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Économie - Crise

Le fantôme de la bulle immobilière flotte sur la fragile reprise espagnole

Le marché semble reprendre des couleurs récemment, mais la frénésie actuelle ne doit pas cacher le stock accumulé, estiment certains.
Des logements bradés dans l'espoir d'être enfin vendus, des grues à l'arrêt, des travailleurs du bâtiment condamnés à se reconvertir : en Espagne, malgré la baisse des prix, le fantôme de la bulle immobilière menace encore la fragile reprise économique.
Le nouveau ministre du Travail, Valeriano Gomez, l'a rappelé tristement en prenant ses fonctions fin octobre : « Trois emplois sur quatre perdus pendant la crise proviennent de la construction et des secteurs annexes. » L'Espagne affiche le plus fort taux de chômage de la zone euro, autour de 20 %.
Bâtir à tout-va, en banlieue, en campagne et surtout le long des côtes, tel a été le leitmotiv du pays pendant des décennies.
« Ces huit dernières années, les deux tiers des maisons construites en Europe l'ont été en Espagne », rappelle Christian Palau, directeur du portail d'annonces immobilières Fotocasa.
À partir de 2000, l'Espagne a construit environ 700 000 logements par an, autant que la France, l'Allemagne et l'Angleterre réunies... jusqu'à l'engorgement de 2008, qui a provoqué l'éclatement de la bulle, une chute des prix et des faillites en cascade de promoteurs immobiliers.
Récemment, le marché semble reprendre des couleurs. Les ventes ont bondi de 30 % en août et les prix au troisième trimestre n'ont plus baissé que de 3,4 % sur un an, selon les statistiques officielles.
Ce qui a incité les acheteurs à se décider, c'est la fin d'une déduction fiscale pour l'acquisition d'un logement, programmée le 31 décembre.
La frénésie actuelle ne doit pas cacher le stock accumulé, qui s'élève à environ un million et demi de logements invendus (neufs et anciens). On estime que 16 % des maisons espagnoles sont vides, un record en Europe.
Pas étonnant que la banque Banesto ait lancé mi-octobre un programme inédit, bradant 600 logements dans toute l'Espagne à 50 % du prix du marché.
Car le vrai problème est que les prix de l'immobilier, même s'ils ont fondu de 25 % depuis 2007, n'ont pas assez baissé. L'hebdomadaire britannique The Economist calculait récemment qu'ils restaient en Espagne supérieurs de 47,6 % par rapport à ce qu'ils devraient être. La Commission européenne partage ce constat, chiffrant ce surcoût à 17 %.
« Nous ne sommes plus dans une situation de bulle, assure José Luis Suarez, professeur à l'IESE Business School de Madrid, « mais cela ne veut pas dire que les prix ne peuvent pas baisser plus. »
Le secteur du BTP, lui, continue d'appuyer sur la touche pause en attendant que le marché reparte : « Il suffit de regarder le nombre de logements en construction, autour de 100 000 cette année. On peut presque dire qu'il n'y a pas d'activité de construction actuellement ».
« Cette chute à des minima historiques a des conséquences sur l'emploi », souligne-t-il, alors que le secteur a énormément recruté ces dernières années.
Résultat : les travailleurs du bâtiment, dont « la plupart avaient des profils non qualifiés », sont désœuvrés et « cela coûtera beaucoup de replacer ces gens », constate Christian Palau, tandis que le pays, encore en faible croissance (+0,2 % au deuxième trimestre), doit se demander « ce qu'il va faire », sur quelle activité miser désormais.
Outre les chantiers à l'arrêt, nombre de maisons finies attendent leurs occupants dans des « quartiers fantômes » : « On avait promis (aux acheteurs) des commerces, des transports publics, des écoles, mais avec la crise, les promoteurs sont partis. » La solution, plaide-t-il, pourrait être un meilleur soutien à la location, parent pauvre de ce pays où le rêve est d'être propriétaire. En ne misant que sur l'achat, il faudra « 10 à 15 ans » pour absorber son stock.
Des logements bradés dans l'espoir d'être enfin vendus, des grues à l'arrêt, des travailleurs du bâtiment condamnés à se reconvertir : en Espagne, malgré la baisse des prix, le fantôme de la bulle immobilière menace encore la fragile reprise économique.Le nouveau ministre du Travail, Valeriano Gomez, l'a rappelé...
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