Derrière la légende, l’homme

Le 2 octobre 1985 mourait l’acteur américain Rock Hudson, première célébrité mondiale à annoncer être malade du sida. Il s’appelait Roy Harold Scherer Jr., plus connu sous le nom de Rock Hudson. Son image de bel athlète séduisant au sourire irrésistible a un jour été flétrie par une nouvelle… ô combien fatale. En 1985, il est la première vedette à déclarer publiquement être atteint du sida. Un choc tellurique secoue alors le monde des stars. Cette secousse contribuera à attirer une grande attention sur son homosexualité, alors totalement inconnue du grand public, mais également sur ce fléau encore très tabou. Enfant unique d’une modeste employée, abandonné très tôt par son père, Rock connaît une enfance difficile aux côtés d’une mère dominatrice et autoritaire et d’un beau-père violent. Il s’engage dans la marine à 18 ans en 1943, est démobilisé en 1946 et exerce par la suite plusieurs petits métiers (ouvrier agricole, camionneur). Il tente sa chance à Hollywood et attire l’attention d’un chasseur de talent, Harry Wilson, qui lui permet tout d’abord de faire de la figuration puis d’obtenir des rôles secondaires dans les films d’action et les westerns de Raoul Walsh. Sa rencontre en 1952 avec Douglas Sirk est décisive pour sa carrière puisqu’elle lui permet de devenir une véritable star. Il aborde à partir des années 60 le registre comique, notamment en formant un duo efficace avec Doris Day dans des comédies sentimentales légères comme Pillow Talk en 1959 où il se révèle drôle et attachant. Dans les années 70, le beau gosse se tourne plutôt vers les séries télé?: McMillan and Wife (1971) et, plus tard, Dynastie (1984-1985). C’est alors que les spectateurs vont, jour après jour, se rendre compte des métamorphoses physiques. Le «?Roc?» n’est plus qu’une allure fantomatique au visage émacié et au regard hagard. La presse américaine se pose des questions qui demeureront sans réponses jusqu’au jour où, revenu de l’Institut Pasteur en France où il avait été faire une série d’examens, le comédien donnera une conférence de presse au cours de laquelle il annonce son homosexualité et sa maladie, à la stupéfaction de l’Amérique profonde qui réalise à quel point l’image publique des vedettes telle que les studios la construisent peut se révéler éloignée de la réalité. Rock Hudson était l’archétype du jeune premier désirable, gendre idéal et, bien évidemment, hétérosexuel. «?Au moins, mon infortune aura eu des effets positifs?», dira-t-il sur son lit de mort. La mort de Rock Hudson aura marqué le début d’une implication de longue date de l’industrie du divertissement américaine dans la lutte contre le sida. Elizabeth Taylor, une proche de l’acteur, en est toujours aujourd’hui l’une des figures de proue. «?Un choc venu de la prise de conscience du fait que l’un des grands sex-symbols américains était gay?», se souvient Craig Thompson, directeur de la Fondation sida de Los Angeles (APLA), une association d’aide aux malades, créée en 1983.