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VIOLON D’INGRES Ramzi Ashoush, la chanson au service des enfants souffrant de maladies cardiaques Dans la peau de Jacques Brel

« Être une heure, une heure seulement... » Il a été beau, beau et bon à la fois. Plus d’une heure, plus d’une fois et depuis plus de 20 ans, Ramzi Ashoush a été l’interprète idéal d’un Jacques Brel ressuscité sur les planches libanaises. Faisant volontairement taire la musique pour une longue période pendant laquelle il devenait chirurgien cardiologue, le chanteur a retrouvé les classiques du géant dans le cadre de concerts organisés au profit de l’association Heart Beat. Le cœur a ses raisons que la raison, bien heureusement, ignore. Tout de noir vêtu, les yeux grands ouverts, l’air possédé, absent, les bras tendus, les mains crispées, Ramzi Ashoush sur scène « pisse », comme l’autre « pleure », sur des femmes infidèles. Puis il ferme les yeux, suppliant qu’elles ne le quittent pas. Ce soir de mai 2005, il est entré dans la peau de Brel, comme à chaque fois, comme si c’était la première fois. À 20 ans, à 40, c’est la même fougue qui naît, s’affole, s’emporte et l’emporte jusqu’à ce qu’il s’oublie corps et âme. Jusqu’à ce qu’il s’abandonne, épuisé, sur les quais du port d’Amsterdam. Puis il retrouve le sourire, les bras chargés de bonbons, que Madeleine recevra, ravie. Un souvenir de Jacques... Jacques l’exemple, le modèle artistique et humain. Celui avec qui Ramzi partage la même philosophie de la vie, de l’amitié, de l’amour et de la mort. Celui qu’il découvrira, en faisant de la musique avec une bande de copains. Les copains d’abord, qui auraient tous voulu être artistes. Assaad aux claviers, Momo et Ramzi à la guitare, Claude à la clarinette, Walid à la batterie, Serge à la contrebasse. Le chanteur quitte le hard rock, touché en plein cœur par l’ouragan Brel et un film qui dit tout : Une vie à mille temps. Les choses, musique, chansons et textes, ne seront plus jamais les mêmes. La valse se conjugue à présent à tous les temps de la passion. Ramzi devient Brel. Lors d’inoubliables concerts, à la fin des années 80, qui auront fait battre le cœur de la Cité et chavirer le port de Byblos. Moments et répertoire partagés avec l’ami et regretté Émile Achkar, avec Julia Aoun Sadaka et sa voix profonde et juste. Le Liban découvre le répertoire de Brel en même temps qu’il découvre, impressionné, ce groupe de musiciens en herbe. « J’étais totalement dedans, confiera Ramzi. Et, comme le disait Brel, c’était un peu comme si le tout était en noir et blanc avec quelques mots en couleurs qu’il fallait savoir mettre en relief. » Totalement dans la peau de l’ivrogne, comme celle de l’immense Brel. De la musique légère Le temps a passé sur les débuts du chanteur. Ramzi, après une spécialisation en France, est devenu Dr Ashoush. L’étudiant en médecine, un chirurgien cardiaque connu de l’Hôtel Dieu de France. Jacques est mort depuis plus de quarante ans. Les copains, anciens et nouveaux, qui ont pris les chemins de la vie, se retrouvent par moments pour caresser les mots et ne pas oublier cette douce candeur qui embellissait la vie. Histoire de ne pas perdre la main. Ni l’âme. « Je ne voulais plus chanter en public », aime-t-il à rappeler. Sans doute pour plonger pleinement dans cet autre univers où le corps saigne pour de vrai, où l’émotion n’est pas de mise. Où le geste se veut précis, froid, professionnel. Mais l’émotion le rattrapera. « J’ai pensé qu’il fallait exploiter tous ces talents, ce capital formidable, pour de bonnes causes. » L’idée, encore floue, de créer une association qui viendrait en aide aux enfants souffrant de maladies cardiaques se précise, avec l’aide de Abboud Homsi et du Dr Victor Gebara. Après une série de mini-concerts à Deir el-Qamar et Faqra et le succès qui va suivre, le rendez-vous au BIEL, en mai 2005, Ashoush, entouré d’une multitude de jeunes talents, sera applaudi par des milliers de personnes. Celui d’août 2007, prévu en plein air, sera annulé pour cause de bombardements à Nahr el-Bared et remplacé par un concert quasi improvisé à Faqra. « Les billets ont été vendus au marché noir ! » Les bénéfices de ces événements et la générosité des nombreux sponsors, en particulier celle du prince Walid ben Talal, ont permis de prendre en charge 76 enfants en 2006, 101 en 2007, contre... trois en 2005. « L’artiste, c’est celui qui a mal aux autres », disait Brel. Il avait tout compris. Carla HENOUD
« Être une heure, une heure seulement... » Il a été beau, beau et bon à la fois. Plus d’une heure, plus d’une fois et depuis plus de 20 ans, Ramzi Ashoush a été l’interprète idéal d’un Jacques Brel ressuscité sur les planches libanaises. Faisant volontairement taire la musique pour une longue période pendant laquelle il devenait chirurgien cardiologue, le chanteur a...