CONCERT - Malik Mezzadri et son orchestre ont donné une soirée unique au Music Hall (Starco) Bienvenue sur la planète «Magic»

Une soirée unique. Mais quelle soirée ! Produit par Liban-Jazz et Eléftériadès, le spectacle, placé sous le signe de la diversité, de la multiplicité et de la nouveauté, porte le sceau du flûtiste et compositeur Malik Mezzadri accompagné de son orchestre. Plus de deux heures de rythmes inédits et colorés. Plus de deux heures de musique riche et généreuse. Une musique conviviale qui a invité le public à la suivre aux confins d’un monde vierge, encore inhabité. D’abord surpris, presque pétrifié, ce public succombe petit à petit au charme du flûtiste pour pénétrer dans son univers comme par envoûtement. Une flûte enchantée? On ne résiste pas à la tentation d’y faire allusion. Tel un charmeur de serpents, Magic Malik en extirpe des sons mouvants, ondulatoires, ouatés, qui transportent tantôt vers les déserts d’Afrique au sable chaud, tantôt dans les profondeurs de la forêt amazonienne. Un jazz qui avance Sa musique ne porte pas un nom et ne supporte aucune comparaison. D’ailleurs l’artiste préfère prêter des numéros à ses morceaux en les mettant sous le label XP (qui signifie expérimental): «Je n’annonce pas le nom des morceaux, d’ailleurs ça n’a pas une grande importance. C’est le silence qui les annonce, ainsi que vos applaudissements», lance-t-il en rigolant au public médusé. À certains moments, il murmure à l’oreille de sa flûte et se sert de ses cordes vocales comme instrument d’appui. La confusion s’établit. Ce ne sont plus que chuintements, qui s’amplifient progressivement, soutenus d’une façon magistrale par l’orchestre qui l’accompagne. Groove, jazz, reggae, autant de noms fictifs, d’images illusoires qui s’enchevêtrent, se mélangent pour enfin se diluer dans ce qu’on pourrait appeler une potion magique. Entre Denis Guivarch (saxophone), Sarah Murcia (contrebasse), Jozef Dumoulin (piano), Maxime Zampieri (percussions) et Magic Malik, la complicité est totale. Les instruments s’appellent et s’interpellent, pulvérisant les sonorités et les recomposant dans un nouveau langage, hermétique peut-être à prime abord, mais très vite apprivoisé. C’est ça aussi la recette de la potion Magic. Une amitié sur scène qui se traduit par une passion si grande qu’elle finit par devenir contagieuse et envahir la salle: «Je suis quelqu’un de fidèle, quand j’ai vécu, partagé musicalement quelque chose de très fort avec des musiciens, ça reste toujours, c’est de l’amitié. C’est quelque chose que je ressens par rapport aux gens qui m’ont apporté quelque chose, un peu dans cette vie où on a très soif quand même.» Ces propos reflètent la générosité de cet artiste rare, qui a profité de son passage au Liban pour faire d’autres rencontres musicales. Ainsi, en seconde partie du spectacle, il invitera Khaled Yassine, Ziad al-Ahmadi et Fahd Riachi à monter sur scène et partager avec lui un brin de parcours. Magic Malik, c’est aussi une histoire merveilleuse de communion entre les êtres. Colette KHALAF