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Actualités - CHRONOLOGIE

Concert Sensibilité, nuance et puissance du jeu du pianiste virtuose Vardan Mamikonian

Edgar DAVIDIAN Une salle comble à l’Assembly Hall (AUB) où officiait samedi soir le pianiste virtuose Vardan Mamikonian pour l’un des plus brillants concerts de la rentrée musicale organisé par le Hamaskaïne. Pour la circonstance, programme dense et serré incluant des pages de Bach, Brahms, Tchaïkovsky, Babajanian et Liszt. Entre élans romantiques et touche arménienne, s’est épanoui sous les feux de la scène, au grand plaisir des auditeurs, le remarquable talent, fait de sensibilité, de nuances subtiles et d’un jeu puissant, d’un pianiste inspiré. Il est celui qui a accompagné la cantatrice Hasmik Papian dans un exceptionnel enregistrement gravé sur CD dédié à Komitas, avec un texte non seulement en langue de Tcharentz, mais aussi en langue allemande dont des poèmes de Goethe…CD salué par la presse et le public comme un événement marquant. Mais ce soir, devant le clavier, Vardan Mamikonian, vêtu d’une chemise et d’un pantalon noirs, les cheveux ondulés, les doigts incroyablement agiles, était celui qui avait toutes les libertés pour un concert envoûtant. Présence, touche unique, tempérament, fougue, sensibilité d’écorché vif, brio, bravoure et absolue maîtrise, c’est tout cela Vardan Mamikonian derrière les touches d’ivoire… Ouverture fastueuse avec les grandes arches sonores, majestueuses et lumineuses, de la superbe Chaconne de Bach-Busoni où la musique est une prière ardente. Entre cri et jaillissement du cœur, cette chaconne dont la modulation s’amplifie et gronde parfois comme un orage déchaîné, se transforme au gré des notes en une fervente formulation, une demande à Dieu, une supplication débordante de ferveur et de piété. Pour prendre le relais, rien de mieux que ces Variations sur un thème de Haendel (op 24), revisitées par Johannes Brahms. Douceur, imaginaire romantique et poésie du paisible compositeur du Requiem allemand pour la rigueur de Haendel. Longue et prolifique narration, avec des embranchements parfois tentaculaires. Des variations aux motifs multiples et aux sautes d’humeur délicieuses où les notes s’enchaînent en une sarabande parfois endiablée jusqu’aux derniers accords, brusquement redoutables comme une dangereuse et tumultueuse montée des eaux… Devant le jeu musclé et raffiné à la fois de Mamikonian pour dompter des notes paradoxalement soyeuses et droites, une tache noire dans la salle où une gosse pleurait en toute impunité et liberté comme dans une cour de recréation… Où sont donc les organisateurs et les placeurs ? Cela ne devrait pas arriver, diriez-vous à raison, mais c’est arrivé… Petit entracte et reprise avec le plus cosmopolite des musiciens russes, c’est-à-dire voilà le Thème original et variation op 19 de Tchaïkovsky. Telle une sournoise mélancolie, la musique se répand en nappes veloutées et ondoyantes, mais d’où sourd un certain spleen… Celui d’un musicien aux secrets lourds pour qui la musique est confidence et libération… Avec d’imperceptibles moments où la colère pointe et repart comme chassée d’un festin où les remous intérieurs ont toujours de la tenue, une souveraine élégance. À cet imperceptible grain de tristesse, c’est à juste titre qu’arrive la voix chargée de toute la lumière de l’Arménie de Babajanian. Trois pièces courtes et finement enrobées de l’esprit et des parfums du pays de Sayat Nova. De l’émouvante Élégie à la sémillante et populaire Danse Vagharshabad, en passant par ce splendide Poème, d’une écriture absolument moderne, Babajanian a toujours le don non seulement de capter l’attention de l’auditeur, mais de l’émouvoir en profondeur… Lyrisme teinté d’une certaine tristesse, art des silences mais aussi une superbe part d’arménité que traduit avec un souffle inimitable le talent et l’art de Vardan Mamikonian. Pour conclure la Rhapsodie espagnole de Franz Liszt, le plus virtuose des virtuoses des pianistes. Un bijou de morceau aux effets des plus hautement pianistiques. C’est-à-dire arpèges ruisselants, accords somptueux, vélocité, appogiatures, frénésie des tempi, couleurs ibériques intempestives, c’est tout cela cette œuvre brillante, à l’interprétation ardue, mais où Vardan Mamikonian triomphe en toute incroyable simplicité. Sans jamais cogner ou marteler, son jeu reste d’une admirable souplesse et maîtrise. Ovation drue et persistante comme une pluie torrentielle. Révérence de l’artiste tout sourire, une gerbe de fleurs et bien sûr un bis généreusement accordé après un concert qui demande un effort intense. Pour rester dans la magie du moment, ce sont les couleurs arméniennes aux teintes grenat qui l’emportent avec un suave opus d’Aram Khatchadourian d’une déroutante ivresse rythmique…
Edgar DAVIDIAN

Une salle comble à l’Assembly Hall (AUB) où officiait samedi soir le pianiste virtuose Vardan Mamikonian pour l’un des plus brillants concerts de la rentrée musicale organisé par le Hamaskaïne.

Pour la circonstance, programme dense et serré incluant des pages de Bach, Brahms, Tchaïkovsky, Babajanian et Liszt. Entre élans romantiques et touche arménienne,...