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Algérie : la bataille contre les tabous

Lila, interne en médecine à 22 ans, appartient à l’une des plus anciennes familles de la bourgeoisie d’Alger. Yasmine, un an de moins, est fille d’un industriel. Leurs références appartiennent au modèle européen, l’actrice Monica Bellucci est citée comme idéal féminin et Brad Pitt comme modèle masculin. Kahina, 27 ans, éducatrice à Bejaia, est la quatrième fille d’un émigré en France et d’une femme au foyer. Nora en dernière année de droit, père routier mère au foyer, vient de Tizi Ouzou, en Kabylie. Toutes sont peu bavardes lorsqu’on aborde la sexualité et surtout le plaisir. On détecte dans leurs discours des mots, des phrases toutes faites, piqués dans les séries télévisées occidentales et les magazines. En revanche, elles avouent en riant qu’elles connaissent « les techniques et les positions ». On se rend compte que finalement aucune ne parle de son plaisir ou de son expérience personnelle. Les célibataires sont presque étonnées par cette question, puisqu’elles sont censées ne pas avoir de rapport sexuel. À quelques nuances près, arriver au mariage vierge est impératif. Yasmine et Lila s’en accommodent, « en Algérie il vaut mieux ». Pour Kahina et Nora, les deux Kabyles, mais aussi pour Meriem, une élégante biologiste, et Amira, une femme de ménage, la virginité « si tu la perds personne ne te le pardonnera ». Mais elles comprennent que « les accidents peuvent arriver ». La réfection de l’hymen ? Pourquoi pas si cela sauve une réputation, nous disent Kahina, Meriem et Amira. Jamais, décrètent Yasmine et Lila. La contraception aussi est reléguée dans le lot de sujets qui ne seront traités qu’après le mariage. Beaucoup d’ailleurs avouent ignorer tout du sujet. On a tendance à les croire, car en Algérie le problème des enfants nés hors mariage se pose avec acuité. L’avortement interdit en Algérie est pratiqué quelquefois de manière clandestine dans des cabinets privés. La majorité des jeunes filles interviewées y voient là « un péché ». Lila et Yasmine, nos deux riches héritières, se déclarent « à 100 % pour le droit à l’avortement ». Meriem, Amira et Rahma souhaitent qu’il soit possible aux femmes d’avorter en cas « de bêtise » dans des structures qui assurent l’anonymat. Et l’amour dans tout ça ? Oui, mais à condition qu’il aboutisse au mariage et aux enfants. Mais comment rencontrer l’homme de sa vie avec un environnement semé d’embûches ? Se fréquenter signifie se retrouver dans des restaurants et cafés, se promener dans les parcs ou flirter dans des lieux discrets. Un flirt « poussé » sans jamais arriver à la pénétration. Dixit l’intrépide Meriem. Ghania KHELIFI
Lila, interne en médecine à 22 ans, appartient à l’une des plus anciennes familles de la bourgeoisie d’Alger. Yasmine, un an de moins, est fille d’un industriel. Leurs références appartiennent au modèle européen, l’actrice Monica Bellucci est citée comme idéal féminin et Brad Pitt comme modèle masculin. Kahina, 27 ans, éducatrice à Bejaia, est la quatrième fille...