Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

PHOTOS - Jusqu’au 3 mars, à l’Espace SD, deux photographes libanaises et sept Américains Moving Walls: «Pour voir au-delà de…»

À l’initiative de Open Society Institute et en collaboration avec la Fondation arabe pour l’image (établie à Beyrouth depuis 1997), l’Espace SD présente l’affichage itinérant «Moving Walls», qui se tient actuellement à Beyrouth et qui regroupe les travaux de sept photographes américains auxquels s’ajoutent, à chaque escale dans le pays visité, un à deux projets locaux sélectionnés préalablement. Une exposition qui vise à casser les murs afin d’instaurer, à travers un travail visuel, scénique et artistique, un vrai dialogue de cultures. «Moving Walls» est un travail documentaire portant sur des thèmes différents, sociaux ou de guerre, réalisé par des photographes professionnels (principalement américains) dans le but de traduire leurs visions personnelles du monde. Il ne s’agit pas de reportage au sens événementiel du terme, mais plutôt d’un approfondissement et de l’étude d’un projet cher à chacun de ces artistes. Ce travail, auquel ils ont consacré une grande partie de leur temps libre en dehors des horaires de leur travail professionnel (dans la presse ou autres médias), a été effectué souvent dans des endroits hostiles et des conditions difficiles. Il est le témoignage libre d’expériences personnelles, l’expression de leur engagement absolu envers les droits de l’homme. Leur action militante, qui s’exprime par un simple effet d’images, d’angles ou de jeux de lumière, parcourt le monde et s’enrichit de nouvelles expériences aussitôt le pied posé dans un pays. Ainsi, après Bahreïn, Dubaï, Amman et actuellement le Liban, cette exposition itinérante se dirigera vers d’autres régions du Moyen-Orient pour glaner des sujets nouveaux. Des expériences humaines et personnelles Randa Mirza et Rania Mattar sont les deux Libanaises qui accompagnent l’affichage collectif sur le sol libanais. Elles ont été choisies pour les deux projets respectifs qu’elles avaient présentés il y a quelques mois lors de l’appel d’offres et qui s’intitulent Abandonned Rooms et Forgotten People. Pour Abandonned Rooms, Mirza s’explique: «Il ne s’agit pas du tout d’un travail de documentariste ni d’archiviste, mais d’une élaboration essentiellement artistique. À travers cette exploration des lieux abandonnés (immeubles, maisons, appartements délaissés après la guerre), j’entreprends une véritable inspection interne.» «En effet, poursuit-elle, j’avais dix ans quand la guerre libanaise de 1975 s’est terminée. J’avais donc des trous noirs dans ma tête que j’essayais de combler. Aussitôt mes études terminées à Paris, je me hâtais de rentrer au pays sachant que ma tâche n’était pas achevée. Je commençais donc par visiter le village de Dhour el-Choueir. Ce qui m’a entraînée, par la suite, à élargir mon champs de repérage. Disséminés sur tout l’ensemble du pays, ces murs écorchés, ces papiers peints arrachés, ces trous béants et ces crevasses ou fissures ressemblaient aux larges blessures qui suintaient encore dans l’ossature libanaise. Dans mes photos, je m’applique à montrer le rapport entre passé et présent, absence et présence, ainsi qu’entre la vie et la mort. Même si je suis satisfaite du travail réalisé, qui avait obtenu auparavant le prix “No Limit” à Arles, je sens que je n’ai pas encore réglé mon problème avec la guerre du Liban. Il faut dire qu’à chaque fois les cartes se brouillent et tout s’assombrit à nouveau.» Pour sa part, Rania Mattar, établie à Boston depuis quelques années, n’a pas cessé ses allers-retours au Liban. Son projet l’amène à «s’infiltrer» dans les camps palestiniens, voire à cohabiter avec ces réfugiés. «Je voulais donner à l’Amérique une autre vision de cette population traitée de terroriste. Mes photos ont pour sujet les enfants et les femmes qui vivent dans des conditions innommables et qui sont les victimes inconsciemment d’accords machiavéliques, dit-elle. Les médias ne les mentionnent jamais. Ils ont sombré dans l’oubli.» En noir et blanc, pour ne pas distraire le regard, les clichés de Mattar invitent le regard à pénétrer dans l’intimité de ces personnes marginalisées. «Souvent, ajoute la photographe, la presse est intéressée par l’événement, la guerre par exemple, mais lorsque celui-ci prend fin, elle oublie les conséquences qu’a laissées cette guerre. C’est un peu pour ranimer l’attention collective que j’ai réalisé ce travail, qui a nécessité trois ans de repérage.» Briser les murs Gary Fabiano, l’artiste américain actuellement au Liban, a photographié, lui, les sans-abri de son pays. C’est un autre regard que porte ce photographe sur la population américaine, «un clin d’œil à la propriété et aux possessions, dit Fabiano. Chaque être humain aime posséder, s’approprier des choses. Ce que je dénonce dans mes photos, c’est le fait de devenir ce qu’on possède. Ces sans-abri ne représentent plus rien pour la société parce qu’ils ne possèdent rien. J’ai donc associé certains objets à leurs visages afin de montrer qu’ils ressemblent à tout le genre humain.» Un peigne, des comprimés de médicaments, un «dental floss» posés en forme de split-screen à côté de leurs visages surdimensionnés redonnent à ces personnes leur identité dans la société. «Il n’était pas facile d’aboutir à ce travail, car 95% de ces sans-abri refusaient d’être pris en photos», conclut Fabiano qui espère avoir fait un léger éclairage sur certaines couches marginalisées de la société américaine. Sur les cimaises de l’Espace SD sont également accrochés les travaux de Lori Grinker, qui évoque en photos les problèmes des vétérans de la guerre; d’Edward Grazda, qui a illustré les mosquées de New York; ainsi que ceux d’Eric Gottesman, d’Aleksandr Glyadyelov, de James Nubile et d’Andrew Lichtenstein et de son monde carcéral. Une exposition à ne pas rater et qui se déroule à l’Espace SD jusqu’au 3 mars. Colette KHALAF

À l’initiative de Open Society Institute et en collaboration avec la Fondation arabe pour l’image (établie à Beyrouth depuis 1997), l’Espace SD présente l’affichage itinérant «Moving Walls», qui se tient actuellement à Beyrouth et qui regroupe les travaux de sept photographes américains auxquels s’ajoutent, à chaque escale dans le pays visité, un à deux projets locaux...