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Actualités - RENCONTRE

RENCONTRE - Ce soir à 18h00, au théâtre Montaigne, un débat suivi de la signature de son livre «?Les murs ne font pas la prison?» Joëlle Giappesi dialogue avec son autre

C’est un cri de survivante, un aveu d’amour et de foi, et un message d’espoir que lance Joëlle Giappesi dans son ouvrage paru aux éditions Tamyras, «?Les murs ne font pas la prison?». Témoignage poignant d’une personne qui revient de très loin, ce livre fera l’objet d’un débat ce soir, à 18h00, au théâtre Montaigne, en présence de multiples associations, et sera suivi d’une signature. Avec pudeur et élégance, Joëlle Giappesi raconte ses meurtrissures et son parcours de combattante. Arrêtée en 2001 pour détention de drogues dures et condamnée à cinq ans de prison ferme, internée dans les pires conditions à la prison Barbar Khazen à Verdun, cette enseignante franco-libanaise à l’USJ, auparavant cadre d’entreprise en France et alors mère d’une enfant de huit ans, vivra son incarcération à la fois comme une descente aux enfers et une résurrection à une vie nouvelle. Ni les murs qui suintent, ni les cafards et les rats, ni les égouts, ni l’étroitesse de la cellule et la chaleur suffocante, ni le choc culturel dû à la promiscuité n’auront raison de sa détermination. À évoquer ces journées passées dans un microcosme dantesque avec Darine, Samar, Adira et les autres, sa dure soumission à l’ordre établi à l’intérieur de la prison, sa rupture avec l’extérieur et sa lente plongée dans le monde de l’horreur, le regard de Joëlle Giappesi se fait étrangement lumineux et sa voix plus douce. «?Aujourd’hui, avoue-t-elle, je suis en paix avec moi-même et j’ai foi dans la vie.?» Plus aucune aigreur, aucune amertume dans cette sérénité retrouvée. Giappesi a entrepris de réaliser sa propre thérapie et sa rédemption derrière les barreaux. Et elle y est parvenue. «?Est-ce que cinq ans de prison étaient vraiment justifiés?? s’interroge-t-elle. J’ai peut-être eu de la rancœur envers cette société qui m’a condamnée. Mais aujourd’hui, c’est oublié.?» Un parcours turbulent Dans cette recherche éperdue de l’identité, l’ex-toxicomane, «?qu’il est doux de prononcer ce mot?», souligne-t-elle, a donc entamé dans son ouvrage une totale mise à nu. Ne craignant aucun tabou et rejetant tout poncif, l’auteure n’emprunte aucun sentier de traverse, mais la voix royale. Celle de la franchise et de la transparence?: «?J’ai toujours abhorré l’hypocrisie et le mensonge, dit-elle. D’ailleurs, c’est une des raisons qui m’a poussée à me mettre en marge de la société.?» Par des mots justes, dénués de tout pathos et souvent empreints d’humour, malgré la violence de la situation, Giappesi offre un ouvrage qui se laisse lire à la fois avec intérêt et plaisir. Dans sa solitude de femme, elle évoque son besoin de tendresse, ses malaises, ses douleurs et surtout, surtout, sa volonté de s’affirmer par rapport au regard des autres. Si le récit démarre par deux lettres abruptes et sèches, «?O.K.?», «?il n’a pourtant rien d’un règlement de comptes?», affirme-t-elle. À travers ces lignes, on croirait entendre un hurlement s’enfoncer dans la nuit de la souffrance physique et mentale pour déverrouiller petit à petit les portes de l’intime et en sortir victorieux. Joëlle Giappesi écrit. Les images et les mots qui se bousculent dans sa tête raisonnent en écho dans les consciences endormies d’une société indifférente. Comment accepter l’inacceptable?? Supporter les humiliations?? Admettre de perdre toute sa dignité?? Comment remonter petit à petit cette pente si glissante et si dangereuse sans l’aide de personne?? Quel est le rôle de la réinsertion des prisonniers au Liban?? «?Il n’y a aucune structure, aucune action de la part des autorités pénitentiaires, judiciaires ou autres pour la sortie des prisons, estime Giappesi. Même pas une préparation psychologique. Seuls les ONG et les bénévoles accomplissent un travail régulier en proposant des ateliers de couture ou des cours d’arabe.?» Pour Joëlle Giappesi, enfin libérée de prison mais surtout de ses démons d’antan, ces cinq ans auront été une période cathartique, un long monologue intérieur exprimé au fil des pages, pour enfin atteindre l’acceptation de soi. ?«?Si j’ai écrit ce livre pour me libérer de ma propre prison, il est néanmoins adressé aux dépendants de toutes sortes (alcooliques, drogués…). Je voudrais leur dire qu’on peut s’en sortir et qu’il est bon de vivre. Certes, je n’ai pas de recette ni de mode d’emploi, mais un simple témoignage, vrai, d’un vécu à offrir en partage.?» Et de conclure?: «?J’étais non seulement anesthésiée à la douleur, mais aux plaisirs de la vie.... Aujourd’hui, j’ai réussi à me pardonner moi-même, à m’accepter et à tolérer les autres en allant au-delà des différences.?» Une rédemption, mais à quel prix?? À voir Joëlle Giappesi lumineuse et sereine, dirigeant l’école d’arabe destinée aux étrangers, on peut constater qu’après ce long vécu douloureux, il n’est jamais trop tard pour aller chercher le bonheur. Au fond de soi. Colette KHALAF
C’est un cri de survivante, un aveu d’amour et de foi, et un message d’espoir que lance Joëlle Giappesi dans son ouvrage paru aux éditions Tamyras, «?Les murs ne font pas la prison?». Témoignage poignant d’une personne qui revient de très loin, ce livre fera l’objet d’un débat ce soir, à 18h00, au théâtre Montaigne, en présence de multiples associations, et sera...