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Avec le blocus israélien, « c’est toute la société palestinienne qui risque de s’écrouler » - Interview

De Genève à Gaza, un pont culturel pour briser le siège

Nicolas Wadimoff, cinéaste et producteur suisse, veut faire entendre la voix des Palestiniens « par tous les moyens ».

L’affiche du dernier film de Nicolas Wadimoff.

Si Gaza est souvent présentée comme une « ville fantôme » ou une « prison géante », Nicolas Wadimoff, lui, y voit un véritable « hymne à la vie ». Dans son dernier film, intitulé Aïsheen (Toujours vivants), qui a été tourné deux semaines après la fin de l'opération « Plomb durci », le cinéaste et producteur suisse se fond parmi les habitants de Gaza pour raconter des fragments de leur quotidien, souvent à la limite de l'absurde : une femme qui rassemble ce qui reste des objets familiaux au milieu de gravats ; le propriétaire d'un parc d'attractions délabré qui lutte pour sa survie ; des clowns qui font rire les enfants pour faire oublier les bombardements ; un groupe de rappeurs (Darg Team) tentant difficilement de concilier hip hop et nationalisme palestinien...
« En Occident, on a fini par oublier que les Palestiniens sont des êtres humains normaux avec des rêves et des ambitions, dit Nicolas Wadimoff, interviewé par téléphone à Genève. Mais, pour moi, ce qui est encore plus fort que les scènes de destruction, d'injustice et de mort, c'est l'incroyable richesse humaine qui existe à Gaza. » Cette image humaniste du territoire surpeuplé et défiguré par la guerre, Nicolas veut la partager avec le reste du monde, « loin des préjugés et des discours politiques simplistes ».
Son film, qui a gagné le prix du Jury œcuménique à Berlin, est déjà sorti en France et en Europe, et doit être présenté, à l'automne, au Moyen-Orient et au Canada. Mais pour le réalisateur suisse de 46 ans, qui a déjà signé plusieurs documentaires sur le conflit israélo-palestinien, sa mission est encore loin d'être terminée. « Maintenant, il faut utiliser tous les moyens possibles pour briser le blocus inhumain et faire entendre la voix des habitants de Gaza, affirme-t-il. Car la pire des choses qui puisse leur arriver, c'est qu'ils tombent dans l'oubli ou l'indifférence. »
À travers « Akka Films », une société de production qu'il a fondée en 2003, Nicolas Wadimoff a créé « Swiss Palestinian Encounters », une série d'ateliers de travail organisés en collaboration avec des professionnels du cinéma suisse. Cinq courts-métrages, réalisés par de jeunes cinéastes palestiniens, en résultent. En 2006, Nicolas Wadimoff en coproduit treize autres.
« Les jeunes Palestiniens ne peuvent pratiquement rien faire à Gaza, déplore le réalisateur suisse. Ils finissent donc par se tourner vers le militantisme ou le business, tirant profit du marché noir. » « Ils peuvent, bien sûr, devenir cinéastes ou artistes, poursuit-il, mais avec beaucoup de difficultés. C'est pour cela que je refuse de les lâcher. »
Une fois rentré en Suisse, après avoir passé 14 jours de tournage à Gaza, Nicolas Wadimoff, qui s'était lié d'amitié avec le groupe palestinien de rap Drag Team - lequel a d'ailleurs réalisé la bande sonore de Aïsheen -, a décidé d'aider les jeunes musiciens à produire leur premier album. « On a réuni les fonds nécessaires afin de les faire venir en Suisse pour rencontrer des artistes locaux, mais comme ils n'ont pas été autorisés à sortir de Gaza, ils ont finalement dû réaliser un album magnifique à travers Internet », raconte le réalisateur. Et le cinéaste de conclure : « S'il y a une chose que les Israéliens n'ont pas réussi à détruire à Gaza, c'est bien le désir de vivre de sa jeunesse. »
Si Gaza est souvent présentée comme une « ville fantôme » ou une « prison géante », Nicolas Wadimoff, lui, y voit un véritable « hymne à la vie ». Dans son dernier film, intitulé Aïsheen (Toujours vivants), qui a été tourné deux semaines après la fin...