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Actualités - OPINION

Le festin de Tlazolteotl Pr Antoine COURBAN

Tlazolteotl, dont le nom signifie « la mangeuse d’ordures », est une déesse du panthéon des Aztèques, les anciens habitants de l’actuel Mexique. Les rites religieux de ce peuple nous paraissent aujourd’hui particulièrement sanguinaires et cruels. Ils peuvent nous laisser sceptiques quant à la pertinence de l’usage que les hommes font de certains attributs divins. Les Aztèques étaient convaincus que le soleil cesserait sa course et toute vie s’arrêterait si Tezcatlipoca, le dieu de la nuit, n’était pas régulièrement nourri par le sang d’un cœur chaud et palpitant d’un homme à qui les prêtres doivent, avec une remarquable dextérité, ouvrir la poitrine et arracher d’un coup de main le cœur encore battant afin de l’offrir à la divinité. Ce sacrifice atroce devait être répété tous les matins afin que le sang, comme métaphore de la course du soleil, ne cesse pas de couler. C’est pourquoi les guerres aztèques avaient pour principal objectif d’obtenir ce « carburant », fait de chair et de sang, essentiel à la survie du soleil et du cosmos. Cela ne doit pas surprendre. Toute culture de la mort fait de cette dernière le prérequis de la vie. Une telle culture macabre n’a aucune considération pour la vie individuelle et le concept de personne humaine résonne comme un tonneau vide dans la tête des prédicateurs fanatiques qui font de la mort un laissez-passer pour leur paradis. Le slogan de cette idéologie, inhumaine et cruelle, sera toujours : il faut mourir pour vivre. Les Aztèques ne pensaient pas autrement. Certains s’offraient volontairement comme sacrifices humains, au même titre que ceux qui, aujourd’hui, commettent des attentats-suicide afin de gagner le paradis. Il est probable que l’invention culturelle du « bouc émissaire », comme sacrifice de substitution, a permis aux hommes de calmer la voracité sanguinaire des dieux assoiffés de sang, tout en sauvant de nombreuses vies humaines. En cela, le bouc émissaire, celui qui porte les souillures humaines, est rédempteur. La déesse Tlazolteotl était aussi une déesse de la rédemption. Elle ne se nourrissait pas de sang mais uniquement d’immondices. C’était en quelque sorte la Déesse-Poubelle, la Déesse-Immondices ou la Déesse-Souillure. Cela ne l’empêchait pas d’être une figure nocturne comme déesse de la fécondité, de la luxure et des mauvaises pensées. C’est pourquoi, avant de mourir ou de se laisser arracher le cœur palpitant, les fidèles se confessaient dévotement à Tlazolteotl. Ils lui renvoyaient toutes les ordures qu’elle leur avait inspirées et, par cette confession, ils se purifiaient de toute souillure. Dans l’enceinte du Parlement libanais, à l’occasion du récent débat de confiance, les députés de la nation ont offert à Tlazolteotl un festin de choix dont l’histoire gardera la mémoire pérenne du menu délicatement concocté. De tous les représentants de la nation libanaise, présents dans cet hémicycle saugrenu, ceux qui se réclament de la chose divine étaient aux petits soins de la déesse aztèque. Quand Ali Ammar proclama sa mémorable injonction catéchétique : « Quiconque veut parler du parti de Dieu doit au préalable purifier sa gueule de toute souillure », Tlazolteotl entra en extase gourmande. Cette recommandation, à elle seule, entraîna une mémorable indigestion chez Talzolteotl, qui se dépêcha de fuir les lieux, sachant qu’il est des indigestions qui entraînent le trépas, même chez les dieux. Qu’elle fut sage, la Tlazolteotl... Article paru le vendredi 15 août 2008
Tlazolteotl, dont le nom signifie « la mangeuse d’ordures », est une déesse du panthéon des Aztèques, les anciens habitants de l’actuel Mexique. Les rites religieux de ce peuple nous paraissent aujourd’hui particulièrement sanguinaires et cruels. Ils peuvent nous laisser sceptiques quant à la pertinence de l’usage que les hommes font de certains attributs divins. Les...