Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Éclairage Et s’il ne s’agissait pas d’un simple problème de contrebande ?... Scarlett Haddad

Le mouvement de troupes syriennes à la frontière nord suscite des interrogations. Il intervient après des propos attribués à Assad au cours du sommet de Damas... Les précisions officielles fournies par le commandement de l’armée sur le déploiement de dix mille soldats syriens le long de la frontière avec le Liban ne peuvent pas occulter les précédentes informations sur d’éventuels développements dans le Nord du pays. S’il est certain que la contrebande à travers la frontière avec le Liban pose un grand problème aux autorités syriennes, notamment avec la pénurie de mazout que ce pays a connu l’année dernière, et s’il est certain que des incidents se sont déroulés récemment entre les contrebandiers et les militaires syriens dans le secteur proche de la frontière avec le Liban, le déploiement militaire pourrait aussi avoir d’autres causes et surtout être considéré comme un message musclé aux autorités libanaises et à certaines parties régionales... Selon un ancien ministre et député proche des Syriens, le sommet qui s’est tenu le 4 septembre à Damas et qui a réuni, outre le président syrien, son homologue français Nicolas Sarkozy, le Premier ministre turc Rajab Tayeb Erdogan et l’émir du Qatar a débuté par une intervention de Bachar el-Assad, qualifiée de la plus grande importance. Ce dernier aurait ainsi abordé devant ses interlocuteurs la situation au Liban-Nord et l’influence grandissante des groupes islamistes qui, selon lui, s’en prennent aux alaouites et multiplient les agressions, notamment dans les villages frontaliers avec la Syrie. Le président syrien aurait encore expliqué la composition délicate et complexe de la population syrienne, ainsi que la lutte permanente de son régime, depuis la prise du pouvoir par son père et après sa propre élection à la tête de l’État, contre les tentatives de déstabilisation menées par les groupes islamistes. Le président syrien aurait encore rappelé aux dirigeants présents que chacun d’eux est engagé dans une guerre contre le terrorisme, sur son territoire et dans d’autres pays, directement ou indirectement. Il aurait ainsi évoqué l’engagement de la France en Afghanistan, par exemple, ainsi que la guerre menée par les Turcs contre les « terroristes kurdes du PKK », ainsi que la lutte permanente menée par le Qatar contre les islamistes. Or, aurait ajouté le président syrien, les terroristes sont en train de s’installer aux frontières de la Syrie et multiplient les agressions, dans une volonté évidente de menacer le régime syrien. Bachar el-Assad aurait ensuite précisé avoir évoqué cette question avec le président libanais et il aurait affirmé à ses interlocuteurs que si une solution n’est pas rapidement trouvée aux cellules salafistes installées au Nord, il se verrait dans l’obligation de réagir pour protéger ses frontières et les citoyens syriens. Cette déclaration musclée aurait pris un peu de court les interlocuteurs de Bachar el-Assad, mais face à l’évocation de la menace terroriste, il leur a été difficile d’adopter des positions tranchées. Les échos des propos du président syrien ont d’ailleurs circulé dans les coulisses diplomatiques, et toujours selon l’ancien ministre et député proche de la Syrie, ils seraient parvenus aux oreilles des dirigeants saoudiens. Ce serait donc à ce moment-là que les dirigeants de Riyad auraient demandé une accélération du processus de réconciliation au Liban-Nord, qui a même poussé le chef du Courant du futur à se rendre au domicile d’été de l’ancien Premier ministre Omar Karamé, dans une volonté évidente de reconnaître son rôle et son leadership. Solennelle et spectaculaire, la réconciliation du Nord était donc voulue, estime la même source, pour couper court aux menaces à peine voilées syriennes d’intervenir directement, la présence des salafistes à ses frontières constituant, selon Bachar el-Assad, un danger réel pour son pays. C’est d’ailleurs la première fois en plus de trente ans qu’une rencontre en haut lieu réunit des dirigeants sunnites et des dirigeants alaouites, ces derniers étant d’habitude considérés comme n’étant pas une entité libanaise propre, mais plutôt comme un prolongement syrien. La réconciliation de Tripoli a eu d’ailleurs des conséquences immédiates dans la ville, puisque le spectre d’incidents ou d’affrontements semble écarté. Mais selon des sources du Nord, les cellules salafistes actives dans la ville se seraient réfugiées au Akkar, Tripoli n’étant plus, après la réconciliation, une base efficace et protégée. Ces mêmes sources n’avancent pas de chiffres précis, mais parlent de plusieurs centaines de combattants qui se cacheraient désormais dans les collines et les vallées peu fréquentées du Akkar. Comme ils ne sont pas encore actifs, précisent les sources du Nord, ils n’ont pas encore été identifiés avec exactitude ni localisés. Mais les mêmes sources ajoutent qu’il y a deux sortes de salafistes actifs au Liban : ceux qui relèvent d’une autorité précise et sont rattachés à des chefs connus et ceux qui gravitent dans une nébuleuse que nul ne parvient à préciser. Ces derniers sont les plus dangereux, car ils ne possèdent pas un agenda connu et agissent selon leur propre logique. Dans ce contexte encore assez obscur, la situation au Akkar n’est pas claire et si les alaouites, installés généralement dans les villages proches de la frontière avec la Syrie, peuvent toujours trouver refuge dans ce pays, les chrétiens se sentent eux, moins rassurés. Le général Michel Aoun et l’ancien ministre Sleimane Frangié comptaient d’ailleurs se rendre dans la région pour dissiper d’éventuelles craintes, dans une tournée historique, comme celle qui a mené le chef du CPL au Sud, mais le projet a été reporté pour l’instant, en raison des derniers développements dans le reste du pays. Les mouvements de troupes syriennes à la frontière, même s’ils sont justifiés et restent limités au territoire syrien et au problème de la contrebande, ont rappelé aux Libanais que la situation au Nord n’est pas encore totalement réglée, et l’émergence de nouveaux foyers de tension reste encore possible.
Le mouvement de troupes syriennes à la frontière nord suscite des interrogations. Il intervient après des propos attribués à Assad au cours du sommet de Damas...
Les précisions officielles fournies par le commandement de l’armée sur le déploiement de dix mille soldats syriens le long de la frontière avec le Liban ne peuvent pas occulter les précédentes informations sur...