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Actualités - REPORTAGE

Success Story Les gourmandises de Nayla Audi

Carla HENOUD Les glaces ne l’ont jamais laissé froide. C’est en péchant par gourmandise que Nayla Audi a réussi le doublé sucré-salé, desserts et restauration. Elle fut, dit-on, rapidement pardonnée par les dieux, friands de ses petites gâteries… En entreprenant des études en sciences politiques, elle a tenté, sans y parvenir, de partager la passion de son père Abdel Latif pour ces sphères. Nayla el-Zein Audi n’a fait que confirmer son manque d’appétit pour la matière, ne retenant de ces années à l’AUB que quelques notions sans saveur, qui ont juste réussi à assouvir sa curiosité et épanouir sa culture générale, la laissant sur sa faim. « L’injustice, précise-t-elle, est une chose qui me rend malade. Je ne peux pas me retrouver dans cet univers. » Son univers, où elle semble chez elle, c’est ce restaurant situé au centre Gefinor, ouvert en 2005, et qu’elle a baptisé du nom de Victor Gruen, l’architecte qui l’a créé dans les années 60. « Je n’ai pas de bureau », confie-t-elle. Ici, la dame a des amis à chaque table. Elle sourit, salue, sans jamais s’installer, sans jamais, également, baisser la garde. Car son regard scrute chaque détail, chaque geste de ses employés, chaque assiette qui circule. Il en est de même dans ses cuisines privées de Mar Mikhaël, comme lorsqu’il s’agit d’un péché mignon que l’on garde dans la poche, où elle concocte ses glaces, 50 parfums aujourd’hui, créant une gamme sans cesse renouvelée sous le label de Oslo. Parcours atypique C’est en vivant à New York que Nayla Audi s’est adonnée sans limites à sa passion pour les desserts glacés. « J’étais fascinée, raconte-t-elle, par une série de petites boutiques qui venaient d’ouvrir et qui proposaient un célèbre produit belge, non plus comme une simple glace, mais comme un dessert. Elles ouvraient jusqu’à minuit, hiver comme été, et la queue était interminable, même sous la neige. » N’étant bien servie que par elle-même, elle fait ses « premiers pas glacés » dans un restaurant de la grande pomme durant trois mois, avant de poursuivre l’apprentissage seule. Glaces, mais aussi macarons glacés, cookies, cakes, tout y passe. « J’étais devenue obsédée par la qualité ! » Sa gourmandise avouée, « ma principale motivation ! », mêlée à une rigueur presque scientifique vont allonger la liste de ses tendres spécialités qu’elle offre lorsqu’elle est invitée à un dîner, comme d’autres rapportent des bonbons, parce que les fleurs, c’est périssable. Et puis un jour, après être rentrée au Liban, une amie, certainement bien intentionnée, lui confie : « Je voudrais ta glace, mais sans avoir à t’inviter ! » Une cuisine semi-professionnelle est improvisée. Les freezers sont installés sur le balcon, les turbines à glace des copines sont empruntées. « J’ai vendu tout l’été de la glace au chocolat, à la vanille et au café. » Restauration Le balcon est vite remplacé par un atelier, d’abord situé… au palais de Lady Cochrane, provisoirement mis à sa disposition par la maîtresse de céans et son fils. « Tous ces sacs de sucre et de farine à l’entrée du palais, c’était à la fois absurde et sublime. Le temps de se réajuster », et c’est cap sur Mar Mikhaël. De 200 kg par mois, la production, qui inclut vente au détail, aux hôtels et aux restaurants, est actuellement passée à 5 tonnes mensuelles. Les 3 parfums se sont multipliés pour devenir 50, et la glace, 100 % naturelle, s’est confirmée comme un dessert pour toutes les saisons. « Mon souci, ici et au restaurant, est de garder cette affaire à une échelle humaine. » Depuis peu, et parce qu’elle avait envie d’une expérience plus vaste et qu’elle connaît Los Angeles aussi bien que Beyrouth pour y avoir vécu, Nayla Audi s’est associée avec le chef Bret Thompson dans l’aventure de Milk, un charmant restaurant situé à Beverly Boulevard. À son retour, l’automne passé, heureuse d’avoir réussi ses différents paris, sans les avoir réellement prémédités, elle décide de « rendre » à son pays un peu de ce sourire qui a germé en elle. « Je travaille sur la création d’une ligne complète de Mouné, avec tous les ingrédients basiques locaux, des graines au thym à l’huile d’olive et la halawa, pour pouvoir identifier le petit agriculteur de toutes les régions du Liban et proposer ses produits à meilleur prix. Il ne s’agit pas pour moi, précise-t-elle, de faire de l’argent, je n’y gagnerais rien. Mon but est uniquement d’essayer de garder les agriculteurs dans leurs villages et d’empêcher que ne disparaisse la mémoire culinaire du Liban. » « La glace est un produit magique qui amène du bonheur, » conclut-elle. Il lui en aura amené plus d’un, qu’elle peut déguster et c’est bien mérité, en douceur.
Carla HENOUD

Les glaces ne l’ont jamais laissé froide. C’est en péchant par gourmandise que Nayla Audi a réussi le doublé sucré-salé, desserts et restauration. Elle fut, dit-on, rapidement pardonnée par les dieux, friands de ses petites gâteries…
En entreprenant des études en sciences politiques, elle a tenté, sans y parvenir, de partager la passion de son père...