Après avoir passé la barrière de tous ces chauffards qui nous stressent et après une dure journée de labeur pour un salaire mensuel de misère, nous devons nous farcir des coupures d'électricité dans un pays où le soleil règne en maître plus de 300 jours par an et qui n'est pas capable de prendre des mesures pour éviter de tels inconvénients. Je n'en dresserais, citoyen lambda qui doit chaque jour supporter l'insupportable, c'est-à-dire vivre dans un bourbier où l'on nous menace d'une éventuelle guerre et peut-être même d'un exode des chrétiens, aucune liste, aussi exhaustive qu'elle puisse être.
Comme on dit au Québec, je suis tombé en amour de votre beau pays, de son climat, de sa nourriture, de l'accueil de ses habitants, même si cela peut vous paraître un peu cliché. Le Liban est un pays bourré de contradictions : d'un côté, le peuple miséreux qui tente de survivre et de l'autre, les plus chanceux qui se la coulent douce.
Je me souviens d'ailleurs d'une soirée où le très chic milieu libanais s'était réuni dans un palace de Beyrouth mis à disposition pour une fondation X, organisée par madame Y, épouse de monsieur le député ou ministre de je ne sais plus. D'ailleurs, je ne sais même pas si cette sympathique dame le sait elle-même, tellement ce pauvre homme a dû exercer de mandats. La soixantaine élégante au compteur, le visage tiré à quatre épingles par de nombreux liftings qui ne faisaient plus apparaître qu'un sourire carnassier sur ce visage abîmé. Cette pauvre femme, qui avait dû être une belle femme en son temps, était présentée en pâture devant un public quasi médusé de la voir moins en chair et plutôt en os. Tout le gratin libanais était là ou était représenté par les épouses ou les maîtresses. Des stars de la chanson en passant par des vedettes de la télévision locale, il y avait de tout. Les flashs crépitaient, il ne fallait absolument pas manquer cet événement de peur de ne pas être dans les pages de « Mondanités » de Prestige ou encore de Focus, les magazines des gens célèbres qui n'en foutent pas une, mais qui aiment jouer les pique-assiettes dans tous ces « events ». Il y avait de tout dans cette soirée. Tous ces gens m'ont bien fait marrer, jouant de leurs cartes bancaires gold ou platinum pour faire de généreux dons et rivaliser avec le voisin de table. C'était à celui qui allait donner le plus. Tant mieux pour cette fondation. En un quart d'heure, elle avait récolté trois fois mon salaire annuel.
C'est ça le Liban, et chaque jour je me sens un peu plus libanais en comprenant le fonctionnement de vos institutions. Aujourd'hui, je ne voudrais pas engager tout un peuple dans ma complainte, mais si j'étais libanais, je me sentirais comme un cocu avec lequel on joue sans vergogne contre son gré en ne se souciant pas de son bien-être. D'un côté, un Hezbollah qui martèle à qui veut l'entendre qu'avec lui, on va voir ce qu'on va voir si l'acte d'accusation du TSL inculpe l'un des siens dans le meurtre de Rafic Hariri. Et d'un autre côté, un parti avec à sa tête un fils qui veut savoir la vérité. Il pourrait plaider la cause nationale et renoncer à ce tribunal pour sauver la paix. Mais que cherchent-ils tous vraiment ? Pourquoi sommes-nous tous divisés ? Pourquoi sommes-nous d'abord chrétien, chiite ou sunnite avant d'être libanais ? Je rêve de voir ce peuple demain, celui dont les leaders se chamaillent pour préserver leurs avantages, leur mode de vie, se mobiliser, manifester dans la rue comme lors de la révolution du Cèdre, tous unis pour dire non, plus de tout ça. Nous ne voulons plus être les cocus de la République ! La vérité, oui, mais pas à n'importe quel prix. Nous avons trop souffert, ça suffit, khalass!
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