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CD, DVD - Un peu plus de...

Et si ce soir on dansait notre dernier slow

On ne le répétera jamais assez : où sont passés les slows ? Pourquoi n'en danse-t-on plus ? Pourquoi les soirées endiablées ne se terminent-elles pas avec des slows langoureux ? Pourquoi on ne prend plus un partenaire pour l'enlacer ? Le laisser descendre ses mains sur nos hanches, respirer son parfum, poser notre tête sur son épaule... Et si ce soir on dansait notre dernier slow... Et si ce soir on tamisait les lumières pour mieux s'étreindre. Et si ce soir c'était la dernière fois... Parce que ce soir, pas de sortie. Parce que ce soir, à partir de 21 heures, il vaut mieux rester chez soi. Parce que ce soir, on attend demain. Demain, le grand jour. Celui où l'on va tous se rendre aux urnes. Tous. Car il le faut. On va voter pour, contre, zay ma hiyyé. Et puis ensuite on se retrouvera autour de la télé, pour essayer de savoir qui s'endormira tranquillement et qui se réveillera mal. On se réunira chez des amis pour savourer (ou pas) la victoire. On n'aura pas les résultats définitifs avant lundi probablement. Demain dimanche, on sera tous sur les routes, ensemble pour la première fois. Pour la première fois, nous allons tous voter le même jour. On va aller au Metn, au Nord, au Sud, dans la Békaa, au Kesrouan, à Beyrouth, à Baabda, au Chouf... On va se croiser. Tôt le matin, dans l'avant-midi, à l'heure du déjeuner, dans l'après-midi. On va crisser des dents en rencontrant les adversaires. On va trembler, remplir une feuille, rayer un nom ou mettre une liste telle quelle dans l'urne. Et on va attendre. Et l'attente va être longue. Car demain ou après-demain, on va contester, se révolter, crier au boycott, à la tricherie. Dépités, on ne comprendra peut-être pas les résultats... Alors, ce soir, on va danser notre dernier slow. Au cas où, comme dans Footloose, un dirigeant aurait la bonne idée de nous interdire un jour de danser, car cela pourrait être dangereux, voire obscène... On ne dansera pas seul ce soir, comme on a malheureusement l'habitude de le faire désormais. On ne sautera pas sur les tables en groupe ou en solo. On ne se déhanchera pas au son d'un morceau électro ou du dernier Sinclar. Ce soir, on va danser un slow... à deux. Ce soir, on va danser collé l'un contre l'autre. On va danser dans la moiteur de cette nuit de juin, pressé contre l'autre. Aucune copine euphorique pour venir nous perturber, ni un jaggal chemise ouverte sur son poitrail fraîchement épilé. Pas même un serveur pour nous demander ce que l'on veut boire. Nul besoin d'un serveur, le champagne est à portée de main (on l'a mis au frais, on ne sait jamais) et les lumières se feront plus sombres. Les rideaux seront fermés, la fenêtre entrouverte, le ventilateur ronronnera et on n'entendra plus que Whiter Shade of Pale  sur le Bose qui reçoit notre i-Pod. Ce soir, on fermera les yeux en essayant de ne pas penser à demain. Ce soir, on regrettera qu'il n'y ait plus de slows. On se demandera comment font les jeunes pour se séduire. On se dira qu'ils ratent ce moment magique où les peaux se frôlent et les bras se croisent. On se dira que ces jeunes vont aller aux urnes demain pour la première fois. Et que ces jeunes-là n'ont quasiment jamais dansé de slows. Ces jeunes qui vont voter demain se draguent par SMS, MSN et Facebook interposés. Ces jeunes font partie de la génération virtuelle. Celle qui n'a pas connu les lettres manuscrites, ni le téléphone qu'on soulève une demi-heure pour avoir la ligne... Tendrement enlacés, on se dira que demain est un autre jour, en écoutant Miracle of Love des Eurythmics, Careless Whisper de George Michael et surtout Imagine de John Lennon. Ce soir, on ne parlera pas, on ne criera pas, on ne se disputera pas, mais on chuchotera dans l'oreille de notre partenaire. On lui dira qu'elle est belle au clair de lune, qu'il est plein de charme dans la pénombre. On lui susurrera d'une voix suave des mots d'amour comme Elvis Presley sur Always On My Mind. Ce soir, on ne parlera pas des élections, on a toute la journée de demain pour le faire. Ce soir, on va suspendre le cours du temps, l'espace d'une nuit. L'espace d'un moment. L'espace d'un slow. Ce soir, on va danser un slow comme Barack et Michèle Obama, en pensant que demain, on va suivre l'exemple américain. En se disant que demain, notre voix va compter. En se disant que demain, on va choisir la démocratie, car on aime la vie...
On ne le répétera jamais assez : où sont passés les slows ? Pourquoi n'en danse-t-on plus ? Pourquoi les soirées endiablées ne se terminent-elles pas avec des slows langoureux ? Pourquoi on ne prend plus un partenaire pour l'enlacer ? Le laisser descendre ses mains sur nos hanches, respirer son parfum, poser notre tête sur...
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