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Moyen Orient et Monde - Le billet

Grand corps malade

Dans quelques jours, Raymond Domenech, ex-entraîneur de l'équipe de France, s'exprimera devant la commission de discipline de la Fédération française de football. Commission qui tente d'analyser les tenants et aboutissants du dernier phénomène footballistique à la mode bleue : la grève du crampon. Depuis la fin précoce du Mondial des Français, et sur la lancée de la compétition, Domenech est dans la ligne de mire des médias, mais aussi de certains de ses ex-joueurs. La chasse est ouverte !
Reste que l'Hexagone, qui a poussé les hauts cris pendant le Mondial, se fait un peu mou du genou lorsqu'il s'agit de sanctionner les coupables. Sous d'autres latitudes, on prend les choses en main et l'après-Mondial, pour un entraîneur en mal de résultats, c'est le bagne. Littéralement.
Depuis qu'il a eu la mauvaise idée de rentrer de Johannesburg, l'entraîneur de l'équipe de foot nord-coréenne, Kim Jong-hun, casserait des cailloux. Avant d'être condamné aux travaux forcés, le coach aurait eu droit à une mise en bouche stalinienne, à base d'autocritique et d'humiliation publique par ses joueurs. L'impardonnable crime, la « trahison » de Kim Jong-hun est, après une honorable défaite contre le Brésil, d'avoir pris une raclée contre le Portugal. Et ce alors que le match, une fois n'est pas coutume, était retransmis en direct au royaume ermite.
À noter que l'entraîneur Kim Jong-hun est d'autant plus coupable de l'échec de l'équipe nationale, que c'est Kim Jong-un lui-même qui avait sélectionné les joueurs. Ne surtout pas sous-estimer l'absence du « h », car si Kim Jong-hun est un simple humain, Kim Jong-un est le fils de Dieu, plus connu, au nord du 38e parallèle, sous le nom de Kim Jong-il, alias le « Cher Leader ». Un être supérieur donc, fils d'un autocrate ubuesque qui devrait, à terme, étendre ses « talents » de sélectionneur à toute l'infrastructure politique de la Corée du Nord puisque Kim Jong-un est appelé à prendre la relève de son cher papa. Signe qui ne trompe pas, Kim Jong-un a déjà été affublé d'un surnom : le « Jeune Général ». Dans l'arbre, il se trouve juste sous le « Cher Leader », qui lui-même descend du « Grand Dirigeant ». Un pedigree à faire pâlir d'envie tout aspirant despote.
Au royaume ermite, on a l'esprit de famille. Soucieux de faciliter la tâche à son fiston, le « Cher Leader » a déjà commencé à déblayer le terrain. Également soucieux de ne pas vexer le petit, dont l'orgueil serait terriblement blessé s'il sentait qu'on lui mâchait le travail, Papa Kim se veut d'une subtilité d'autant plus déconcertante qu'elle est exercée dans des conditions de santé que l'on dit mauvaises. Ainsi, depuis quelques mois se multiplient, dans les sphères du pouvoir, les départs hâtifs à la retraite, les évaporations de fâcheux et autres malheureux accidents de la route.
Mû par une dévotion totale, Kim senior tient aussi à mettre ses affaires en ordre avant de passer le flambeau à Kim junior. Pas question de laisser traîner ici et là des affaires, surtout quand il s'agit de dettes. Et là, l'imagination - à défaut de ronds - est au pouvoir. Fortement endetté auprès de Prague, Pyongyang a ainsi proposé de rembourser 5 % de la somme en... ginseng, racine aux vertus tonifiantes et aphrodisiaques. Au cours actuel du ginseng, 5 % de la dette correspond à 20 tonnes de racine. Si elle accepte la transaction, la République tchèque doit se préparer à une chute sévère de l'audience télévisée et à une hausse proportionnelle de la natalité.
Dans son infinie bonté, Papa Kim veut également s'assurer que son fiston ne sera jamais dans le besoin. Mission dont on appréciera la difficulté à l'aune de l'acharnement international à sanctionner le Pays du matin calme. Et ce pour une vague tendance à vouloir titiller l'atome. Le monde pousse un peu tout de même...
Pour assurer une rente au « Jeune Général », le « Cher Leader » a choisi 5 000 travailleurs parmi les moins exsangues et les a exportés vers la voisine et néanmoins amie Mongolie. Des travailleurs dont le salaire sera directement versé dans les caisses de leur « Cher Leader ». L'on rétorquera immédiatement aux esprits chagrins que là où ils croient voir une forme massive d'esclavagisme, il n'y a que dévouement.
Un dévouement qui s'inscrit dans la droite ligne du juche, l'idéologie officielle taillée sur mesure par Kim Il-sung, père fondateur de la nation, et de Kim Jong-il. Une idéologie selon laquelle la nation est un grand corps dont les muscles sont le parti et les organes étatiques, dont le cerveau est le « Grand Leader » et dont les cellules sont les individus.
Dans quelques jours, Raymond Domenech, ex-entraîneur de l'équipe de France, s'exprimera devant la commission de discipline de la Fédération française de football. Commission qui tente d'analyser les tenants et aboutissants du dernier phénomène footballistique à la mode bleue : la grève du crampon. Depuis la fin précoce du...

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