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TOURISME - Si la saison des fêtes est avortée, les licenciements seront incontournables Les hôtels et les restaurants au bord de l’agonie

Après avoir raté la saison estivale qui s’annonçait la meilleure depuis 1975, le tourisme peine à reprendre son souffle. Le marasme ambiant dû à l’instabilité politique et sécuritaire menace désormais la saison des fêtes, « la bouffée d’oxygène » de l’année. Impuissants, les professionnels assistent ainsi à l’effondrement de leurs activités. L’appel au sauvetage qui a été lancé maintes fois à l’adresse du gouvernement ne semble pas avoir eu un quelconque écho. Face à cette passivité, les organismes économiques avaient décrété une grève la semaine dernière en guise d’avertissement. Mais si ce mouvement n’a été que partiellement suivi, c’est essentiellement pour des raisons de « timing », explique Paul Ariss, président du syndicat des restaurateurs. « Le moment choisi était mauvais, c’est la fin du mois et des salaires doivent être payés. Mais sur le fond, le message est clair: la situation est désastreuse », a-t-il affirmé. Les hôtels vides Première victime du vide touristique : les hôtels. Poursuivi par la malédiction, le secteur hôtelier a vu ses espoirs de récupération des pertes de juillet s’évanouir avec l’aggravation du climat politique. Ces craintes ont ensuite été confirmées par des annulations de réservations en série, depuis l’assassinat de Pierre Gemayel, autant pour les nuitées que pour les événements (mariages, congrès, etc.). Le taux d’occupation actuel dans les hôtels de la capitale se situe entre 20 et 30 %, un taux qui est loin d’être acceptable selon Nizar Alouf, directeur de l’hôtel Riviera. Le taux d’occupation enregistré n’est pas toujours de nature touristique. Au Bristol, par exemple, la quasi-totalité des clients sont des membres du Croissant-Rouge saoudien qui effectuent une opération ponctuelle de bénévolat, a indiqué Nazira el-Atrach, une responsable de l’hôtel. Les attentes du secteur étaient donc tournées vers les périodes des fêtes. « On s’attendait à une occupation complète pendant 15 à 20 jours, pour Noël, le Nouvel An et Adha », a expliqué le président du syndicat, Pierre Achkar, qui ne cache plus son pessimisme. Solennellement, il parle de « décès de la destination “Liban” pour le tourisme ». « Les réservations pour les fêtes se font à l’avance. Même si la situation s’améliore, il restera très peu de temps au secteur pour récupérer ses pertes », a-t-il ajouté. Pour les hôtels, cette nouvelle crise risque donc d’être le coup fatal. Mais ces conséquences ne se feront sentir qu’après les fêtes. « Les trois premiers mois de l’année sont traditionnellement une période morte, censée être compensée par celle des fêtes », a expliqué M. Alouf. « Si ce n’est pas le cas, le mois de janvier sera celui des décisions de licenciements et de fermetures », a renchéri M. Achkar. Car, outre les frais de fonctionnement difficilement récupérables, de nombreux hôtels avaient entrepris des investissements et des travaux de renouvellement en prévision d’une année touristique prometteuse. Parallèlement, l’ouverture de nouveaux hôtels semble de plus en plus incertaine. L’hôtel Hyatt, dans l’expectative, a ainsi ordonné l’arrêt des travaux de construction. D’autres trop engagés dans les travaux n’ont d’autre choix que de continuer. « Les hôtels Hilton et Four Seasons, qui étaient censés ouvrir bientôt, poursuivent les travaux de construction, mais évidemment pas à une vitesse de croisière. Finalement, rien ne garantit l’ouverture de ces hôtels à la finalisation de la construction », a commenté M. Alouf. 5 500 restaurants menacés Les restaurants semblent voués au même destin, même si certaines zones de la capitale enregistrent une activité relativement stable, comme à Gemmayzé. En revanche, le centre-ville, qui subit depuis plus d’un an les séquelles de l’instabilité politique, vit un calvaire ininterrompu. Paul Ariss explique qu’aucune exemption ou allègement de loyers n’a été effectué, sauf de légères baisses de certaines charges imposées par Solidere. Il a souligné qu’aucune fermeture n’a encore été enregistrée, mais, là aussi, le mois de janvier risque de sonner le glas. « Les appels lancés au gouvernement pour un soutien du secteur sont vains. Le dossier proposant les demandes d’allègements fiscaux et le report du paiement d’impôts demeure dans les tiroirs du gouvernement », s’est insurgé M. Ariss qui estime que le gouvernement n’a aucun sens des priorités. Les 5 500 restaurants et cafés recensés dans le pays, qui emploient environ 55 000 salariés dont plus de 80 % sont des jeunes, ont déjà lourdement payé le prix de la guerre de juillet. Avant cette nouvelle crise politique, le syndicat avait prévu une baisse du chiffre d’affaires du secteur de l’ordre de 50 % pour 2006 et une baisse de quelque 615 millions de dollars, sans parler du manque à gagner évalué à près de 74 millions de dollars. Aujourd’hui, si les mauvais présages se confirment pour les fêtes, ces chiffres seront malheureusement revus à la hausse. Le tourisme, secteur-clé de l’économie libanaise et source de revenu de centaines de milliers de citoyens, est incontestablement au bord de l’agonie. De crise politique en crise politique, la confiance des touristes sera difficile à rétablir. Jusque-là, les professionnels du secteur avaient appliqué une série de politiques de gestion des crises pour éviter la voie des licenciements. Mais dans un environnement de plus en plus défavorable, ils n’auront bientôt plus les moyens de ces politiques. Magali GHOSN

Après avoir raté la saison estivale qui s’annonçait la meilleure depuis 1975, le tourisme peine à reprendre son souffle.
Le marasme ambiant dû à l’instabilité politique et sécuritaire menace désormais la saison des fêtes, « la bouffée d’oxygène » de l’année.
Impuissants, les professionnels assistent ainsi à l’effondrement de leurs activités. L’appel au sauvetage...