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Actualités - CHRONOLOGIE

Les campagnes de fouilles du British Museum mises en scène les 5 000 ans de Saïda, un beau documentaire signée Claude Doumet May MAKAREM

C’est le premier film archéologique réalisé au Liban. Il retrace dix années de fouilles menées par l’équipe du British Museum, en collaboration avec la Direction générale des antiquités, sur le site de l’ancienne école américaine de Saïda. Conçu par Claude Doumet Serhal, qui dirige les excavations depuis 1998, il permet au grand public de découvrir l’histoire de cette cité phénicienne qui fut tour à tour perse, grecque, romaine et byzantine. En version anglaise sous-titrée en arabe, le documentaire, de 40 minutes, intitulé « Sidon 5 000 years » a été produit par les Amis anglo-libanais du musée national de Beyrouth (LBFNM) et financé par les fondations Old House, Farès et Hariri, la Cimenterie nationale et Murex. Le film a été projeté à l’auditorium de l’ESA, rue Clemenceau, en présence de l’ambassadeur de Grande-Bretagne Mme Frances Guy, puis à Saïda, à la Chambre de commerce, d’industrie et d’agriculture. Il constitue un témoignage sur l’évolution des excavations au terme desquelles la collaboration entre des spécialistes de différentes disciplines, notamment Neil McGregor (directeur du British Museum), John Curtis (conservateur du British Museum), Irving Finkel (British Museum) et Alan Ogden de l’université Bradford, a permis un éclairage sur le mode de vie social et économique de la cité antique. «Les découvertes scientifiques exceptionnelles qui ont révélé le riche passé de la ville de Saïda entre le 3e millénaire et le 1er millénaire avant J-C n’étaient connues que du monde scientifique spécialisé. Il était par conséquent nécessaire d’en diffuser les résultats afin de sensibiliser un public plus large par le biais de l’audiovisuel. Ce film documentaire permet au public de se familiariser avec le travail archéologique sur le terrain, de suivre les différentes étapes d’une campagne de fouilles, de partager l’émotion des découvertes mises au jour par l’équipe. Il aide aussi à comprendre l’importance des recherches sur les objets exhumés, les analyses minutieuses qui y sont effectuées, afin de pouvoir délimiter les séquences historiques de Saïda et son passé glorieux », explique Claude Doumet Serhal. Sous l’œil de la caméra, le sous-sol s’ouvre sur le IIIe millénaire et vous renvoie brusquement 5 000 ans en arrière. Entre 3200 et 2000, sur le substrat rocheux se sont déposés six niveaux du bronze ancien parsemés de vestiges, notamment des maisons présentant un plan à forme circulaire et un ensemble architectural dit « bâtiment public », construit en brique crue et composé d’installations domestiques, d’un moulin, d’un four à pain et de plusieurs structures de forme triangulaire ayant servi au stockage. Plus de 160 kilogrammes de graines carbonisées ont été dégagés du sein de ces structures qui furent à l’époque détruites par un incendie. Selon les spécialistes, la denrée était importée d’Égypte et conservée dans des grandes jarres en terre cuite fabriquées à Sidon. La réserve de poteries et d’impressions de cylindres (sceaux) représentant des dessins ithyphalliques (signe de fertilité) ou du « maître des animaux » (un homme ayant le visage d’un animal), confirme l’existence d’une production de masse véhiculée par les commerçants phéniciens dans toutes les régions du pourtour méditerranéen. L’étude faite sur les articles manufacturés a permis de savoir d’avantage sur les techniques utilisées et sur les deux ateliers de poterie qui fonctionnaient à Sidon. L’un était caractéristique de la cité et l’autre présentait des similitudes avec celui de Byblos. Le sous-sol a aussi livré une quantité d’os appartenant à des espèces animales, notamment des hippopotames, des ours, des taureaux, des gazelles et des lions, ce qui donne à penser que Sidon était couverte d’une étendue de forêts et traversée d’importants fleuves. Les découpes relevées sur les os démontrent par ailleurs que les hommes se nourrissaient de la viande de ces mammifères, qui étaient tous des mâles, constatent les spécialistes. « Ce qui laisse supposer une connotation religieuse. » Notant également l’absence des boîtes osseuses, les archéologues présument que les os du crâne et ceux de la face de l’animal étaient utilisés pour la fabrication des bijoux. Le « Silver Man » ressort de terre À l’âge du bronze moyen (2000-1550) le sol d’occupation change de fonction et devient une nécropole. Des jarres funéraires renfermant des squelettes d’enfants et plus de 50 tombes en pierre ou en brique, pareilles à celles qu’on trouve tout au long de la côte, de la Syrie à la Palestine, sont mises au jour. Les tombes renfermaient surtout les squelettes des guerriers enterrés avec leurs armes : pointe de flèche en bronze, hache en bronze avec manche en bois, posée sous la tête du mort. L’un d’eux, surnommé « Silver Man » a la tête cernée d’un bandeau en argent, la cheville entourée d’un bracelet en argent et les bras enserrés, l’un par un bracelet en argent et l’autre d’un bracelet en perles or et cornaline. Un autre guerrier avait six broches en argent épinglées sur le corps. Tous les matériaux, bronze, argent, bois, sont parfaitement conservés grâce à la couche de sable marin qui couvrait les tombes. Les spécialistes ont établi que l’argent provenait des chaînes montagneuses du Taurus, en Asie Mineure (Turquie). D’autre part, Alan Ogden explique que c’est la forme de l’os frontal qui permet de déterminer le sexe du squelette. Tendre et pointu chez la femme, il est nettement rond et rugueux chez l’homme. La taille et le poids de l’individu sont évalués à partir de la longueur et la courbure des ossements. L’âge d’un enfant est relativement facile à déterminer grâce à l’étude des lignes de suture entre les os. Par exemple, les lignes séparant les différents os du crâne, parental, frontal, temporal et occipital, se réduisent au fil de la croissance pour disparaître à l’âge adulte. Le spécialiste a pu aussi repérer des pathologies traumatiques (blessures et fractures) ou dégénératives (inflammation des articulations ou tassement des os du cou dû au port d’objets lourds). Toujours à l’âge du bronze moyen « un palais similaire à celui de Ras Shamra, en Syrie », une tête de canard en or, des lampes à huile et des poteries ont été exhumées. Les archéologues soulignent que l’art de la céramique s’est développé pour devenir « plus sophistiqué ». Les Sidoniens adoptent les diverses tendances artistiques de l’époque en les mettant au goût des commanditaires. Certains objets, décoratifs ou utilitaires, portant des inscriptions héliographiques et le sceau de Sadek-Sadouk étaient destinés à l’exportation vers l’Égypte. Une coupe crétoise datant de 1800-1950 avant J-C, considérée comme « la plus ancienne enregistrée au Levant » atteste du commerce entrepris avec les cités de la mer Égée. Les fouilles ont, par ailleurs, fourni un document écrit, sous la forme d’une tablette cunéiforme (1550-1500). Outre la rareté de ce type de documents qui en fait toujours une trouvaille exceptionnelle, le contenu, portant sur la vente de bois, présente, selon Irving Finkel, un intérêt particulier sur le mode d’organisation des négociants. Le niveau du IIe millénaire a apporté aussi son lot de découvertes : on voit sortir de terre les vestiges d’un édifice cultuel à plan carré, similaire à celui d’Alalakh, en Syrie, et dont le sol dallé est parsemé de bois carbonisé. Les analyses faites dans les laboratoires de l’Université de Londres ont démontré que ce sont les résidus des poutres qui se sont écrasés sur le sol après un incendie. Le bois était celui de l’Arbutus (dont le tronc rouge est décoratif) et datait de 1120-1390. Le film donne également un petit aperçu sur l’âge du fer (1150-500) et les découvertes faites au fil du temps dans la ville et sa banlieue. Les travaux de fouilles qui vont se poursuivre pourraient encore révéler de nouveaux éléments sur l’histoire de cette vieille cité qualifiée de « premier né de Canaan » et dont le nom se confondait avec celui de « Phénicien » dans la tradition homérique et biblique. Pour tout renseignement concernant le film documentaire, appelez le 01 215145.
C’est le premier film archéologique réalisé au Liban. Il retrace dix années de fouilles menées par l’équipe du British Museum, en collaboration avec la Direction générale des antiquités, sur le site de l’ancienne école américaine de Saïda. Conçu par Claude Doumet Serhal, qui dirige les excavations depuis 1998, il permet au grand public de découvrir l’histoire de cette cité...