Rechercher
Rechercher

Actualités

Éclairage Il faut bien plus que des renforts US pour pacifier l’Afghanistan

L’arrivée de 20 000 à 30 000 renforts américains l’été prochain en Afghanistan pourrait être utile mais ne suffira pas à mater la rébellion, préviennent des responsables afghans, qui réclament surtout une stratégie américaine moins brutale et plus pragmatique. « Plus le nombre de troupes a augmenté, et plus la sécurité s’est dégradée et la rébellion s’est renforcée », déplore la députée Shukria Barakzaï, peu convaincue par la décision annoncée samedi par l’armée US. « Je ne pense pas que cela va avoir des effets positifs sur la sécurité dans le pays », abonde Safia Sidiqi, une autre députée. D’autres sont moins sceptiques, comme l’analyste politique Haroon Mir, qui juge l’augmentation du nombre de soldats étrangers « positive » et « nécessaire » au vu de la faiblesse du gouvernement et des forces de sécurité afghans, même si « ce n’est pas la solution à long terme ». Le gouvernement afghan a de son côté salué l’annonce de ces renforts, en espérant qu’ils seront déployés dans le sud et l’est du pays, où les combats avec les rebelles sont les plus intenses. Ce souhait semble en ligne avec les intentions des Américains : en visite hier à Kaboul, leur chef d’état-major, l’amiral Michael Mullen (photo), a assuré au président Hamid Karzaï que la majorité de ces renforts serait déployée dans ces régions. Au-delà du nombre de troupes, un constat fait l’unanimité chez les responsables afghans : la situation ne pourra s’améliorer que si les États-Unis atténuent la brutalité de leur stratégie militaire, jugée contre-productive et sans issue, et privilégient le dialogue politique. « S’ils continuent à bombarder et arrêter des innocents, à s’introduire de force dans les maisons, le peuple finira par se soulever, quel que soit le nombre de troupes, et ils échoueront comme les Soviétiques » dans les années 1980, prévient Mosa Khan Nasrat, un député. Les bombardements américains indiscriminés, fatals à de nombreux civils, « nourrissent le sentiment de défiance de la population vis-à-vis de la présence étrangère en Afghanistan, et ce alors que les Afghans étaient au départ plutôt favorables à la présence étrangère, ce qui n’était pas le cas avec les Soviétiques », souligne Haroon Mir. Prenant les devants, le président Karzaï, qui dénonce régulièrement la brutalité de son allié américain, a demandé à l’amiral Mullen à être consulté sur « le type d’opérations » des futurs renforts. Nombre d’observateurs soulignent, à l’image du député Abdul Kabir Rangbar, que « la crise afghane ne pourra être réglée uniquement par les armes », et appellent les Américains à renforcer des institutions jugées défaillantes et largement corrompues, à commencer par la police, et à multiplier l’aide en faveur d’une population laminée par les sécheresses et l’inflation. Certains soulignent également la nécessité de négociations politiques avec le Pakistan, souvent considéré comme la base arrière des talibans, voire avec les rebelles eux-mêmes, une idée qui gagne du terrain à Washington. Fin connaisseur de l’Afghanistan, dont il est originaire, l’ambassadeur américain à l’ONU, Zalmay Khalilzad, a affirmé sur CNN que les États-Unis et le gouvernement afghan pouvaient négocier avec des talibans modérés, mais uniquement s’ils se trouvaient en position de force. Un discours qui laisse à penser que les Américains pourraient intensifier les combats prochainement, comme ils l’ont fait, avec un certain succès, en Irak en 2007. « Avec le risque de continuer à se mettre la population à dos, surtout si rien ne change du côté du gouvernement afghan », souligne cependant Haroon Mir. Emmanuel DUPARCQ (AFP)
L’arrivée de 20 000 à 30 000 renforts américains l’été prochain en Afghanistan pourrait être utile mais ne suffira pas à mater la rébellion, préviennent des responsables afghans, qui réclament surtout une stratégie américaine moins brutale et plus pragmatique.
« Plus le nombre de troupes a augmenté, et plus la sécurité s’est dégradée et la rébellion s’est...