Rechercher
Rechercher

CD, DVD - Un peu plus de...

J’aime pas l’école

Quinze ans. Ça aura duré plus ou moins quinze ans. De la maternelle au secondaire, de la petite section à la terminale. Quinze ans à arpenter des couloirs, à s'asseoir sur un banc, à soulever un casier, à porter un cartable, à enfiler un tablier ou un uniforme, à essayer de copier sur son voisin, à se faire taper sur les doigts avec une règle, à recopier 300 fois « je ne tricherai plus en classe », à tenter de comprendre ces foutues fractions, à aller au coin ou en time-out (peu importe), à craindre de « monter » au tableau. Quinze ans de détestation des dimanches soir. Quinze ans de boule à l'estomac avant un exam. Quinze ans de « je veux pas y aller/chouette, je suis malade ». Une fois terminés le bac et autres freshman, on se sent libre, léger. Mais oui, mais oui, l'école est finie. Oui, enfin, pas pour tout le monde. Parce que mis à part la fac, les masters, les cours du soir, l'université pour tous et autres activités extraprofessionnelles-qui-rendent-plus-intelligents, pour les parents, l'école est tout, sauf terminée... Dès qu'on a un enfant, c'est reparti pour un, deux ou trois tours, en fonction du nombre de gosses à la maison. On se lève tôt le matin, on prépare le goûter, on cherche les chaussettes, on lace les chaussures de sport, on attend l'autocar. On reattend l'autocar, on fait les devoirs... Puis, on réalise qu'on a à nouveau peur de la maîtresse, du proviseur - d'ailleurs on baisse les yeux quand il nous parle -, du surveillant. On stresse à chaque rentrée car on se demande avec qui « on » va être. Quel prof et surtout quel copain. On espère que l'ex-boyfriend ne sera pas là, que la fille de la meilleure copine si, que la «bouta» ne sera pas séparée et que la maîtresse sera sympa avec le petit dernier. Surtout la maîtresse d'arabe. Surtout. Parce que c'est qui qui risque de galérer si un des profs n'est pas sympa ? Qui va se coltiner les devoirs supplémentaires, les cours en plus, les récitations répétées ? Qui va angoisser avant ? Qui va avoir des nœuds à l'estomac? Qui a le brevet à la fin de l'année ? Qui ? Alors c'est bien gentil de dire que l'école est finie. Ce n'est pas vrai. On en reprend pour quinze ans, au moins, avec, et c'est le comble, les inconvénients : les études, les punitions, les convocations et les devoirs. On ne se marre pas dans la cour de récréation, on ne s'échange pas de bracelets brésiliens ou de scoubidous et on ne collectionne pas les autocollants de la Coupe du monde 2010. Non, nous, on rentre du boulot dare-dare pour faire étudier, on fait des recherches sur les chevaux ou les châteaux de la Loire, on se met en mode retraite au mois de mai, puis au mois de juin, on prend un prof d'arabe parce qu'on a toujours été nul en « kawa3id » et un prof de maths parce qu'on est archinul depuis la nuit des temps. On se fait engueuler si la poésie n'a pas été retenue et on n'y connaît rien à la nouvelle Europe parce qu'à notre époque, il y avait l'URSS, la RFA et la RDA, la Yougoslavie et la Tchécoslovaquie, point barre. Pas de Kazakhstan ou de Biélorussie dans notre vocabulaire. D'ailleurs notre vocabulaire a bien changé. Le Net, Club Pingouin, Facebook, Twitter, les SMS codifiés et la nouvelle orthographe libanaise sont un sacré charabia pour certains quinquas. Alors le soir, on rame. On doit expliquer le pourquoi du comment aux gosses tandis qu'on n'y a pas compris grand-chose nous-mêmes. Une vraie galère. Et dire qu'on pensait que c'était terminé tout ça. Et le pire, c'est quand vos enfants se foutent de votre gueule parce que vous ne possédez pas bien l'anglais car vous avez vécu toute votre enfance en France ou que vous vous êtes arrêtés en classe de 10e en arabe - pardon, en classe de CE1. Difficile de se battre contre ça. C'est que vous, l'école, elle est non seulement loin derrière, elle est loin tout court. Elle est à 4 000 kilomètres. Et de vos amis de classe, il ne vous en reste plus qu'un ou deux. Pas de réunion d'anciens et surtout pas d'appartenance à une tribu. Pas d'Athénée ni de Nazareth ou de Jamhour. Pas de Champville, de Lycée, de Louise Wegman, de Franciscaines ou de Antoura, ni de Collège ou d'IC. Rien. On faisait partie de « ceux » qui ont grandi ailleurs. Sévigné, rue Pierre Nicole, ça ne dit rien à personne... Bon, c'est pas que, mais on doit
réviser là.
Quinze ans. Ça aura duré plus ou moins quinze ans. De la maternelle au secondaire, de la petite section à la terminale. Quinze ans à arpenter des couloirs, à s'asseoir sur un banc, à soulever un casier, à porter un cartable, à enfiler un tablier ou un uniforme, à essayer de copier sur son voisin, à se faire taper sur...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut