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EN LIBRAIRIE - « Ritta parmi les bombes » aux éditions Saqi Les cocktails explosifs de Baddoura

Après « Martine à la plage » et « Candy au pensionnat », voici « Ritta parmi les bombes ». C’est exactement par cette formule que la poétesse Ritta Baddoura a inauguré son blog un certain 19 juillet 2006. « Une piste électronique que j’empruntais pour la première fois, comme un abri mouvant et qui ouvrait sur le monde. » Aujourd’hui, presqu’un an et demi plus tard, elle publie une collection d’articles et de poèmes dans un ouvrage éponyme aux éditions Saqi, et elle continue à alimenter ce blog à visée cathartique. Elle y défriche des terrains tabous et interdits. Là où les autres préfèrent se taire ou, pire, se complaire dans un déni total, elle dénonce. En choquant. Un cocktail… explosif. «Elle compose de vrais bijoux de poésie urbaine », « La dentellière des mots »… La critique, à son égard, est élogieuse. Cette championne (médaille d’or en littérature aux Jeux de la francophonie 2006) fait évidemment de la poésie. Mais pas n’importe laquelle.Une poésie moderne et libre, sans rime ni ponctuations. Les mots planent, les sens s’envolent. Ses écrits, parfois, prennent un peu la forme d’un haïku japonais, ce court poème ironique et limpide. Frais, concis, concret. Long comme une blague Carambar. Entre épure et sensibilité exacerbée. Celle qui trouve dans la lecture, l’écriture et l’art « une voie transgressant la captivité de l’abri et de la mort » a, durant la guerre de juillet 2006, créé ce fameux blog sur lequel elle a déposé des poèmes mais aussi des textes, billets d’humeur et de défoulement (rittabaddouraparmilesbombes.chezblog.com). « Un acte de survie et de résistance », qu’elle dit. Une partie de ces écrits est regroupée dans cet ouvrage, qui est aussi un condensé « de sens du non-sens », c’est-à-dire d’humour. Où l’écrit joue sur l’ambiguïté et où les mots pleuvent comme les…bombes. Et les sens infinis aussi. Ultime caractère, cet ouvrage est insolite, il enregistre un étonnement, un éclat... d’obus. Elle raconte qu’enfant, elle a découvert « sous les bombes exactement, la vieille bibliothèque léguée pas un grand-oncle. J’ai, dès lors, suivi une voie intérieure insoupçonnée, transgressant la captivité de l’abri. J’écris et je dessine dans un petit cahier comme on joue aux cartes, mais aussi comme on cultive une arme contre l’absurdité. » Depuis, elle n’a cessé de « poursuivre » ses questionnements concernant « le vécu en temps de guerre, la mémoire du corps, l’identité, le féminin, la folio, la créativité… ». « Mes études de piano, les ateliers de peinture et d’expression corporelle que j’ai suivis ainsi que ma formation en psychologie s’inscrivent dans mon cheminement », dit-elle. Et elle noircit des feuilles. Elle écrit. À son actif : quatre recueils de poésie francophone : Étoiles d’araignée (Mokhtarat, 2000), La naissance du dé (Dar an-Nahar, 2003), De l’obscure étincelle, nouvelle poésie d’expression française (L’Harmattan, 2005), Pépites de nuit (photos : Randa Mirza, éditions la Cd-thèque, 2006). « Je prends plaisir à travailler avec des poètes et comédiens afin d’amener la poésie sur scène » (Festival de Freiké 2004, Le printemps des poètes, Beyrouth 2005, le XXI Salon du livre de Paris, 2006, Salon du livre arabe de Beyrouth 2007). En 2001, le prix de poésie « Jeune cèdre » puis, en 2005, la médaille d’or en littérature pour ma nouvelle Quinze (cinquièmes Jeux de la francophonie) ont été pour elle « d’émouvantes reconnaissances ». Elle cherche actuellement à publier un ouvrage. Joignant photographies (Randa Mirza) et textes poétiques portant sur son voyage et son séjour aux portes du Sahara nigérien. Voilà pour la bio. Pour ce qui est de son « Artist Statement », elle affirme qu’écrire « est un mode d’existence, d’inscription, de résistance. Tout en étant un radeau du passage, écrire permet de durer. C’est aussi se souvenir : en quelque sorte, poser des repères entre les objets de la mémoire et les glissements du désir. Quelquefois donc se souvenir c’est trouver ce qui n’est pas dans le passé. C’est marcher suffisamment dans les sentiers battus du langage que les hommes ont suivis, croyant se parler et se comprendre (et saisir les lettres à bras-le-corps, réviser, saccager les grammaires de loi ou de coutume), jusqu’à déboucher sur la clairière du sens. Ou pas. » Elle ne cache pas le fait de privilégier le sensoriel à la signification. « Je cherche à suggérer une atmosphère où il serait possible de donner à sentir. Il faut que les mots osent des rencontres inouïes, afin de réintroduire dans le dire tout ce que les individus taisent, écartent ou ignorent. » Pour elle, les mots sont avant tout « des signes graphiques ». Explications : « Bien qu’immobiles sur la page, ils déroulent sous le regard, un mouvement. Le long des phrases, je trace des pas, je construis de singulières architectures. J’écris avec le vide de la page. Chaque blanc, chaque rupture entre deux mots est relation. » Pour définir un genre artistique qu’ils ne comprennent pas de prime abord, les journalistes possèdent un adjectif idéal, parfaitement bien trouvé pour désigner un truc hors normes, inclassable, indéfinissable et ô combien à la mode. Il s’agit, on l’aura deviné, du mot-invention « décalé ». Alors voilà : si l’écriture de Baddoura est délicieusement bien imagée, sa poésie, elle, est… décalée. Maya GHANDOUR HERT
Après « Martine à la plage » et « Candy au pensionnat », voici « Ritta parmi les bombes ». C’est exactement par cette formule que la poétesse Ritta Baddoura a inauguré son blog un certain 19 juillet 2006. « Une piste électronique que j’empruntais pour la première fois, comme un abri mouvant et qui ouvrait sur le monde. » Aujourd’hui, presqu’un an et demi...