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Liban - Patrimoine

« Amar » pour Deir-el-Kamar

L'association Amar veut promouvoir et protéger la richesse du patrimoine de Deir el-Kamar et le faire découvrir à tous les Libanais. Une journée de visite était organisée vendredi pour lever des fonds.

La mosquée de Deir el-Kamar est la plus ancienne du Liban.

« Ce qui nous rassemble, c'est notre amour pour Deir el-Kamar », s'amusent-elles à raconter. Onze femmes, qui viennent pour la plupart de ce petit village du caza du Chouf, ont décidé il y a un an de monter une association pour assurer sa préservation. Une association encore embryonnaire, baptisée Amar. « Nous voulons conserver et embellir notre ville. » Ses vieilles maisons et ses quatre églises, ses ruelles pavées et ses spécialités pâtissières en font l'un des plus beaux villages du Liban. L'un des mieux conservés aussi, grâce, notamment, à l'action de l'ancien président Camille Chamoun, qui a initié la restauration des sites archéologiques. Vendredi, Amar organisait une journée pour faire découvrir les beautés de ce village à des Libanais ; car selon les fondatrices de l'association, c'est à eux avant tout qu'il revient d'adopter et de connaître leur patrimoine. Quatre autobus ont donc été affrétés de Beyrouth pour sillonner les rues de la ville que l'on appelle aussi « la cité des Émirs », avec les explications de guides spécialisés. L'objectif : lever des fonds qui seront consacrés à la préservation du village.
Une initiative pas vraiment isolée, car depuis quelques années, les Libanais semblent reprendre goût à leur histoire et à leur patrimoine. Parmi les visiteurs, une Libanaise aujourd'hui retraitée, émigrée au Québec. Elle revient avec son mari pour la première fois au Liban depuis la fin de la guerre et s'émeut de redécouvrir son pays dans ce qu'il a de plus beau. Pour l'association, comme Byblos ou Baalbeck, leur village mérite que l'on s'y intéresse. Deir el Kamar a gardé en lui les traces de l'histoire du Liban depuis la préhistoire où, déjà, des maisons s'étageaient sur les pentes de la montagne. Ce sont les Romains qui lui ont donné son nom, en l'honneur de la déesse de la Lune, à laquelle les Phéniciens avaient consacré un temple. Aujourd'hui, sur le site même de ce temple se dresse l'église maronite de Notre-Dame de la Colline, construite à la confluence des styles architecturaux latin, grec et syriaque. On trouve encore des traces de l'ancienne bâtisse. La petite ville est ensuite choisie par l'émir druze Fakhreddine II, au XVIIe siècle, qui y fait bâtir son palais et la consacre comme capitale du Mont-Liban pour la durée de son règne. Elle devient alors un centre culturel et politique de premier plan au Liban, jusqu'à son déclin au XIXe siècle, avec la chute de l'émirat. Depuis la fin du XIXe siècle, Deir el-Kamar est tout à fait chrétienne, mais garde en sa chair la marque des influences religieuses successives. Le village a longtemps connu une coexistence pacifique entre les confessions.
Mais Deir el-Kamar dit aussi les heures les plus sombres de l'histoire de la région. Á côté de Notre-Dame de la Colline se dresse une stelle dédiée aux victimes du massacre de 1860 qui avait vu la mort de centaines de victimes chrétiennes. Ses habitants ont également dû subir les pires heures de la guerre de la Montagne, qui a embrasé le Chouf à partir de 1982.
Contrairement à beaucoup d'autres lieux si riches en histoire au Liban, ce village a su se conserver, garder son cachet qui tient à ses petites ruelles pavées qui sentent le jasmin et les roses. Les familles sont restées, continuent d'habiter ces maisons libanaises traditionnelles, de prendre le thé en famille assis sur les diwans, les entretiennent depuis des années et fleurissent les jardins. C'est le cas de la famille de Hareth Boustany, l'une des plus anciennes familles de Deir el-Kamar, fils du célèbre homme de lettres Fouad Ephrem Boustany, qui a notamment dirigé la rédaction d'une encyclopédie en langue arabe. Quand on lui parle du cachet de son village, il répond « oui, mais vous ne l'avez pas vu il y a 60 ans ». Pour lui, c'est le centre-ville qui a beaucoup souffert, et qui a transformé radicalement l'art de vivre à la libanaise dans ce village. Si les maisons sont conservées, la vie du village n'est plus ce qu'elle était. C'est pour cette raison qu'il soutient les projets de l'association Amar, qui est là pour « colmater les brèches », comme le dit Néda Ziadé, membre de l'association. À leur actif, la plantation de pins sur les versants de la montagne, il y a un an. La forêt, « notre poumon », avait été détruite dans un incendie quelques mois auparavant.
Aujourd'hui, les femmes d'Amar se sont lancé pour défi de restaurer la place centrale du village, traversée aujourd'hui par la route, très fréquentée l'été. Une place pavée sur laquelle vient cogner le soleil, entourée de terrasses de restaurants. Hareth Boustany se souvient de l'époque où la place en terre battue était ombragée de peupliers, et où la place était véritablement un lieu de vie pour les habitants qui s'y retrouvaient pour jouer au trictrac ou fumer un narguilé. L'association veut donc y refaire planter des arbres pour en faire un lieu où il sera agréable de se retrouver, à l'ombre, autour de la fontaine. M. Boustany veut également que sa ville retrouve la convivialité entre religions qui s'est perdue au détour de l'histoire.
Étape suivante, le souk : Néda Ziadé en discute avec Hareth Boustany, qui rêve de retrouver des arcades tout le long du souk et de rénover les boutiques à la manière ancienne. « Il faut être ambitieux », lui dit-elle. Uniformiser les enseignes, utiliser des matériaux traditionnels pour refaire les boutiques, promouvoir les métiers traditionnels qui se perdent : autant de projets que l'association veut lancer, de concert avec les habitants. Un effort qui ne pourra se faire sans l'aide de la municipalité fraîchement élue. Une municipalité qui manque, selon les fondatrices de l'association, de moyens pour se lancer véritablement dans des projets d'envergure et qu'elles souhaitent soutenir.
« Ce qui nous rassemble, c'est notre amour pour Deir el-Kamar », s'amusent-elles à raconter. Onze femmes, qui viennent pour la plupart de ce petit village du caza du Chouf, ont décidé il y a un an de monter une association pour assurer sa préservation. Une association encore embryonnaire, baptisée Amar. « Nous voulons conserver...
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