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L’initiative est destinée à apaiser la tension des voyageurs Lecture recommandée aux Palestiniens bloqués aux barrages israéliens

Avant de prendre la route de Ramallah, un chauffeur de taxi remet aux voyageurs, intéressés ou non, des livres en prévision des longues attentes aux barrages militaires israéliens. «Prenez donc un livre pour patienter aux barrages. Vous savez combien ça peut durer », déclare Awad Kafishe avant que son taxi jaune n’emprunte une route secondaire qui zigzague à travers les collines arides et rocailleuses du sud de la Cisjordanie. Cet axe, qui contourne Jérusalem, est jalonné de barrages militaires alors que la route nationale principale est surtout réservée aux Israéliens et aux colons. L’initiative de la lecture provient de la « Bibliothèque ambulante pour la non-violence et la paix », un organisme palestinien qui entend lutter contre l’occupation israélienne par des moyens pacifiques, en encourageant l’éducation. À Bab el-Zawe, la station centrale de taxis de Hébron, Awad, le chauffeur, a distribué les ouvrages. Sages lectures : rien de subversif, rien de provocateur, même pas de romans policiers. Dans le lot, on trouve ce jour-là un célèbre recueil de fables arabes, Kalila wa Dimna, un livre pacifiste, Islam et paix, ou encore un manuel de médecine populaire sur les bienfaits thérapeutiques du miel. En coordination avec l’Union des chauffeurs de taxi de la Cisjordanie, la Librairie ambulante a lancé une campagne culturelle sur le thème « Lire au barrage » destinée à apaiser la tension des voyageurs parfois bloqués de longues heures par des soldats israéliens. Mais les sept passagers du taxi collectif ne sont pas enthousiasmés par cette initiative. Un monsieur d’âge mûr préfère son journal. Une quinquagénaire est absorbée dans une conversation téléphonique. Un troisième voyageur somnole. Un des passagers, Hassan Jaber, un septuagénaire à la retraite qui confie être un passionné de lecture, lit avec soin Islam et paix bien qu’il trouve l’ouvrage « superficiel » et ayant un « but de propagande ». « Nous avons distribué des valises entières de livres faciles à lire, qu’on peut abandonner sans connaître le mot de la fin », déclare à l’AFP le directeur de la Bibliothèque ambulante, Nafez Asseileh. « La lecture au barrage est l’expression d’une résistance passive à l’occupation, soutient-il. Cette opération permet aux gens d’évacuer le stress en lisant. Et de s’armer de patience. » L’organisme des droits de l’homme B’tselem a accusé en septembre les autorités israéliennes en Cisjordanie occupée de se servir des barrages routiers comme d’une « punition collective » à l’encontre des Palestiniens. Selon B’tselem, l’armée israélienne a mis en place 43 barrages fixes et 455 autres obstructions de routes en Cisjordanie où 312 kilomètres de route sont partiellement ou totalement interdits aux Palestiniens. Mais tous les Palestiniens n’adhèrent pas à cette promotion de la lecture. « Il s’agit d’une opération politique. La plupart des passagers sont des ouvriers. Les organisateurs de cette opération devraient plutôt dénoncer le sort de ces hommes qui vivent sous l’occupation avec des salaires de misère », peste un chauffeur qui refuse de prendre avec lui les livres. D’autres apprécient. « Qu’avons-nous à perdre ? réplique un de ses collègues, Zyad Qawasmeh. Même s’ils ne lisent que 1 % de ce qui leur est remis, ça sera autant de gagné, dans une société où presque personne ne lit. »
Avant de prendre la route de Ramallah, un chauffeur de taxi remet aux voyageurs, intéressés ou non, des livres en prévision des longues attentes aux barrages militaires israéliens.
«Prenez donc un livre pour patienter aux barrages. Vous savez combien ça peut durer », déclare Awad Kafishe avant que son taxi jaune n’emprunte une route secondaire qui zigzague à travers les collines...