, le photographe compte sur son savoir-faire et sur le hasard. « La chance est très importante dans mon travail, précise Milligan. Pour la dernière photo du livre, j'ai réussi à fixer un éclair dans le ciel qui, par hasard, a formé la carte du Liban. Je me sens donc reconnaissant à mes anges gardiens pour ce genre de coïncidences. »
Pour l'artiste, le facteur temps est aussi important que la lumière. Quelle saison choisir ? Quel moment de la journée ou de la nuit ? Mais aussi le temps qu'il faut pour attendre, patienter pour que l'image surgisse, naisse sous vos propres yeux. De château en tente, du « Sky Bar » aux ruines de Baalbeck et de banquet en mezzé, le photographe se dit avoir toujours été bien reçu. « Ce travail a nécessité deux ans, mais ce sont les deux derniers mois qui étaient fructueux, car j'avais appris à connaître le pays. » Et d'ajouter : « Avec mon guide, j'allais vers une destination sans savoir ce qui nous attendait en chemin. » Sous son objectif, l'imprévu prend forme et la palette de couleurs est réinventée. La lumière méditerranéenne s'habille soudain de paillettes.
En rendant hommage à la diversité du pays du Cèdre, Max Milligan a reproduit le Liban généreux et coloré, et invite tous les Libanais à briser les chaînes en allant à la rencontre de leur beau pays.
* Mercredi 8 décembre, signature privée au musée Robert Mouawad, de 18h à 22h, et jeudi 9 décembre à partir de 18h, signature publique au stand Antoine du Salon du livre arabe au BIEL.
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