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Actualités - OPINION

LE POINT Jusqu’au bout

À la télévision, le journaliste se livrait à un exercice d’autocritique : « Je me souviens avoir prédit au soir de la consultation dans l’Iowa, le 3 janvier, une longue attente, probablement jusqu’au 6 février, date du Super Tuesday, avant de connaître le nom du candidat du Parti démocrate. Nous sommes à la fin de la première semaine de mai et toujours dans la même incertitude. » À l’instar de Robert G. Kaiser, rédacteur en chef adjoint du Washington Post, c’est toute l’Amérique qui n’en revient pas, la moitié démocrate du pays du moins, car les républicains, eux, boivent du petit lait en suivant les incroyables péripéties de la version électorale de Gunfight at the OK Corral. Le dernier épisode en date de ce (trop) long métrage vient de se jouer en Caroline du Nord et dans l’Indiana, le premier État ayant été enlevé dans un fauteuil par Barack Obama sur le score de 56,2 pour cent des voix contre 41,5 pour cent à Hillary Clinton, le second par celle-ci lors d’une arrivée qui s’est jouée dans un mouchoir de poche : 50,9 pour cent-49,1 pour cent. Suivant le camp dans lequel on se trouve, on peut juger qu’après sa large victoire en Pennsylvanie, la sénatrice est de nouveau en selle dans la course à la Maison-Blanche, même s’il a fallu recourir à la photo pour départager les deux concurrents ; ou, au contraire, que c’est son adversaire qui vient de conforter son avance avec un écart de près de 150 000 voix et, au total, de plus de 150 représentants. Il est évident que le chiffre requis de 2 024 délégués ne sera pas atteint d’ici à l’été, quand se tiendra, du 25 au 28 août, la convention du parti, à Denver, dans le Colorado ; mais il est tout aussi clair que le représentant de l’Illinois ne peut plus être rejoint. Il faudra en effet à l’ancienne First Lady gagner largement les six consultations à venir, portant sur le choix de 217 représentants et étalées sur un délai allant de mardi prochain 13 mai en Virginie de l’Ouest au mardi 3 juin dans le Montana et le Dakota du Sud. Autant dire qu’elle devra réussir une mission jugée impossible par ses propres stratèges. Va-t-elle donc poursuivre jusqu’au bout sa double entreprise de sape de la formation politique à laquelle elle appartient et d’annihilation de toutes les chances d’Obama de battre John McCain ? Avant-hier soir, elle a glissé, au détour d’un laïus de circonstance, une petite phrase qui pourrait signifier un bouleversement tactique : « Je peux vous assurer, a-t-elle déclaré à l’intention d’un groupe de ses partisans, que quoi qu’il arrive, je travaillerai pour le candidat que le parti désignera. » Un temps, puis : « Il faut comprendre que ce qui est en jeu c’est l’avenir de l’Amérique. » Il est vrai qu’elle a lancé aussi, peu après, un tonitruant : « Pleins gaz sur la Maison-Blanche ! » qui en dit long sur ses intentions véritables, s’attirant cette riposte cinglante d’un cacique : « Sait-elle seulement que la partie est jouée ? » Il y a toujours un point à élucider, portant sur les primaires de Floride et du Michigan, pour lesquelles elle s’était portée candidate, contrairement à son adversaire, et dont elle réclame la comptabilisation. Un compromis sur ce sujet est possible, a fait savoir Howard Dean sur MSNBC, président de la convention nationale, mais il faudra que les deux candidats en acceptent l’idée – autrement dit, que, nul ne cherchant à en tirer un avantage significatif pour lui, il faudra bien se résoudre à proclamer le match nul. En attendant un accord de plus en plus hypothétique, on notera avec amusement que la campagne au sein du parti de l’âne s’est jouée ces deux dernières semaines sur un thème cher au cœur de l’adversaire républicain. C’est McCain en effet qui avait avancé l’idée d’une suspension, l’espace de l’été, de la taxe fédérale sur l’essence, un geste qui serait apprécié par les automobilistes alors que le prix du gallon avoisine les 4 dollars. Hillary a défendu sa suggestion de faire payer cette tranche de l’impôt par les majors du pétrole lors d’un entretien télévisé avec George Stephanopoulos, un ancien conseiller de son époux. Et comme celui-ci la jugeait plutôt farfelue, elle a répondu, imperturbablement, incurablement populiste : « Décidément, l’élite approuve toujours les actions défavorables à l’immense majorité des Américains », dans une allusion à son adversaire qui l’avait rejetée. Obama élitiste… Le jugement est porté par une femme dont la fortune personnelle est évaluée à 109 millions de dollars mais qui n’en prétend pas moins défendre la cause des déshérités, à l’encontre d’un homme élevé par une mère seule, globe-trotter et remariée à un ressortissant indonésien. Un politicien qui, s’étant fait à la force d’un quotient intellectuel rarement égalé, voudrait demain faire souffler un vent nouveau sur les États-Unis, après huit années de galère républicaine. Christian MERVILLE
À la télévision, le journaliste se livrait à un exercice d’autocritique : « Je me souviens avoir prédit au soir de la consultation dans l’Iowa, le 3 janvier, une longue attente, probablement jusqu’au 6 février, date du Super Tuesday, avant de connaître le nom du candidat du Parti démocrate. Nous sommes à la fin de la première semaine de mai et toujours dans la même...