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Actualités - CHRONOLOGIE

Malgré les réticences européennes et arabes, et les critiques des défenseurs des droits de l’homme, Sarkozy a pu lancer l’UPM Le « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée », une unité fondée sur les compromis et la coopération

Ils sont venus, ils sont tous là. Presque tous. Les 44 chefs d’État ou de gouvernement des pays de l’Union européenne et du pourtour méditerranéen – à l’exception du dirigeant libyen, Mouammar Kadhafi, et du roi du Maroc Mohammad VI – ont finalement lancé hier l’Union pour le Méditerranée (UPM), à Paris. La France a dû revoir à la baisse ses ambitions – ce qui s’est traduit par l’appellation « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » – pour passer le cap de l’UE, après avoir été sévèrement critiquée par certains pays, alors que d’autres n’étaient pas très enthousiastes vis-à-vis de la nouvelle initiative de Nicolas Sarkozy. Mais le plus difficile aura été de convaincre les dirigeants des pays du sud et de l’est du bassin méditerranéen, à participer à ce projet. Si le Maroc, la Tunisie, la Jordanie, Israël et le Liban ont accueilli favorablement la proposition française, d’autres États n’ont pas caché leurs réticences. Ainsi, les pays arabes ont demandé dans un premier temps des « clarifications » sur la participation d’Israël à l’UPM, lors du Forum des pays de la Méditerranée (Formed) à Alger. À cette occasion, le ministre algérien des Affaires étrangères, Mourad Medelci, a souligné que les pays membres de la future UPM n’ayant pas de relations avec Israël ne devaient « pas être contraints de participer à des projets communs » avec cet État au sein de l’UPM. La deuxième gifle est venue du colonel Kadhafi qui n’a pas hésité à exprimer publiquement tout le mal qu’il pensait du projet de son « ami » Nicolas Sarkozy. « Nous ne prenons en aucun cas le risque de déchirer l’unité arabe ou africaine », a lancé le dirigeant libyen, dénonçant l’UPM comme « un appât » ou « une forme d’humiliation ». M. Kadhafi a qualifié par ailleurs l’UPM de « projet passager » voué à l’échec, au même titre que le processus de Barcelone ou la politique de voisinage de l’UE avec ses voisins de la rive sud de la Méditerranée. Autre difficulté, le président algérien Abdelaziz Bouteflika aura donné du fil à retordre à Nicolas Sarkozy. Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, s’est déplacé à deux reprises en six mois, ainsi que le Premier ministre François Fillon en juin, sans oublier la visite d’État du président français en novembre, pour convaincre ce partenaire incontournable de participer au sommet. Ce n’est qu’au sommet du G8 que M. Bouteflika a mis fin au suspense, en annonçant qu’il participerait en personne à la réunion parisienne. En confirmant sa présence, le chef de l’État algérien a levé une des dernières incertitudes qui pesait sur le sommet du 13 juillet, avec le niveau de participation de la Turquie. L’Union méditerranéenne avait en effet également provoqué une levée de boucliers à Ankara, où l’initiative française a été perçue comme un moyen de contourner l’intégration de la Turquie dans l’Union européenne. Le Premier ministre Erdogan a hésité jusqu’à la dernière minute à participer au sommet d’hier, ne cédant finalement qu’après une conversation téléphonique avec Nicolas Sarkozy. Même l’Égypte, grande puissance africaine et acteur crucial dans le monde arabe, n’était pas enthousiaste il y a quelques mois encore. Ce n’est qu’après la promesse d’accorder la coprésidence de l’UPM au Caire que le raïs égyptien, Hosni Moubarak, s’est décidé de participer au sommet. Autre cas délicat, la participation de la Syrie. L’ouverture de l’Élysée vers le régime de Damas et l’invitation lancée à Bachar el-Assad ont suscité une vague de critiques, notamment en ce qui concerne les violations des droits de l’homme, et l’influent rôle syrien dans l’instabilité politique au Liban. « Bien sûr, la Syrie n’est pas parfaite en matière de droits de l’homme », convient-on dans l’entourage du président de la République. « Mais s’il avait fallu faire le sommet de l’Union pour la Méditerranée seulement avec des démocraties, qui aurait-on invité ? » a déclaré cette source élyséenne citée par Le Figaro. « Pas Ben Ali, pas Bouteflika, pas Kadhafi, pas Moubarak… » De fait, beaucoup d’ONG de défense des droits de l’homme voient d’un mauvais œil ce sommet qui rassemble, d’une part, les pays européen, réunis par des valeurs communes fondées sur la démocratie, la diversité et les libertés et, d’autre part, une majorité de régimes autoritaires. Mais c’est ce pari risqué que le président Sarkozy a voulu prendre. Et hier, il a réussi à réunir autour d’une même table rivaux, adversaires de toujours et frères ennemis. Pour y parvenir, il a fallu évidemment beaucoup de volonté, d’arrangements et de compromis. Le « Processus de Barcelone : Union pour la Méditerranée » apparaît comme le résultat d’un long parcours semé d’embûches et de défis, qui a débuté avec le Processus de Barcelone, en passant par la Politique de voisinage (PEV) pour aboutir aujourd’hui à l’UPM. Malgré la modestie des projets de l’UPM, on peut espérer, à l’avenir, un approfondissement des relations Nord-Sud. Le parcours de l’Union européenne serait en effet l’exemple à suivre. Pour la première fois dans l’histoire de la « Mare Nostrum », une forme d’unité apparaît, fondée sur la coopération et non sur la conquête et les invasions, pratiques privilégiées sous les Empires romain, byzantin, arabe ou ottoman, ainsi que lors des croisades. Dossier réalisé par Antoine AJOURY
Ils sont venus, ils sont tous là. Presque tous. Les 44 chefs d’État ou de gouvernement des pays de l’Union européenne et du pourtour méditerranéen – à l’exception du dirigeant libyen, Mouammar Kadhafi, et du roi du Maroc Mohammad VI – ont finalement lancé hier l’Union pour le Méditerranée (UPM), à Paris.
La France a dû revoir à la baisse ses ambitions – ce...