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Actualités - CHRONOLOGIE

FESTIVAL AL-BUSTAN Chanter Mozart en arabe, un défi remarquablement relevé

Les mélomanes n’étaient pas très nombreux ce soir-là, mais ils étaient certainement d’excellente qualité. Écouter Mozart en version arabe est un moment bien piquant de curiosité. Les mordus d’opéra et les «mozartiens» chevronnés étaient au rendez-vous de cette hérésie musicale pour certains, cette infidélité pour d’autres. Et contre toute attente, la soirée à l’auditorium Émile Boustani (Beït-Méry) fut charmante, le chant délicieux et la musique de Mozart est restée divinement séduisante. Un plus dans l’univers du génie de Salzbourg, surtout pour tous ceux qui ignorent totalement les langues étrangères et la musique de Mozart… Le phénomème de la panculture et de la mondialisation a parfaitement le droit d’annexer à ses vastes horizons ces partitions qui appartiennent finalement au patrimoine universel. Et cette opération audacieuse, ce pari gagné, on le doit sans nul doute au Dr Aly Sadek, adroit et habile traducteur des libretti de Mozart, et aux trois chanteurs – hélas inégalement talentueux – (la soprane Mona Rafla, le ténor Mohammad Abou el-Kheir et le baryton Raouf Zaidan ) accompagnés au clavier par David Hales. Des extraits des Noces de Figaro, de Cosi fan tutte, Don Giovanni et Die zauberflûte ont fait l’objet de cette «expérimentation» réussie. Défi relevé, choc assumé, la musique de Mozart, avec des libretti en arabe, est absolument convaincante. Traduction simple, claire, qui pose les mots arabes, en toute tendre subtilité, sur la légèreté de notes du génie de Salzbourg qui gardent intrinsèque tout le rayonnement de leur beauté, de leur grâce, de leur charme et de leur spontanéité. L’arabe est certes une langue riche avec des sonorités surprenantes dans la bouche des chanteurs, mais nul ne retrouvera la «musicalité» de la langue de Dante Alighieiri, pas plus que le côté haché de la langue germanique… Ces amusantes et magnifiques onomatopées, interjections, ces «ma questo, «bello»» et tutti quanti… Il y a bien sûr des inflexions inimitables. On peut s’en rapprocher, au plus près possible, garder la magie, mais cela reste autre chose… Cela dit, Mozart était admirablement défendu par des chanteurs nés au Caire, avec un remarquable savoir-faire vocal, mettant en valeur ses partitions dans la langue de Néguib Mahfouz… La palme d’honneur revient au baryton Raouf Zaidan, qui a porté le succès de la soirée presque sur ses épaules (on devrait dire au bout de sa voix…). Cheveux sel-poivre, costume noir, chemise blanche et nœud-papillon en soie noire, c’est un acteur accompli, nanti d’une voix ample et maîtrisée. Sa prestation était excellente, notamment dans le dernier morceau de Papageno/Papagena. Pour lui donner la réplique, la cantatrice Mona Rafla, élégante dans sa robe blanche longue rehaussée de broderies scintillantes, avec des épaules nues. Soprane aux modulations d’une infinie tendresse dans les pianissimi, elle a campé avec dextérité les personnages de Suzanna aussi bien que Despina, Zerlina, ou entonné, en tout brio et panache, l’air de Klingelt Glockschen klingelt… dans un arabe bien articulé! Mais moins convaincant et avec des failles vocales fatales aura été le ténor Mohammad Abou el-Kheir. Toujours est-il que les timorés, les incertains, les ultraconservateurs, les puristes intransigeants qui n’ont pas été présents à ce concert bien différent des autres, en ce 13e Festival al-Bustan, ont tout simplement raté une belle occasion d’écouter du très bon Mozart. Différemment! Edgar DAVIDIAN

Les mélomanes n’étaient pas très nombreux ce soir-là, mais ils étaient certainement d’excellente qualité. Écouter Mozart en version arabe est un moment bien piquant de curiosité. Les mordus d’opéra et les «mozartiens» chevronnés étaient au rendez-vous de cette hérésie musicale pour certains, cette infidélité pour d’autres. Et contre toute attente, la soirée à...