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Actualités - CHRONOLOGIE

Clôture du sommet de Damas par une déclaration toute en nuances Pour le Liban, c’est encore et toujours Amr Moussa ! Damas, de Scarlett HADDAD

«Nous avons confié désormais le dossier libanais aux îles Comores. Ce sera à eux de le résoudre puisque tout ce que nous faisons est mal interprété. » C’est par cette boutade que le président syrien Bachar el-Assad répond, avec un éclat de rire, à une question de L’Orient-Le Jour sur sa disposition à résoudre la crise libanaise. Il est 13h30 au Palais des Congrès, à Ebla, à 20 km de Damas, et le président syrien s’apprête à quitter les lieux, satisfait de la clôture sans problèmes du sommet arabe qui s’est tenu en Syrie, « envers et contre tout », comme on dit à Damas. Bachar el-Assad avance lentement vers la sortie, saluant les présents et répondant à toutes les sollicitations. Lui et son entourage affichent un grand soulagement, et comme l’explique l’un de ses proches, « le sommet a été un succès pour la Syrie ». Ouvert sur les propos provocateurs du colonel libyen Moammar Kadhafi, il s’est terminé hier par la main tendue de l’émir du Qatar cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani. Entre ces deux moments forts, il y a en tout un travail de regroupement et d’aplanissement des obtacles qui a permis au président Assad de considérer qu’il a réussi « son sommet » et qui a surtout abouti à une déclaration finale réalisant un subtil équilibre entre les différentes positions arabes. D’abord, explique une source syrienne, la Syrie a obtenu un regain de solidarité arabe avec elle contre les pressions exercées dans le cadre du Syria Accountability Act. Autrement dit, la déclaration finale a soigneusement évité d’accuser nommément l’Administration américaine d’exercer des pressions sur la Syrie. Ensuite, la Syrie a obtenu le retour au processus de paix arabe dans le cadre de la conférence de Madrid et basé sur le principe de la terre contre la paix, ce qui constitue un durcissement de la position arabe vis-à-vis d’Israël. D’ailleurs, la déclaration finale a encore été plus loin, rendant l’initiative de paix arabe tributaire des efforts accomplis par Israël dans le sens de cette paix. Or, les pays arabes dits modérés n’étaient pas favorables à un tel durcissement, mais le courant syrien l’a emporté et la décision a été adoptée à l’unanimité. Sur le dossier irakien, il n’y a pas eu de véritable consensus, et la résolution finale évite de prendre parti en faveur du gouvernement ou des insurgés. Elle se contente d’appeler à l’unité de l’Irak, et refuse de qualifier les troupes américaines de « forces d’occupation », évoquant « la présence de troupes étrangères ». D’ailleurs, cette position en demi-teinte, après les attaques samedi du colonel Kadhafi, a poussé le président de la délégation irakienne à enregistrer ses réserves après la lecture de la déclaration finale. Selon une source syrienne, cette démarche aurait été faite en concertation avec les autorités syriennes qui comprennent bien que le gouvernement irakien se doit de réagir. Ce serait aussi la raison pour laquelle le président de la délégation irakienne a tenu une conférence de presse, alors que les journalistes attendaient Amr Moussa et Walid Moallem. Sur le dossier libanais, la déclaration finale a été totalement insipide puisqu’elle s’est contentée de réaffirmer son appui à l’initiative arabe et aux efforts de Amr Moussa pour l’appliquer. Et ce n’est certes pas l’ancien député Adnane Traboulsi qui allait y changer quelque chose. Ce dernier était le seul Libanais présent au sein des délégations officielles… en sa qualité de consul de Somalie au Liban ! Selon des sources palestiniennes, le contenu de la déclaration finale avait été soigneusement préparé au cours de la séance à huis clos, qui a duré 3 heures et demie, samedi soir. Les mêmes sources précisent que lorsque le dossier libanais a été évoqué, le président syrien aurait déclaré qu’il ne fallait pas examiner ce dossier en l’absence du pays concerné. « C’est une question de principe et il ne faut pas créer un précédent », aurait-il souligné. Et les présents seraient aussitôt passés à autre chose. Il a été ensuite question du dossier palestinien et de la médiation yéménite. Le président de l’Autorité palestinienne aurait affirmé qu’il ne faut plus de dialogue, mais qu’il est temps de passer à l’exécution. Et finalement, les Arabes ont trouvé une formule qui recommande « un dialogue pour le mécanisme d’exécution ». Le dossier des relations interarabes a été longuement évoqué et, selon les sources palestiniennes, les délégations saoudienne et égyptienne étaient très courtoises, voire aimables. Mais tout comme sur le dossier irakien, il n’y a pas eu de consensus. Et le Qatar a demandé à la Somalie, qui devait accueillir le prochain sommet arabe en mars 2009, de lui céder son tour. La Somalie ayant accepté, le Qatar a donc pris à sa charge de régler le dossier des relations interarabes pour faire de son sommet celui des « réconciliations ». Les mêmes sources palestiniennes précisent que la coordination semblait totale entre l’émir du Qatar et le président syrien, et tous deux comptent agir de concert au cours de l’année pour traiter les dossiers en suspens. Bachar el-Assad prend en charge l’Irak et la Palestine, en raison de ses relations avec l’Iran et les différentes parties irakiennes et palestiniennes. De son côté, l’émir du Qatar travaillera sur les relations entre l’Égypte, l’Arabie saoudite et la Syrie, et dans la foulée, il devrait aussi inclure le dossier libanais. Les impressions recueillies à l’issue de ce sommet font état d’une grande franchise dans les discussions, loin de toute langue de bois et des formules alambiquées si chères aux Arabes. Mais la grande innovation de ce sommet, selon une source syrienne, c’est qu’il a « brisé la tradition des sommets arabes centrés autour de deux ou trois pays puissants et réduisant les autres au rang de figurants ». Désormais, poursuit la source syrienne, chaque pays a son poids et son rôle. L’Arabie saoudite et l’Égypte, qui sont « les deux géants » traditionnels, se sont prononcées, et les autres pays, même dans le Golfe, n’ont pas suivi. Il ne s’agissait certes pas, à travers ce sommet, de créer un axe antisaoudien ou antiégyptien, précise la source syrienne, mais de donner à chaque pays le droit d’avoir son propre rôle. C’est pourquoi, après les discours assez sévères sur la déplorable situation des relations interarabes, le président syrien a conclu son sommet par une note positive, mettant l’accent sur la franchise des débats et précisant que l’action commune arabe pourrait commencer par là… En principe donc, une nouvelle page devrait s’ouvrir entre les Arabes. Mais comme le dirait Kadhafi, chez ceux-ci, entre les mots et les actes, il y a un monde…
«Nous avons confié désormais le dossier libanais aux îles Comores. Ce sera à eux de le résoudre puisque tout ce que nous faisons est mal interprété. » C’est par cette boutade que le président syrien Bachar el-Assad répond, avec un éclat de rire, à une question de L’Orient-Le Jour sur sa disposition à résoudre la crise libanaise. Il est 13h30 au Palais des Congrès, à Ebla, à...