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Actualités - OPINION

PERSPECTIVES - L’heure de vérité a sonné pour traduire dans les faits la participation paritaire islamo-chrétienne au pouvoir Le choix du président et la loi électorale, deux paramètres qui reflètent le degré d’attachement au pacte de coexistence

Cela est sans doute dû au hasard du calendrier : les dossiers cruciaux de la présidence de la République et de la loi électorale ont été remis sur le tapis presque simultanément. Le hasard fait bien les choses car dans le cas spécifique du Liban, plus particulièrement dans le contexte présent, ces deux dossiers paraissent plus que jamais étroitement liés. L’esprit de l’accord de Taëf – et d’une manière générale le fondement du pacte national – est basé sur une participation paritaire et équilibrée des deux composantes chrétienne et musulmane du tissu social libanais aux différents échelons et niveaux des pouvoirs exécutif et législatif. À un moment où l’Alliance du 14 mars pose avec insistance le sort de l’actuel locataire de Baabda, la grande question que d’aucuns soulèvent en coulisses est de savoir si le successeur du président Émile Lahoud devrait être un « président fort », c’est-à-dire réellement représentatif de la sensibilité chrétienne (en d’autres termes, de la ligne de conduite définie par Bkerké et les grands courants qui se partagent la rue chrétienne). Ou devrait-il être, au contraire, un président « consensuel », agréé par toutes les fractions locales et à équidistance politiquement du 8 Mars et du 14 Mars ? La réponse à cette double interrogation dépend, à l’évidence, du rôle et de la fonction que l’on désire attribuer, dans la pratique et dans les faits, au président de la République. Devrait-il être principalement le représentant des chrétiens au sein du pouvoir, ou simplement et uniquement un arbitre qui doit rester au-dessus de la mêlée ? L’option retenue à cet égard dicte nécessairement le profil, et donc l’appartenance politique, du futur président. Dans le premier cas de figure, le choix du nouveau chef de l’État devrait se porter soit sur le général Michel Aoun (conformément à la logique qui a conduit Nabih Berry à la tête du Législatif et le Courant du futur à la présidence du Conseil), soit sur un représentant direct de Bkerké ou du noyau dur de la composante chrétienne de l’Alliance du 14 mars. Si, par contre, on optait pour le rôle d’arbitre qui demeure au-dessus de la mêlée, le choix du président pourrait se porter dans ce cas sur une personnalité qui ne soit pas politiquement trop engagée. Si ce dernier cas de figure était retenu, la participation chrétienne au pouvoir devrait alors se manifester impérativement dans la composition des deux appareils exécutif et législatif. Et c’est précisément à ce niveau que se pose tout le problème de la loi électorale. Pour respecter, en effet, le principe de la parité et de l’équilibre réel dans la représentation aux différents échelons du pouvoir, il est nécessaire de découper les circonscriptions électorales et d’opter pour un mode de scrutin qui permette de refléter le plus fidèlement possible les diverses composantes socio-communautaires du pays. À défaut d’un président « fort », représentatif de la sensibilité chrétienne, ce qu’il était convenu d’appeler durant les années de guerre « l’Est politique » devrait ainsi pouvoir être représenté au sein de l’Exécutif et du Législatif aussi efficacement que le sont actuellement le mouvement Amal, le Hezbollah, le Courant du futur et le Parti socialiste progressiste. Imposer une loi électorale qui rendrait l’élection d’une grande proportion de députés d’une communauté tributaire du choix des électeurs d’une autre communauté, sans aucune réciprocité sur ce plan, reviendrait à remettre en question, dans les faits, le principe même de la participation paritaire, effective, au gouvernement et au Parlement. À l’instar de ce qui se produisait à l’époque de l’occupation syrienne. Maintenant que le Liban s’est libéré, à la faveur de la révolution du Cèdre, de la tutelle étrangère, et à l’heure où les leaders véritablement représentatifs du pays sont, enfin, assis autour de la même table pour engager un dialogue franc et en profondeur sur les grands dossiers en suspens, les choix stratégiques devraient être, une fois pour toutes, clarifiés au sujet, d’une part, du rôle qui devrait être conféré au président de la République et, d’autre part, de la nature de la loi électorale. C’est l’esprit même du pacte national qui est aujourd’hui en jeu. Vouloir opter à la fois pour le principe d’un président consensuel peu engagé politiquement et pour un découpage de circonscriptions électorales qui fausserait à la base la représentation paritaire entre chrétiens et musulmans reviendrait à remettre en question les fondements même du pacte de coexistence ainsi que l’esprit de l’accord de Taëf. Et à terme, c’est la vocation même de l’entité libanaise, son « message », qui risquerait d’être mise en péril. Pour le Liban et pour les forces vives du pays, l’heure de vérité a sans doute sonné. Et dans une large mesure, le profil du prochain président et la nature de la nouvelle loi électorale refléteront sans détour les intentions véritables des uns et des autres. Michel TOUMA
Cela est sans doute dû au hasard du calendrier : les dossiers cruciaux de la présidence de la République et de la loi électorale ont été remis sur le tapis presque simultanément. Le hasard fait bien les choses car dans le cas spécifique du Liban, plus particulièrement dans le contexte présent, ces deux dossiers paraissent plus que jamais étroitement liés.
L’esprit de l’accord de...