Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Relire Freud

Je suis en train de lire le petit livre de Sigmund Freud, Totem et Tabou. Voici un passage qui mérite d’être lu à la lumière du problème que nous avons aujourd’hui au sommet de l’État. Freud y cite un texte de J.G. Frazer tiré de son livre Taboo. The Burden of Royalty (Tabou. Le fardeau de la royauté). Il s’agit de la manière dont des cultures dites primitives traitent le roi ou le chef suprême. Extraits : « L’idée d’après laquelle la royauté primitive serait une royauté despotique ne s’applique pas tout à fait aux monarchies dont nous parlons. Au contraire, dans ces monarchies, le maître ne vit que pour ses sujets ; sa vie n’a de valeur qu’aussi longtemps qu’il remplit les obligations de sa charge, qu’il règle le cours de la nature pour le bien de son peuple. À partir du moment où il néglige ses obligations ou cesse de s’en acquitter, l’attention, le dévouement, la vénération (quasi) religieuse dont il jouissait au plus haut degré se transforment en haine et mépris. Il est chassé honteusement et s’estime heureux lorsqu’il réussit à sauver sa vie. Aujourd’hui adoré comme un dieu, il peut être tué demain comme un criminel. Mais nous n’avons pas le droit de voir dans ce changement d’attitude du peuple une preuve d’inconsistance ou de contradiction ; bien au contraire, le peuple reste logique jusqu’au bout. Si le roi est leur dieu, pensent-ils, il doit aussi se montrer leur protecteur ; et du moment qu’il ne veut pas les protéger, il doit céder la place à un autre qui est plus disposé à le faire. Mais tant qu’il répond à ce qu’ils attendent de lui, leurs soins à son égard ne connaissent pas de limites et ils l’obligent à se soigner lui-même avec le même zèle. Un tel roi vit comme enfermé dans un système de cérémonies et d’étiquettes, entouré d’un réseau de coutumes et d’interdictions ayant pour but, non d’élever sa dignité et, encore moins, d’augmenter son bien-être, mais uniquement de l’empêcher de commettre des actes susceptibles de troubler l’harmonie de la nature et d’amener ainsi sa propre perte, celle de son peuple et du monde entier. Loin de servir à lui porter de l’agrément, ces prescriptions le privent de toute liberté et font de sa vie, qu’elles prétendent vouloir protéger, un fardeau et une torture. » Je termine en relevant une seule différence entre cette description et le cas de notre présidence. Chez nous, ce n’est pas le président qui a commis récemment une faute grave ou qui a refusé de remplir ses fonctions, c’est plutôt nous qui avons changé la façon dont nous le percevons. Joseph CODSI Université pour tous - USJ
Je suis en train de lire le petit livre de Sigmund Freud, Totem et Tabou. Voici un passage qui mérite d’être lu à la lumière du problème que nous avons aujourd’hui au sommet de l’État. Freud y cite un texte de J.G. Frazer tiré de son livre Taboo. The Burden of Royalty (Tabou. Le fardeau de la royauté). Il s’agit de la manière dont des cultures dites primitives traitent...