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Liban

Malgré le poids des handicaps, les talents d’al-Kafa’at font grandir un village

La fondation al-Kafa'at aide des personnes handicapées à mettre en valeur leurs capacités pour travailler dans un cadre protégé. Ce village de tous les « talents » est aujourd'hui en pleine expansion et devrait accueillir en 2011 plus de 600 habitants.
À al-Kafaat, quand on peut travailler, on travaille. Et on en profite pour gagner sa vie : la fondation de la famille Schwayri incite les personnes handicapées dont elle prend soin à mettre en œuvre toutes leurs capacités (« kafa'at » en arabe), aussi différentes et limitées qu'elles puissent être, pour participer à un effort de production collectif. Objets artisanaux, œuvres d'art et autres produits sont mis en vente par la fondation et les bénéfices sont réinvestis dans l'accueil des pensionnaires. Pas question cependant d'utiliser les handicaps et les maladies pour favoriser les ventes : aucune publicité n'est faite autour de la particularité de ces produits, qui doivent être choisis par les clients pour leurs qualités esthétiques ou pratiques.
« Nous avons choisi de ne pas mentionner le handicap de nos amis dans la promotion des produits, explique Myriam Schwayri, directrice de la communication à la fondation. Les gens achètent ce que nous proposons parce qu'ils trouvent ça joli ou utile, pas par charité. Ça permet aux pensionnaires d'être fiers du travail qu'ils font et de mettre en valeur leurs capacités, pas leurs problèmes. » Depuis sa création en 1957, al-Kafa'at a ainsi pour ambition de répondre aux problèmes des Libanais défavorisés en les aidant à identifier leurs talents et à les exploiter pour vivre « comme tout le monde ».

Un lieu de vie
Les adolescents et adultes handicapés sont accueillis dans un centre de jour, équipé de structures qui leur permettent de travailler efficacement et au rythme qui leur convient. Situé à Hadeth, dans la banlieue de Beyrouth où al-Kafa'at est implanté depuis sa création, ce « village » est en cours d'expansion : il accueille actuellement 250 adultes, mais des travaux sont en cours autour du site pour aménager un campus qui pourra recevoir dès 2011 plus de 600 enfants et adultes, tout au long de leur vie, sur une superficie de 8 000 mètres carrés.
Le nom de « village » n'est pas choisi au hasard. Même si la plupart des « habitants » n'y résident pas vraiment à temps plein, le campus se présente d'abord comme un lieu de vie : on y travaille, on s'y amuse, on y mange et, surtout, on s'y fait des amis. On peut ressentir dès l'entrée dans le village cette atmosphère de camaraderie qui y règne, presque comme dans une grande famille. « Tout le monde se connaît, ici, explique Myriam Schwayri. Il y a des bandes d'amis, de petites histoires de conflits et de solidarité comme partout, et chacun se sent chez soi. » Myriam est la fille des deux fondateurs d'al-Kafa'at, mais elle a un statut d'employée au sein de la fondation, qui est aujourd'hui une organisation non gouvernementale dirigée par un conseil administratif. Elle ajoute avec plaisir : « Le sentiment de famille ne vient pas du fait qu'une famille est à l'origine de la fondation, mais de la grande solidarité qui règne dans toutes les institutions. »

« Il y a du travail pour tout le monde »
Cette solidarité se reflète dans le fonctionnement même de ces institutions. Le village est au cœur d'un système presque autosuffisant : il suffit de visiter les locaux actuels pour s'en rendre compte. Certains des « habitants », par exemple, sont employés dans une grande buanderie qu'ils ont appris à faire fonctionner grâce à une formation professionnelle. Cette buanderie offre ses services aux autres institutions de la fondation, qui constituent ainsi des clients fiables. D'autres procédés de complémentarité viennent s'ajouter au système, tels que la production de fruits et légumes par le village pour l'école hôtelière de la fondation. Au sein du centre, un atelier de cuisine utilise également ces produits et confectionne quotidiennement des repas pour les habitants.
« Nous ne cherchons pas à nous refermer sur nous-mêmes, explique Myriam. Il s'agit simplement d'employer un maximum de gens. Et il y a du travail pour tout le monde ! » Les travaux d'agrandissement du centre, financés par la fondation et par différentes organisations internationales, ont pour objectif de multiplier le nombre d'employés. Aujourd'hui, ceux qui travaillent dans les ateliers d'artisanat produisent des paniers, des bougies, des articles en céramique ou encore des tableaux, qui seront vendus sur différents marchés sans mention des handicaps avec lesquels vivent leurs créateurs.

Toujours plus
de talents

Et pourtant, certains de ces handicaps - trisomie, autisme ou infirmité cérébrale - sont difficiles à surmonter. Dans un des ateliers du centre, une dizaine de jeunes hommes et femmes travaillent autour d'une table et sont chargés de déchiqueter des morceaux de carton qui seront ensuite recyclés et serviront notamment d'emballages aux articles produits dans d'autres ateliers.
Autour d'eux, tout un système de formateurs s'activent pour adapter les structures et le travail aux particularités des employés. Ceux qui ont le plus de mal à communiquer disposent d'un système de vignettes qu'ils décrochent sur une pancarte pour exprimer une émotion, un besoin ou une autre information. Le travail qu'ils accomplissent est nécessaire au processus général, et ils ont les capacités utiles pour le mener à bien : toute la philosophie d'al-Kafa'at se concrétise ainsi entre leurs mains.
L'argent produit par les ventes permettra aux habitants du centre de recevoir une rémunération - il faut noter que l'accueil au sein de la fondation est gratuit pour tout le monde. À mi-chemin entre entreprise et école, le village se veut avant tout lieu de vie. Avant le début des vacances d'été, la fête annuelle du campus a réuni les habitants et leurs familles pour faire découvrir à ces dernières les locaux du centre et les travaux qui y sont réalisés, buffet et spectacle musical à l'appui. Leurs activités reprendront à la rentrée, avec chaque année plus de talents à faire découvrir.

À al-Kafaat, quand on peut travailler, on travaille. Et on en profite pour gagner sa vie : la fondation de la famille Schwayri incite les personnes handicapées dont elle prend soin à mettre en œuvre toutes leurs capacités (« kafa'at » en arabe), aussi différentes et limitées qu'elles puissent être, pour participer...
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