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Actualités - REPORTAGE

Reportage Guerre des gangs et affrontements communautaires dans un quartier de Paris

Meurtre par balles, agressions répétées à l’arme blanche, bagarres entre bandes… Avec ses cités cernées de murs qui donnent l’impression d’être à l’écart de la « Ville lumière », ses barres d’immeubles et une forte population immigrée, une partie du 19e arrondissement de Paris évoque étrangement les banlieues déshéritées qui se sont embrasées à l’automne 2005. On est pourtant à peine à 15 minutes de métro de l’Hôtel de Ville et du musée du Louvre. « Oui, j’ai peur d’aller dans ces cités », affirme sans hésiter Mourad M., un père de famille de 35 ans. Et d’énumérer une série de violences dont il a été témoin. « Le Bronx au nord de Paris ? » se demandait récemment le quotidien Le Monde. Curial, Cambrai, Riquet : chaque ensemble d’immeubles a son nom, et en plein jour, ces cités paraissent paisibles. Juste quelques sifflements qui fusent et des voix qui se hèlent d’un bâtiment à un autre. Fausse apparence car la nuit venue, l’ambiance se métamorphose, assurent des habitants interrogés sur place. Au pied des immeubles, les jeunes se rassemblent par groupes et se déplacent ainsi, la drogue et l’argent circulent, voire même les armes. L’affrontement avec les jeunes d’autres cités est parfois inévitable, pour le contrôle d’un territoire ou une histoire de fille. « La cité, c’est la tribu. Ils fonctionnent comme dans un autre âge », explique Djilali I. qui tient un commerce tout près de la cité Cambrai. Le 18 septembre, la police a dû déployer un impressionnant dispositif pour arrêter un jeune impliqué dans une agression, observe-t-il. « Au quotidien, les policiers ne sont pas les bienvenus. Personne ne coopère avec eux », souligne-t-il. Le 7 septembre, un jeune homme a été assassiné par balles. Le 10, un autre est blessé par balle. Le 15, deux jeunes sont blessés à coups de couteau. Cette série de violences a commencé le 21 juin avec l’agression d’un jeune juif, dont le caractère antisémite a été retenu par la justice. Avec environ 40 000 personnes, le « 19e » abrite la plus importante communauté juive de la capitale, autour du parc des Buttes-Chaumont, un des plus agréables jardins de Paris qui surplombe la ville et dont les environs attirent aussi des ménages aisés. Après l’agression, début septembre, de trois jeunes portant la kippa, la peur s’est de nouveau emparée de cette communauté, même si la justice n’a cette fois pas retenu de motivation antisémite. Signe de cette inquiétude, le grand rabbin Gilles Bernheim a souhaité qu’il « soit à nouveau agréable de vivre dans le 19e arrondissement », dans un message à la veille de Roch Hachana, le nouvel an juif. De son côté, le maire de Paris Bertrand Delanoë a réuni des représentants de différentes communautés et lancé un « comité d’initiative pour le vivre- ensemble ». « On n’est pas en 1939 comme en Allemagne », relativise Habib Meyer, responsable de la communauté juive et habitant du quartier. « Toutefois, dit-il, il ne faut pas ignorer les tensions » qui, selon lui, ne sont pas liées au Proche-Orient puisqu’elles impliquent plus souvent les jeunes « Blacks » que les jeunes Arabes. « Il y a des rues où les jeunes juifs ont peur de passer. Il y a des brimades qui ne sont pas toujours suivies de plaintes », dit-il en rejetant l’argument d’un « repli » des juifs qui ont leurs écoles, leurs commerces et restaurants casher, et refuseraient de se mêler aux autres. « Il y a beaucoup de professeurs non juifs dans nos écoles », affirme-t-il. « Ils veulent rester tout seuls. C’est pour cela qu’on les provoque un peu », disent de jeunes Noirs. La situation est souvent ambiguë, entre réflexe communautaire, indifférence et volonté de vivre ensemble. Lycéenne d’origine algérienne, Mélissa, qui observe le jeûne du ramadan, assure au contraire que tous ses amis sont des juifs. Amer OUALI (AFP)
Meurtre par balles, agressions répétées à l’arme blanche, bagarres entre bandes…
Avec ses cités cernées de murs qui donnent l’impression d’être à l’écart de la « Ville lumière », ses barres d’immeubles et une forte population immigrée, une partie du 19e arrondissement de Paris évoque étrangement les banlieues déshéritées qui se sont embrasées à...