Exposition Le temps suspendu du « Limbo »

Colette KHALAF Marcello Carrozzini donne à voir, à la galerie Aïda Cherfan (centre-ville), une série de toiles en techniques mixtes illustrant l’état de « limbes » dans lequel est plongé l’homme. À mi-chemin entre doute et certitude, entre ciel et terre, le temps s’éternise sur les toiles de Marcello Carrozzini. « Ô temps suspends ton vol et vous, et vous, heures propices, suspendez votre cours ! » Ce peintre et illustrateur, né à Sassari et établi depuis 1999 au Liban, traduit en grands et moyens formats sa culture méditerranéenne panachée aux couleurs chaudes et voluptueuses et son imaginaire peuplé des douces figures de la Renaissance italienne. «Le “Limbo” est un lieu fictif où l’on attend, donc un non-lieu, où passé et futur se confondent », confie Carrozzini. Les personnages qui traversent cet espace en le ponctuant d’instants vécus et de mouvements ne sont que figures évanescentes, à la limite de l’irréel. Par des couches accumulées, mais tout en transparence et légèreté, l’artiste exprime le passage du temps. « Une technique aquatique où des lavis coulent sur les espaces en les diluant et les dissolvant, souligne l’artiste. C’est surtout le Liban qui m’a inspiré ces toiles, car on est toujours dans l’attente de quelque chose qui n’arrivera probablement pas. » Qui sont ces enfants qui jouent au cerceau ou à colin-maillard ? Ont-ils existé ? Les traits à peine esquissés, parfois inachevés, ils ne sont que la reproduction du passage de l’enfance à l’âge adulte. Sans tristesse, mais teintées de nostalgie, les œuvres de Carrozzini ramènent, en dissipant les brouillards de la mémoire, des échos et des souvenirs d’ailleurs. « On trouve toujours dans mon travail, avoue-t-il, des références au passé. » « La création pure existe-t-elle ? » demande-t-il. « Elle n’est que recyclage de tout ce qu’on a accumulé. Si l’artiste n’a pas vu, senti, touché, nourri son imaginaire de ses prédécesseurs, il ne peut rien créer », poursuit Carrozzini. Ayant vécu en Italie, en France et, actuellement, au Liban, et s’étant tour à tour essayé au décor et aux costumes (pièce de théâtre en 2003), à l’illustration (livre pour enfants en 2004) et à de nombreuses expositions picturales collectives, Marcello Carrozzini étale en teintes et harmonies ces instants du passé qu’il retrouve intimement sur ses toiles. Jusqu’au 26 décembre, du lundi au samedi, de 10h30 à 19h30. Tél. : 01/983111-222.