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Actualités - CHRONOLOGIE

THÉÂTRE - « Carlotta » de Gilles Souleyman Laubert incarnée par Dominique Favre-Bulle Soliloque avec un chien

Altière, elle lit son rôle avec une grande dignité. De taille moyenne, brune de peau, une petite coupe de cheveux poivre et sel, lunettes en écaille et droite comme un « i », elle monte les quelques marches qui mènent à la scène. Dominique Favre-Bulle a quitté, le temps d’un soir, les planches du théâtre Monnot, où elle incarne la « femme mûre » dans la pièce « L’Une et l’Autre en Octobre » de Thérèse Basbous, mise en scène par Georges Hachem, pour se glisser dans la peau de « Carlotta », ex-artiste moscovite, personnage imaginé par Gilles Souleymane Laubert. Une soirée, à la crypte de l’USJ, placée sous le patronage de l’ambassade de Suisse avec le concours du théâtre Monnot et le soutien de Pro Helvetia. C’est donc à Moscou que la scène se déroule. Carlotta, ex-artiste du Peuple, a connu son heure de gloire. Elle avait une habilleuse qui l’aidait à son entrée puis à sa sortie de scène. La chute du mur l’a reconvertie en artiste de variétés ; elle doit quelquefois revêtir le frac de Carlotto, ce qui ne suffira pas à freiner sa déchéance. Sur fond de Glasnost et de Perestroïka, elle nous raconte son destin, un destin de femme en prise avec l’histoire de sa vie et de son temps : elle nous parle avec une intensité implacable, mais aussi avec une tendresse bouleversante : elle dit ses rêves, ses combats, ses désillusions, ses bonheurs… Ce petit bout de femme marginalisée et rejetée par la société s’acharne pourtant à vivre avec l’énergie et la beauté du désespoir. Un chant d’amour et de solitude adressé à une chienne avec les mots très personnels de Gilles Laubert. En voici un extrait, écrit par l’auteur sans ponctuations pour donner à l’artiste la liberté de jouer avec les modulations et la voix pour obtenir les effets dramatiques voulus. « Oui ma petite Lioubov mon tout à moi je le sais que tu voudrais venir avec moi mais tu ne peux pas ce directeur oh je ne l’aime pas celui-là avec ses grands airs ses façons évaporées mine de rien toujours à vous surveiller ce directeur il n’est pas comme l’ancien nous respectait celui–là le nouveau il ne veut pas que tu paraisses en scène tu le sais ma Liouba à moi il faudra te tenir bien sage je ne serai pas longue trois tours tours Carlotta Carlotto et je te passe passe petits drapeaux rouge autant de tours qu’ils en voudront j’en aurai vite fini une chance encore que je puisse donner dans la prestidigitation si je n’avais eu que le théâtre je me demande bien où nous serions maintenant hein ma Lioubov mais bon prestidigitation où théâtre de répertoire la scène c’est la scène dans deux minutes je suis revenue ma Lioubov tu n’aboieras pas dis ? » La pièce Carlotta est tirée d’une trilogie formée de soliloques, mettant en jeu trois personnages de femmes, et réunie sous le titre « Elles parlent aux animaux ». Les héroïnes de ces histoires – une ancienne star de théâtre (notre Carlotta), une ouvrière d’usine, une costumière d’opéra – ont en commun de s’adresser à un partenaire du monde animal : successivement une petite chienne, un poisson rouge et un oiseau des îles. Deux des textes sont en relation étroite avec l’univers du théâtre, le troisième s’ouvrant sur le monde du travail. Des histoires à la fois banales et exemplaires. Maya GHANDOUR HERT
Altière, elle lit son rôle avec une grande dignité. De taille moyenne, brune de peau, une petite coupe de cheveux poivre et sel, lunettes en écaille et droite comme un « i », elle monte les quelques marches qui mènent à la scène. Dominique Favre-Bulle a quitté, le temps d’un soir, les planches du théâtre Monnot, où elle incarne la « femme mûre » dans la pièce « L’Une et...