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Actualités - CHRONOLOGIE

« L’Orient-Le Jour » recueille trois témoignages de victimes de voleurs à mobylette Le vol à l’arraché de sacs à main, véritable cauchemar des Libanaises Lélia MEZHER

La recrudescence des vols à l’arraché est indéniable dans certains quartiers de la capitale. La victime, une fois remise du choc qu’elle vient de vivre, n’a la plupart du temps qu’une chose à faire : se rendre au commissariat le plus proche et déposer une plainte contre un ou des inconnus tout en étant convaincue dans son for intérieur qu’elle ne récupérera jamais son bien. Il est près de 4h00, dimanche à l’aube, et Carole M., 24 ans, vient de se faire « piquer » son sac à main alors qu’elle poussait la porte d’entrée de son immeuble. Elle est maintenant assise dans le bureau du policier censé recueillir sa déposition au commissariat d’Achrafieh. Le bureau reste désespérément vide. Au mur, une carte de cette portion d’Achrafieh agrémentée – surprise ! – du nom des rues. Il y a aussi quelques posters d’une campagne contre l’abus d’alcool au volant, pour le port de la ceinture de sécurité, etc. À 4h30, le policier arrive, ensommeillé. Il s’excuse du retard, dit avoir eu à régler un incendie qui s’est déclaré non loin de la place Sassine à cause d’un court-circuit. « Alors, que s’est-il passé ? » s’enquiert-il sans toutefois manifester beaucoup d’intérêt. Carole M. le regarde puis, sans grande conviction, énumère les étapes de sa mésaventure nocturne. « Voilà. Je revenais de Gemmayzé en voiture, seule. Je n’ai demandé à personne de me raccompagner. Chemin faisant, je me rappelle avoir entendu le bruit d’une mobylette. Je n’y ai pas vraiment prêté attention. Arrivée à proximité de mon immeuble, je me suis rendu compte que j’entendais toujours ce bruit de mobylette. Je suis rentrée dans le petit parking où je me gare d’habitude et j’ai contacté une amie. J’ai parlé au téléphone pendant un moment, je me suis dit que j’allais attendre que ces gens-là s’en aillent », raconte-t-elle. « Seulement ils ne sont pas partis. Et comme j’en avais un peu assez de rester dans la voiture, j’ai décidé de sortir. Alors que je poussais la porte de l’immeuble, j’ai senti qu’on m’arrachait violemment mon sac. J’ai crié, mais l’agresseur a disparu avec son coéquipier qui l’attendait au coin de la rue sur la petite moto », poursuit-elle. Le policier demande alors si elle est capable de reconnaître l’homme en question, mais la jeune femme répond par la négative. « Je n’ai vu que ses cheveux qui étaient un peu longs à l’arrière. Et il est très mat de peau, c’est tout ce que j’ai pu voir », indique-t-elle. Après avoir dressé la liste des objets et documents qui se trouvaient dans son sac avec l’aide du policier, Carole M. signe sa déposition et sort du commissariat. « Ils sont sûrement repartis en direction de la Quarantaine. Ce ne sont pas des gens du quartier », affirme le policier qui la raccompagne à la porte. Il est déjà 5h30. Avant de se rendre au commissariat, Carole M. avait tenté de joindre les FSI au téléphone. Au commissariat d’Achrafieh, et durant plus de 15 minutes, personne n’avait répondu à ses appels. Elle a dû appeler le 112, puis le policier qui a répondu a contacté lui-même le commissariat pour qu’enfin un policier décroche… Trois semaines ont passé et, depuis, les FSI n’ont jamais rappelé la jeune femme. Elle a dû entamer les procédures nécessaires pour obtenir un nouveau permis de conduire, une nouvelle carte d’identité, etc. Christiane S., la trentaine, habite pour sa part deux rues plus loin, près de l’école Zahret el-Ihsan. Elle aussi s’est fait voler son sac alors qu’elle rentrait de Gemmayzé aux alentours de 1h00, le 28 juin dernier. « J’avais remarqué, alors que j’étais en voiture, que deux personnes à moto roulaient derrière moi. Mais je ne me suis pas vraiment inquiétée parce que la moto était en très bon état et que les deux hommes avaient l’air soigné. Pas du tout un profil de voleurs en tout cas », se rappelle-t-elle. Ce n’est qu’une fois dans l’impasse de son immeuble qu’elle réalise qu’elle est suivie. « J’ai compris qu’il voulait mon sac. J’ai donc coincé celui-ci entre mon bras et la porte d’entrée. Je me trouvais quasiment dans l’immeuble, ce n’était plus qu’une question de secondes en fait. Mais il était déjà en face de moi. J’ai beaucoup résisté, je lui ai déchiré son tee-shirt et c’est alors qu’il m’a donné un coup de poing dans le visage. J’ai reçu le coup dans l’œil. Il a finalement pris le sac et il est remonté sur la moto où l’attendait son complice », raconte-t-elle encore. Christiane S. s’est défendue parce qu’elle avait une somme importante d’argent dans son sac, mais le voleur a quand même réussi à obtenir gain de cause. Elle est allée au commissariat et a porté plainte. Elle a ensuite dû soigner ses blessures : bleus, contusions, etc. À force de se repasser cet épisode dans la tête, elle réalise aujourd’hui qu’elle a en fait été suivie depuis Gemmayzé, peut-être même depuis le parking où se trouvait sa voiture. Nayla H., la trentaine également, habite Badaro. Le 31 mai dernier, elle rentrait chez elle aux alentours de 14h00 quand, venu de nulle part, un homme à mobylette l’agresse dans le but de lui voler son sac. « Je l’ai vu arriver. J’ai tout de suite fermé les bras sur mon sac à main. Il a alors passé la main dans une des anses du sac. » Nayla H. s’agrippe à son sac, l’homme remonte à moto. La jeune femme est tractée par la mobylette, l’anse du sac à main se casse. « J’ai fait trois tours en l’air et j’ai eu l’omoplate cassée. Je suis restée immobilisée pendant 2 mois, puis j’ai amorcé une rééducation de deux autres mois », raconte-t-elle. La jeune femme est très amère parce que « cela s’est passé en plein jour » et que « personne n’a rien remarqué ». « Juste derrière chez moi, il y a deux casernes de l’armée libanaise », s’empresse-t-elle d’ajouter sur un ton indigné. A-t-elle porté plainte ? « Non, ça je n’y crois pas, ce n’est même pas la peine. » Pourtant, Nayla H. se dit en mesure de reconnaître son agresseur « à 90 % ». John C., un Britannique de 65 ans vivant au Liban depuis une dizaine d’années, habite Hazmieh. La semaine dernière, alors qu’il était dans sa voiture, il a été heurté de plein fouet par une femme qui conduisait, tombeau ouvert, sur la route de Hazmieh. Après l’avoir percuté, elle est descendue hagarde de son véhicule 4x4. Elle venait de se faire voler son sac à main à sa sortie de la banque où elle venait de retirer de l’argent. Son agresseur s’était emparé du « butin » et avait enfourché sa mobylette. La rage au ventre, la femme était montée dans son véhicule et s’était fixé pour objectif de suivre le voleur. Résultat, elle a presque provoqué un carambolage dont John C. en a fait les frais. « Elle m’a percuté, elle est ensuite descendue de la voiture. Elle était folle de rage. Ses cartes de crédit, son téléphone portable, son argent liquide, sa vie entière se trouvaient dans ce sac à main. »
La recrudescence des vols à l’arraché est indéniable dans certains quartiers de la capitale. La victime, une fois remise du choc qu’elle vient de vivre, n’a la plupart du temps qu’une chose à faire : se rendre au commissariat le plus proche et déposer une plainte contre un ou des inconnus tout en étant convaincue dans son for intérieur qu’elle ne récupérera jamais...