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Actualités - OPINION

La situation régionale et l’accord interlibanais de Doha II - Vers un apaisement des conflits au P-O

Nous avons un trio Iran-Turquie-Israël, auquel vient s’adjoindre un quatrième élément qui est l’Arabie saoudite. Ce pays joue un rôle très particulier?: dans ce nouvel équilibre régional, il représente les Arabes sunnites. Ce qui permet en quelque sorte de «?légitimer?» cette nouvelle architecture aux yeux des peuples de la région. Malgré et contre tout… connivences?? Notons simplement que ce pays n’a pas de force militaire significative (à l’instar des trois autres). Mais que, par contre, il possède une influence financière et religieuse-idéologique considérable, qui fait que, malgré certains «?effacements?» provisoires, le royaume saoudien, de par ses liens étroits avec Washington, est susceptible de maintenir son prestige dans la région et au Liban (Voir L’Orient-Le Jour du jeudi 5 mai 2008 ). Dans cette nouvelle architecture régionale, avec quatre puissances périphériques séparées par une zone tampon, deux questions cruciales se posent?: premièrement, ce schéma entraîne-t-il des guerres permanentes?? Deuxièmement, mène-t-il à la partition de la région selon des entités ethniques ou religieuses?? La réponse à ces deux questions est bien entendu difficile, mais il est possible de décrire des éléments de réponse. D’abord, il y a une faible probabilité de guerres «?majeures?» dans la région (par exemple entre Israël et l’Iran) tant que l’armée US sera présente en force. Car cette armée est capable de détruire chaque pays de la région (sans nécessairement l’envahir), ce qui crée une force de dissuasion empêchant des aventures militaires de vaste envergure. De plus, Israël détient l’arme atomique, et même (et surtout) si l’Iran ou d’autres pays accédaient à l’arme nucléaire, il se créerait probablement une forme de dissuasion mutuelle, à l’image de la dissuasion Inde-Pakistan, tous deux puissances nucléaires et qui coexistent depuis des décennies, malgré des différends au moins aussi graves que ceux observés au Moyen-Orient. Ensuite, il est probable que les guerres de « basse intensité?», les guérillas et les résistances (Hezbollah, Hamas) connaissent une stabilisation. En effet, ces guerres «?asymétriques?» ont pour but essentiel de contraindre un adversaire plus puissant à la négociation, car celui-ci ne peut répondre facilement. Or, d’une part, l’Iran émerge de plus en plus comme «?protecteur?» de ces mouvements. Autrement dit, pour Israël par exemple, l’adversaire n’est plus un mouvement dispersé dans une population et difficile à atteindre, mais un État organisé qu’il peut frapper, comme il l’a fait avec l’Égypte de Nasser. Conclusion, si l’Iran d’Ahmadinejad se présente en protecteur des mouvements résistants, alors il a paradoxalement intérêt à modérer leur comportement (comme on l’a vu après juillet 2006). Vérité que l’on ne dit pas assez. D’autre part, si la région se dirige vers une paix, alors la majorité des mouvements résistants perdront leur raison d’être première. Les seuls mouvements qui pourraient subsister seraient de tendance messianique comme el-Qaëda, dont le but (la destruction d’Israël et l’affaiblissement des USA) est d’emblée difficile à atteindre…Dans ce cas précis, il serait possible qu’une étroite coopération sécuritaire entre les puissances régionales ainsi qu’avec les USA permette de limiter l’impact de ces mouvements. Enfin, et surtout, la situation actuelle voit l’émergence de «?gagnants?» clairs, visibles et puissants (Iran, Turquie, dans une moindre mesure Israël, ainsi que l’Arabie saoudite, grâce à la hausse du pétrole et l’enrichissement). Tandis que les «?perdants?» sont moins évidents à identifier car, de manière presque fortuite, les «?perdants?» potentiels sont tous alliés à des «?gagnants?»?: chaque partie au Liban (8 ou 14 Mars), en Syrie, en Irak, dans les territoires palestiniens…est liée à l’un des quatre pays périphériques qui sortent renforcés politiquement et/ou économiquement, ou aux USA. Qui a perdu?? La vérité, peut-être, mais on ne le saura que dans le futur. Pour le moment, la région semble se diriger vers un apaisement des conflits. Cet apaisement pourrait-il se faire sur fond de partitions en entités ethno-religieuses, en particulier dans la «?zone tampon?» du centre?(le Croissant fertile?: Irak, Syrie, Liban) ? Il est bien entendu difficile de répondre de manière tranchée. En effet, les tensions religieuses font que le risque de partition est présent. Mais, d’un autre côté, un certain nombre d’éléments penchent contre ce scénario à court terme. En effet, premièrement, une partition est plus difficile qu’il n’y paraît. Certains pays ont des populations très imbriquées, comme le Liban. D’autres, comme la Syrie, ne pourraient être partagés qu’à l’issue d’une guerre sanglante, ce que la majorité des Syriens semblent refuser. Enfin un pays comme l’Irak rencontrerait un problème de partage des ressources pétrolières, amplifié par la hausse du prix du pétrole. De plus, il est difficile d’envisager la partition d’un pays isolément, par exemple le Liban, car, dans la situation régionale actuelle, une partition dans un pays, par exemple entre sunnites et chiites, entraînerait une partition de tous les autres pays. C’est tout ou rien... ce qui laisse suggérer le statu quo. Deuxièmement, une partition produirait des entités ethniques ou confessionnelles fortes et difficiles à contrôler, en lieu et place des États actuels, qui sont fédéralisés et faibles. Elle pourrait engendrer des conflits permanents, coûteux et qui risqueraient d’entraîner les protecteurs (Iran, Turquie, Israël, Arabie saoudite) de ces États confessionnels, contre leur gré, dans des guerres de grande envergure. Surtout, une partition ne pourrait se faire que sur base d’un accord entre ces puissances régionales, l’Iran voulant contrôler les chiites, la Turquie les Kurdes, etc. Au plan stratégique et politique, elle serait l’équivalent d’une «?invasion?» de la «?zone tampon?» du centre (le Croissant fertile) par les puissances périphériques (Iran, Turquie, Israël). Or, d’abord, la présence militaire des USA, justement au centre de cette région, rend cette « invasion?» difficile. Ensuite, et surtout, cette «?partition-invasion?» serait inutile, car les pays de la périphérie contrôlent déjà les pays du centre à travers une répartition minutieuse des «?parts?» dans le gâteau du pouvoir. L’accord interlibanais de Doha, conclusion de deux années d’une âpre lutte, est bien là pour le montrer. Et Doha est la capitale du Qatar, qui est à la fois la plus grande base militaire américaine de la région (un tiers de la superficie de l’émirat), ainsi qu’un pays qui entretient des liens à la fois avec Israël, l’Iran, la Syrie, l’Arabie saoudite et les USA, pour ne citer que ceux-là. Fouad KHOURY HÉLOU Prochain article?: Après Doha, «?fédéralisation?» et non partition
Nous avons un trio Iran-Turquie-Israël, auquel vient s’adjoindre un quatrième élément qui est l’Arabie saoudite. Ce pays joue un rôle très particulier?: dans ce nouvel équilibre régional, il représente les Arabes sunnites. Ce qui permet en quelque sorte de «?légitimer?» cette nouvelle architecture aux yeux des peuples de la région. Malgré et contre tout…...