Une palette métallique
Cette fois, pourtant, le sujet prend toute son ampleur à travers les œuvres peintes et trois petits films en boucle qui mêlent l'image au son. «C'est au début de la guerre que j'ai commencé à fréquenter le Blue Note afin de fuir le bruit des obus, poursuit Naufal. Étrangement, en sortant du club, j'avais moins peur de la mort. Plus tard, c'est en Suède lors d'un grand festival de jazz que j'adoptai pour de bon cette manière de vivre. «Le jazz, dit encore l'artiste dans son catalogue, est une acceptation de notre fragilité, une prolongation du temps.» N'est-ce pas pour traduire cette fragilité que l'artiste a privilégié le carton et le papier à la toile? C'est à travers les clichés pris des jazzmen par de grands photographes, notamment Herman Leonard et William Claxton, que Naufal a swingué sur ses croquis, assemblé des couches de peinture, manié la sérigraphie et les imprimés, laissé traîner ses émotions «pour enregistrer l'instant et l'éterniser» , ajoute-t-elle.
À travers les portraits de Duke Ellington, Billie Hollyday, Ben Webster, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughn ou Miles Davies, l'artiste a reproduit cette vie nocturne, les vapeurs et les brumes des soirées de musique et de rire, «ces alliés du silence et de la nuit» qui, selon elle, lui donnent énergie et envie de vivre.
Sur sa palette verte, qui évoque plus la puissance métallique de l'instrument que les bleus au cœur, Greta Naufal a su capter les regards des musiciens, leurs joies et leurs faiblesses. Le dialogue qu'elle a su instaurer est semblable à celui qu'ils installent eux-mêmes lors d'un récital. Un dialogue constant tissé d'harmonies. Une conversation de vie.
* Maqam (Saifi Village). Jusqu'au 7 août. Heures d'ouverture : du mardi au vendredi de 14h à 19h et le samedi de 12h à17h. Tél : 01/991212.
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