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POLÉMIQUE Les nationalistes basques veulent le «Guernica» de Picasso

Les nationalistes basques profitent du processus de paix en Espagne pour ranimer leur revendication d’exposer chez eux le Guernica de Picasso, arrivé il y a tout juste 25 ans en Espagne et actuellement hébergé au musée Reina Sofia à Madrid. Pour beaucoup, Guernica est un symbole universel des horreurs de la guerre, inspiré du bombardement de la ville éponyme par l’aviation nazie alliée de Franco le 26 avril 1937, qui fit environ 1600 morts. Mais pour les Basques, Guernica a une signification supplémentaire, car la ville est considérée comme le berceau de leur identité. C’est là où, sous un chêne, les rois d’Espagne venaient jurer de respecter les «privilèges» basques. À ce jour, les chefs du gouvernement basque continuent d’y prêter le serment suivant: «Humble devant Dieu, debout sur la terre basque, en souvenir des ancêtres, sous l’arbre de Guernica, devant vous, représentants du peuple, je jure de remplir fidèlement ma charge.» La cession «temporaire ou définitive» du tableau permettra de «clore la transition démocratique et de commencer le processus de pacification et de normalisation» au Pays basque (Nord) – encouragé par le cessez-le-feu de l’organisation séparatiste ETA–, estime le parti Eusko Alkartasuna (EA), partenaire des nationalistes modérés du PNV au gouvernement régional. Assumant cette revendication, ce gouvernement a formellement demandé le 11 avril à l’Exécutif central espagnol un transfert «temporaire» de la toile, pour l’exposer au musée Guggenheim de Bilbao à l’occasion du 70e anniversaire de la destruction de Guernica. Mais le tableau du peintre espagnol, qui a passé presque toute sa vie en exil, est une toile fatiguée par les nombreux voyages entrepris depuis sa création sur commande des républicains espagnols pour l’Exposition universelle de Paris en 1937. Le Guernica a en effet sillonné le monde pour des expositions destinées à collecter des fonds en faveur des républicains, écrasés par les putschistes franquistes après la guerre civile (1936-1939). Pour la directrice du musée d’art moderne Reina Sofia, Ana Martinez de Aguilar, le verdict tient en un mot: «Jamais.» Guernica ne bougera pas de son refuge actuel, car «le tableau est dans un état de conservation très fragile, d’une fragilité totale», a-t-elle dit à l’AFP. Guernica, une toile de 3,5 m sur 7,7 m, a voyagé jusqu’à arriver au Museum of Modern Art (MOMA) de New York en 1957. Là, pour corriger fissures, déchirures, coins retournés... une couche de cire lui a été appliquée. Désormais, il est impossible de rouler la toile et même de la manipuler sans provoquer un «effet voile» qui causerait d’«irréparables dégâts», selon des experts consultés en 1997 par le Reina Sofia. Picasso souhaitait que le tableau ne bouge pas du MOMA, sauf pour revenir en Espagne, «quand les libertés publiques seraient rétablies». Le tableau arriva en Espagne en 1981, six ans après la mort de Franco, marquant le retour de la démocratie. Le 25e anniversaire de cet événement est célébré depuis lundi conjointement par les musées madrilènes du Prado et Reina Sofia. D’abord exposé au Cason del buen Retiro, il a été transféré en 1992 au Reina Sofia. Certains experts pensent que le tableau peut être une nouvelle fois transporté, sur son châssis, placé dans un coffre avec toutes les mesures de protection en termes d’humidité, de température et de vibrations. Rien n’y fait. La ministre espagnole de la Culture, Carmen Calvo, a refusé de commander un nouveau rapport technique, affirmant qu’elle ne souhaitait pas mêler Guernica à «la disparition du terrorisme. Je ne fais pas de politique avec des pièces du patrimoine» espagnol, a-t-elle ajouté. Les nationalistes basques ont revendiqué le Guernica dès son arrivée en Espagne. Le PNV, au pouvoir au Pays basque, résume ainsi sa frustration : « Nous avons les morts, et eux, le tableau. » Marina DE RUSSE (AFP)

Les nationalistes basques profitent du processus de paix en Espagne pour ranimer leur revendication d’exposer chez eux le Guernica de Picasso, arrivé il y a tout juste 25 ans en Espagne et actuellement hébergé au musée Reina Sofia à Madrid.
Pour beaucoup, Guernica est un symbole universel des horreurs de la guerre, inspiré du bombardement de la ville éponyme par...