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FESTIVAL AL-BUSTAN - L’Orchestre symphonique national libanais dirigé par Edmon Colomer, avec le guitariste Gallardo Del Rey et la soprano Maria Lluisa Muntada Fragrances et paysages ibériques

Un exubérant bouquet de notes fleurant bon l’Espagne profonde. Charmant tour d’horizon musical au pays de Cervantès, où lyrisme et passion ont la part belle, avec une bonne tranche de gaieté gentiment populaire. Placé sous la direction de maestro Edmon Colomer, l’Orchestre symphonique national libanais avec le concours de deux solistes, José Maria Gallardo Del Rey pour la guitare et Maria Lluisa Muntada pour un chant de voix de soprane, ont présenté, à l’auditorium Émile Boustany, dans le cadre du Festival al-Bustan, une soirée aux fragrances et aux paysages exclusivement ibériques. Au menu, attestant par conséquent une atmosphère profondément espagnole, un choix de partitions groupant des compositeurs connus du public et d’autres bien moins familiers qui ont inégalement comblé l’attente de l’auditoire… Ouverture avec de larges extraits de L’amour sorcier de Manuel de Falla où les violons de l’orchestre, au départ, semblaient hésitants. Mais la barre se redressera par la suite. Narration incantatoire, véhémente, habitée par le magnétisme, incontrôlable et dévorant, des intermittences du cœur. Surtout avec les superbes et flamboyantes pages de la Danse rituelle du feu, à très juste titre célèbres par leur grande puissance de suggestion d’une ambiance magique. Magie d’une incantation rythmée sur une quarte descendante caractéristique du «cante flamenco» et destinée à chasser l’envoûtement d’un milieu gitan porté aux aléas des sorts jetés par des nuits aux lunes perfidement argentées… Succède, dans le même sillage de lyrisme impétueux mais teinté d’une certaine mélancolie, le splendide Concerto d’Aranjuez de Joaquin Rodrigo, dédié ce soir-là au souvenir de Nadia et Gebran Tuéni. Pour donner la réplique à l’orchestre, José Maria Gallardo Del Rey à la guitare, au meilleur de sa forme. Trois mouvements (allegro con spirito, adagio, allegro gentile) pour traduire les jardins lumineux d’un compositeur frappé très jeune par la cécité. On retient surtout la beauté déchirante d’un adagio d’une tristesse aux teintes des grands départs et des séparations dont on ne se console jamais… En bis, une brève mais sémillante et vive Danza del Molina de Falla interprétée en solo, avec brio et clarté par un guitariste au-dessus de tout éloge. Petit entracte et reprise avec La prière du toréador de Joaquin Turina, œuvre pour cordes en hommage à l’univers tissé de risques et de courage de la tauromachie. Prière un peu molle à la mélodie vaguement sinueuse. On attendait un peu plus de cette supplique avant la mort, les vivats, le sang, la peur et les clameurs des arènes. Dans un registre un peu différent, mais teinté toujours de lamento, voilà sept chants de désolation et de douleur, d’une «Maja dolorasa», interprétés un peu froidement par la soprano Maria Lluisa Muntada. Chants écrits initialement pour piano et voix humaine par Enrique Granados (orchestrés ici par Rafael Ferrer) devant des toiles de Goya. Monde coloré mais faiblement traduit par une cantatrice à la voix peu ductile et sans grande présence scénique. Plus vivant et d’une belle tonalité cuivrée est le Prélude de Ruperto Chapi. Majestueux accents de la grande caisse qui se marie parfaitement à un thème prestement enlevé avec des moments euphorisants dans le style très viva Espana… Dans le même élan enthousiaste et tourbillonnant s’inscrivent les trois opus de Frederico Chueca jetant sur l’auditoire tout l’éclat des fêtes populaires, dans un esprit de viennoiseries espagnoles, entre valse et pasa-doble. Rythmes, vivacité, froufrous des robes, claquement des éventails, cambrure des reins, martèlement des talons, regards de braise pour des «conchitas» aux visages de madones, moustaches frémissantes d’irréductibles hidalgos, c’est tout cela cette musique aux flonflons heureux et tout en panache comme dans une fête foraine madrilène… Pour terminer, castagnettes, «por favor». Comment clôturer un concert placé sous l’ombrelle du pays d’Aragon sans s’enivrer de ces sonorités qui invitent comme à une «shangria» corsée ou aux rêves andalous les plus débridés? Castagnettes donc pour terminer en beauté et trémolos festifs le bal des notes, avec La Boda de Luis Alonso de Geronimo Gimenez. Plane alors sur l’auditoire, tout en ondes sensuelles et suggestives, l’ombre d’un danseur qui inspira à Gimenez une musique tout en volutes volubiles et volatiles. Une musique tout en mouvements et scintillements comme un confetti qui se répand indolemment, insolemment dans l’air… Tourbillon de notes qui vont crescendo en un apothéose d’accords qui donnent la délicieuse impression d’une charge de cavalerie légère en parade. Un tonnerre d’applaudissements. Longue, très longue ovation. Maestro Colomer et l’Orchestre symphonique national libanais, exténués mais ravis, saluent le public et, inutile d’insister, pas de bis. Edgar DAVIDIAN
Un exubérant bouquet de notes fleurant bon l’Espagne profonde. Charmant tour d’horizon musical au pays de Cervantès, où lyrisme et passion ont la part belle, avec une bonne tranche de gaieté gentiment populaire.

Placé sous la direction de maestro Edmon Colomer, l’Orchestre symphonique national libanais avec le concours de deux solistes, José Maria Gallardo Del Rey pour la guitare...