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Actualités - REPORTAGE

Correspondance Rétrospective du grand Richard Avedon

WASHINGTON-Irène MOSALLI Célébrités et inconnus, tous à égalité dans l’objectif du photographe. Richard Avedon, c’est toutes les célébrités de son époque dans son objectif. Et ce n’est pas tout. Cet artiste américain, audacieux et fantaisiste, qui compte parmi les plus grands portraitistes de l’histoire de la photographie, a également fixé sur pellicule d’illustres inconnus : soldats, manifestants et tous genres de gens de métier. Dans sa galerie, il est difficile de savoir qui est qui, tant il donnait de la force et de l’ampleur à ses modèles. Et c’est là son immense talent qui est revisité dans une exposition organisée par la Corcoran Gallery of Art à Washington et intitulée « Richard Avedon : portraits du pouvoir ». Les 231 œuvres accrochées couvrent la tranche de vie de l’artiste s’étendant de 1950 (il avait alors 27 ans et débutait sa carrière dans les photos de mode) jusqu’en 2004, lorsqu’il était décédé soudainement en plein travail à New York. Le « pouvoir » qu’il a capté s’étend au-delà de celui inhérent à ceux qui tiennent les rênes du monde. Son objectif a été attiré par tous ceux touchés par le désir de prendre les choses en main, qui qu’ils soient : depuis les grands artistes et les écrivains jusqu’à des personnes anonymes, tel ce couple participant à une foire aux armes dans le Nevada. Alors, il tirait leur portrait, comme au cordeau, sans y apporter de fioriture. Et il avait plus d’un tour dans son matériel pour simuler une façon d’être qui ne soit pas frelatée. Il avait ainsi expliqué sa manière d’opérer : « J’ai établi une série avec rien. Pas de lumière exquise, pas de composition apparente, pas de séduction des poses ou de narration. Et toutes ces absences me forcent au “oui”. J’ai un fond blanc. J’ai la personne qui m’intéresse et la chose qui se produit entre nous. » Ni pose ni directive Entre lui et ses modèles – des politiciens aux inconnus –, la connexion était primordiale. Dans sa galerie, on retrouve notamment Henry Kissinger tel qu’en lui-même, Ronald Reagan sans retouche, Eisenhower sans ses galons, une brochette de commandants en chef de l’armée, des soixante-huitards échevelés et Bella Abzug, la papesse du féminisme et son grand chapeau. Autant de caractères tracés avec précision, impartialité et bien cadrés. En développant ses photos, il leur conserve la bordure noire du négatif comme pour mieux cerner l’essence du sujet. Sa technique consistait à ne pas faire poser ses sujets, à leur donner le minimum d’instruction et à les photographier de près pour les révéler dans toute leur réalité. A travers eux, c’est tout l’esprit d’une époque qu’il a immortalisé. Avedon est né à New York dans une famille d’origine russe. Son père lui offre son premier appareil photographique à l’âge de 10 ans avec lequel il réalise le portrait du célèbre compositeur russe Serguï Rachmaninov, le voisin de ses grands-parents. Sa mère assure son éveil artistique. Après avoir brièvement fréquenté l’Université de Columbia, il commence sa carrière de photographe dans la marine américaine en1942, en prenant des photographies d’identité (d’où son goût pour le portrait) des équipages avec le Roleiflex que son père lui avait offert. Puis il se lance dans la photo de mode et fait un tabac dans Harper’s Bazar et Vogue tout en n’oblitérant pas l’actualité politique et culturelle : la lutte pour les droits civiques aux États-Unis, les manifestations contre la guerre du Vietnam avec dans ce dernier domaine son fameux portrait, Les sept de Chicago, des activistes photographiés durant leur procès. Il se passionne également pour le grand Ouest américain et réalise des portraits de grand format de pêcheurs, de mineurs et de cow-boys. En 1992, il devient le photographe attitré du New Yorker. S’ensuivent, pour ce grand portraitiste de l’Amérique, une kyrielle de prix et des expositions dans les musées les plus prestigieux. Sa définition du portrait : « Un portrait n’est pas une ressemblance. Dès lors qu’une émotion ou qu’un fait est traduit en photo, il cesse d’être un fait pour devenir une opinion. L’inexactitude n’existe pas en photographie. Toutes les photos sont exactes. Aucune d’elles n’est la vérité. »
WASHINGTON-Irène MOSALLI

Célébrités et inconnus, tous à égalité dans l’objectif du photographe.

Richard Avedon, c’est toutes les célébrités de son époque dans son objectif. Et ce n’est pas tout. Cet artiste américain, audacieux et fantaisiste, qui compte parmi les plus grands portraitistes de l’histoire de la photographie, a également fixé sur pellicule...