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Santé - Congrès

Les cancers ORL, des maladies principalement liées à la consommation du tabac

Au Liban, quelque 280 cancers de la tête et du cou sont diagnostiqués annuellement. Dans 96 % des cas, la maladie survient chez des fumeurs. Une campagne de sensibilisation est nécessaire pour informer la population sur les dangers et les moyens de prévention.

Le Dr Amine Haddad lors de son intervention au séminaire organisé à l’hôtel Mövenpick sur les cancers de la tête et du cou.

Les cancers ORL ont été au centre d'un congrès organisé récemment à l'hôtel Mövenpick par le service d'oto-rhino-laryngologie (ORL) de l'Hôtel-Dieu, en collaboration avec la faculté de médecine de l'Université Saint-Joseph et la Société libanaise d'ORL. Placée sous le thème du «Traitement basé sur des données objectives des cancers de la tête et du cou», cette rencontre scientifique a réuni des spécialistes venus du Liban et de l'étranger.
«Les cancers ORL sont les cancers des voies aéro-digestives supérieures, plus communément appelés cancers de la tête et du cou», explique le Dr Amine Haddad, chef du service ORL à l'Hôtel-Dieu, qui précise: «On insiste dans le cadre de ce congrès sur le traitement et la médecine basés sur des données objectives parce que traditionnellement il existe des écoles différentes en médecine, principalement l'école américaine, canadienne, française ou anglaise. Or ceci n'est plus de mise actuellement, puisque dans la littérature médicale, les spécialistes se rencontrent plus souvent. De même, les congrès sont devenus internationaux et l'on partage des données basées sur les faits.»
Le congrès est d'autant plus important, selon les organisateurs,  qu'il est indispensable d'informer «les collègues des dernières avancées dans le domaine et les tiers payants sur la situation actuelle des cancers ORL au Liban, sachant que ces derniers versent parfois de l'argent inutilement pour des indications qui, parfois, ne sont pas valables».
Le Dr Haddad souligne par ailleurs que ce congrès a «une ambition cachée, qui reste actuellement à l'état embryonnaire et qui est celle d'essayer de palier le manque observé au niveau des études épidémiologiques, c'est-à-dire dans le domaine de la détection, l'identification et la prévention des maladies, et la publication de lignes directrices ou de recommandations pratiques.»
«C'est une tâche qui semble très difficile à accomplir au Liban, en tout cas en ORL», dit-il.
Espérant que ce congrès deviendra une tradition du service ORL de l'Hôtel-Dieu, le Dr Haddad a noté qu'à l'avenir d'autres secteurs ORL seront couverts, comme la rhinologie, la surdité, ou encore l'ORL pédiatrique.

Maladies liées au tabac
Au Liban, quelque 260 à 280 cas de cancers ORL sont diagnostiqués chaque année, selon les chiffres du registre national du cancer. La survenue de la maladie est « directement liée au tabac », explique le Dr Haddad. « Dans 96% des cas, les cancers ORL sont diagnostiqués chez des fumeurs, ajoute-t-il. Au Liban, cette incidence est plus élevée qu'aux États-Unis et inférieure à celle observée en France. Associé au tabac, l'alcool multiplie le risque de cancer ORL par huit.»
Ce cancer touche-t-il également les anciens fumeurs? «Le risque de la cigarette est proportionnel, répond le Dr Haddad. On quantifie le risque par le nombre de paquets fumés par jour multiplié par le nombre d'années de tabagisme. Donc, si on a fumé un paquet de cigarettes par jour pendant vingt ans, le risque est de 20 paquets-années. C'est un risque significatif. En effet, plus on fume (nombre de paquets par jour et nombre d'années), moins l'arrêt de la cigarette va rapprocher le risque de zéro. On estime ainsi que si quelqu'un a fumé un paquet de cigarettes par an durant vingt ans, il lui faut environ dix à douze ans pour minimiser son risque de développer un cancer ORL. Nous savons aussi que ce risque ne sera jamais égal à celui d'une personne qui n'a jamais fumé. Par ailleurs, il est certain qu'avec l'arrêt de la cigarette, le risque d'être atteint d'un cancer ORL n'augmente plus.»
Quant au tabagisme passif, le Dr Haddad souligne qu'il est difficile d'évaluer sa relation avec les cancers ORL. « On évalue toutefois l'absorption dans un endroit fermé, ajoute-t-il. Celle-ci correspond à 40 % de l'ensemble des cigarettes fumées. Il n'en demeure pas moins que l'exposition à la fumée des autres augmente le risque de développer un cancer ORL. C'est le cas principalement des serveurs dans les restaurants et les pubs. Il est, par conséquent, important de discuter de ce problème sur les lieux de travail où l'exposition au tabac des autres est soutenue et prolongée. Le problème reste entier dans les domiciles également, ce qui doit responsabiliser les parents envers leurs enfants. »

Les symptômes
Quels sont les symptômes de la maladie? «Le cancer de la gorge et des cordes vocales se manifeste généralement par un changement de la voix, explique le Dr Haddad. Donc tout changement récent de la voix qui persiste au-delà de trois semaines nécessite un examen. Les tabagiques ont la voix enrouée et risquent de rater ou de retarder la consultation médicale.» Et d'insister: «S'il est pris à temps, le cancer de la gorge est guéri dans plus de 90% des cas. Malheureusement, les patients se présentent tard chez le médecin par négligence. Il est dommage qu'on soit encore obligé, en 2010, de faire une ablation de la gorge, parce que les patients ont négligé leur enrouement de la voix pendant six mois, huit mois, voire un an.»
En ce qui concerne le cancer de la bouche, le Dr Haddad indique qu'une biopsie est nécessaire lorsqu'une plaie, une ulcération ou un aphte persiste pendant plus de trois semaines sans explications. «Souvent, un groupe de personnes, plus souvent des femmes jeunes pour la plupart sans facteur de risque particulier, peuvent développer des cancers de la langue plus méchants que les autres cancers ORL, poursuit-il. Si l'on prend tous les cancers de la gorge, 70% d'entre eux vont guérir, alors que seulement 45% des cancers de la langue le seront.»
Le cancer du nasopharynx ou de l'arrière-nez enfin n'est pas fréquent au Liban. «Son incidence est plus importante en Chine, au Maghreb et dans certains pays du Golfe, constate le Dr Haddad. Cette forme de cancer est due à un mode alimentaire particulier, relative principalement à la préparation du poisson avant de le faire griller. Le cancer du nasopharynx est sournois et peut survenir chez les jeunes et les non-fumeurs. Les symptômes ne se manifestent qu'à un stade avancé de la maladie. Il s'agit principalement de ganglions dans le cou, d'un saignement du nez, ou encore le fait d'avoir l'oreille bouchée sans explication.»
Et le Dr Haddad de conclure: «Les cancers ORL peuvent guérir s'ils sont pris en charge à un stade précoce. Vu que dans 96% des cas ils sont liés au tabac, un rôle public devrait être joué dans l'information, la prévention et la détection précoce. Si le Liban veut donner une image différente de celle d'un pays en voie de développement, il est temps qu'il commence à penser à ses citoyens et à interdire le tabac dans les lieux publics.» Une mesure déjà prise d'ailleurs en Syrie, en Jordanie et dans d'autres pays de la région.

Les cancers ORL ont été au centre d'un congrès organisé récemment à l'hôtel Mövenpick par le service d'oto-rhino-laryngologie (ORL) de l'Hôtel-Dieu, en collaboration avec la faculté de médecine de l'Université Saint-Joseph et la Société libanaise d'ORL. Placée sous le thème du...
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