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SPECTACLE - Folklore et prouesses corporelles au Casino du Liban Le feu des danses de Géorgie

Il y a du feu et des flammes dans l’air. Brillance et mouvements accélérés. Tornade et douceur. Orages et accalmies. Sang et sueur. Passion et guerre. Vents furieux et flocons de neige. Mélancolie et vivacité. Trémolos des grands sentiments et sagesse des regards qui savent attendre. Élans incoercibles et fièvres effervescentes. Un mélange détonant où l’eau gaze dans le feu, où l’huile attise les sarments, où le brasier reste rougeoyant... Un spectacle absolument incandescent au théâtre du Casino du Liban, à Maameltein, où le Ballet national de Géorgie a investi l’aire scénique de la paisible côte de Jounieh. Plus d’une trentaine de danseurs, richement vêtus des costumes folkloriques du pays abritant le « Chkhara », le troisième sommet du Caucase, avec un ensemble musical, un peu à l’ombre, sur une estrade en coin de la flaque de lumière, font vivre – par une danse alliant agilité, brio et panache – l’esprit, l’essence et les couleurs de la Géorgie profonde. Sur une scène totalement nue, animée par les seuls jeux de spots colorés et les émanations fumigènes, une suite étourdissante de tableaux chatoyants, avec bergers bondissants, paysans aux mouvements adroits et princesses aux regards rivés au sol, invite à un voyage fait de dynamisme et d’une gestuelle pleine de grâce. Grâce des danseuses avec leurs mains plus douces que les vols des colombes et leurs petits pas soyeux qui donnent l’impression qu’elles glissent sur des patins ou fendent l’eau comme des cygnes… Grâce aussi des guerriers qui se dressent en toute fierté, avec leurs bottes noires au cuir souple, droits comme des ifs, sur la pointe des pieds, avec des allures de coqs de combats sur leurs ergots… Images surprenantes et ondoyantes de ces équilibristes du corps à qui ils insufflent une singulière et tonique éloquence. Cousu de fil blanc, ce spectacle survitaminé est un ravissement pour les yeux avec des costumes soignés, agrémentés de couleurs audacieusement assorties, rehaussés de bijoux tintinnabulants pour les femmes et de dagues et d’épées étincelantes pour les hommes. Capuchons en polis de moutons, « chapska », « kolpak » ou toques en astrakan pour la gent masculine, d’une élégance sans conteste virile, tiares ou diadèmes sertis de pierreries scintillantes pour les jeunes filles aux tailles de guêpe entourées de draperies vaporeuses. Voilà des parures qui parlent en toute discrétion et fastueuses références vestimentaires des empreintes mongoles, ottomanes ou persanes de ce pays en bordure de la mer Noire aux hauts plateaux battus par le vent tout comme ceux des terres de saint Grégoire l’Illuminateur. Adresse, précision et vélocité dans les gestes vifs ou au ralenti de cette brochette de personnages anonymes mais typés, piqués au hasard de l’histoire, et qui expriment, par le biais du tourbillon de la vie au quotidien, toute l’exubérance, le sens de la vaillance, la grandeur et la sublime simplicité de l’âme géorgienne. Personnages jaillis dans un délicieux désordre de toutes les couches populaires, où chevriers et roitelets vivent les mêmes intermittences du cœur, les mêmes travaux de la terre, les mêmes batailles contre la nature et ses aléas. Conter fleurette, planter un couteau en roulant sur les genoux comme une bille prise de délire, faire des pirouettes telle une toupie folle, bomber le torse et bondir tel un tigre dans l’air, entreprendre une danse en croisant les épées et maniant le bouclier, mimer l’ivrogne avec une bouteille tranquillement posée sur le haut du crâne, parcourir la scène en un rideau de robes blanches froufroutantes, sans aucune bavure, comme un impeccable tracé d’architecte, jouer des tresses qui arrivent aux flancs avec une confondante espièglerie, tordre les chevilles comme si c’était du caoutchouc : voilà des prouesses corporelles saluées par un tonnerre d’applaudissements de la part du public, enthousiaste et comblé. Forte et marquée est la musique qui n’est pas sans rappeler la célèbre Danse des sabres d’Aram Khatchadourian, lui qui est né à Tiflis. Un joli bouquet de notes aux couleurs vives, pimpantes, sentant bon une terre ancestrale, respirant les vergers et la neige, pour des tableaux dansés percutants, prestement enlevés. Un excellent moment pour tout oublier et fuir au haut des sommets où l’air est pur, l’azur resplendissant, le bonheur simple… Edgar DAVIDIAN

Il y a du feu et des flammes dans l’air. Brillance et mouvements accélérés. Tornade et douceur. Orages et accalmies. Sang et sueur. Passion et guerre. Vents furieux et flocons de neige. Mélancolie et vivacité. Trémolos des grands sentiments et sagesse des regards qui savent attendre. Élans incoercibles et fièvres effervescentes. Un mélange détonant où l’eau gaze dans le feu, où...