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Actualités - OPINION

Perspectives - L’édification d’un État équilibré, principal défi que les leaders réunis place de l’Étoile se doivent de relever Dialogue : au-delà des écueils, des dénominateurs communs

Sauf coup de théâtre de dernière minute, ils seront sans doute tous présents, ce matin, les quatorze leaders et chefs politiques à la table du dialogue, place de l’Étoile. Depuis la subite suspension des réunions, mardi dernier, les protagonistes multiplient les déclarations et les concertations tous azimuts afin d’entretenir un climat positif et d’assurer ainsi la relance des discussions dans une atmosphère sereine. La nécessité d’une réussite de ce dialogue interlibanais – perçu par la communauté internationale comme un élément-clé de l’application totale de la 1559 – a également été explicitement soulignée par les présidents George Bush et Jacques Chirac ainsi que par le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, sans compter que le chef de l’État français a examiné durant la semaine écoulée le dossier libanais avec le souverain wahhabite, lors de sa récente visite à Ryad, ainsi qu’avec l’émissaire onusien, Terjé Roed-Larsen. Les diplomaties saoudienne et égyptienne ne sont pas aussi en reste et le contentieux syro-libanais sera, en outre, au centre des entretiens que le ministre syrien des Affaires étrangères, Walid Moallem, a entamés hier à Moscou. Ce branle-bas international précède de peu la publication, dans les quarante-huit heures, du premier rapport Brammetz qui pourrait fort bien constituer un véritable tournant dans l’enquête sur l’assassinat de Rafic Hariri. Mais ce sont surtout les tentatives répétées d’exacerber les tensions latentes sunnito-chiites dans la région – plus particulièrement en Irak – et la menace grandissante que constitue désormais l’intégrisme sunnite radical dans plus d’un pays du Moyen et du Proche-Orient qui expliqueraient l’insistance des acteurs internationaux à garantir les conditions d’une réelle détente sur la scène libanaise. Cette double épée de Damoclès aurait en toute vraisemblance motivé, entre autres, les deux entretiens marathons entre Saad Hariri et Hassan Nasrallah. Dans un tel contexte potentiellement dangereux à plus d’un égard, la bonne marche du processus de dialogue dépend directement d’un paramètre fondamental qui a été maintes fois soulevé, certes, mais qui ne le sera jamais suffisamment, dans la mesure où il demeure une grande inconnue : de quelle marge de manœuvre strictement « libanaise » le Hezbollah bénéficie-t-il pour ce qui a trait aux grandes décisions de principe liées à la conjoncture locale ? En clair, que le parti de Dieu soit opposé, sur le plan du principe, à la chute du régime syrien ou qu’il se sente politiquement (et idéologiquement) solidaire de la République islamique iranienne, cela est parfaitement de son droit. Mais ce droit, légitime, ne saurait occulter la question de base qui est sur toutes les lèvres : le sort de l’armement du Hezbollah est-il lié à des considérations purement communautaro-locales ou est-il, au contraire, tributaire essentiellement de calculs stratégiques syriens et/ou iraniens ? De retour de New York, le chef du PSP, Walid Joumblatt, est sans doute porteur de nouveaux documents onusiens, notamment des cartes officielles, confirmant ce que les hauts responsables des Nations unies ont à plusieurs reprises souligné, à savoir que pour la légalité internationale, les fermes de Chebaa sont territoire syrien et relèvent donc de la résolution 242. Si le Hezbollah est motivé, dans la pratique, par des considérations exclusivement libanaises, le règlement du contentieux de Chebaa – et par conséquent du litige sur l’armement du parti chiite – ne nécessiterait alors que des démarches diplomatiques auprès de l’ONU pour consigner la « libanité » de la zone controversée. Dans le cas contraire, le parti chiite aurait apporté concrètement la preuve irréfutable que le problème de ses armes est étroitement lié à une raison d’État régionale. Et, par le fait même, il y aurait peu de chances que le dialogue qui doit reprendre aujourd’hui débouche sur des résultats positifs et palpables concernant ce dossier précis. Cela ne signifierait pas, pour autant, que la conférence de dialogue serait un échec. Comme le soulignait hier le Premier ministre, Fouad Siniora, l’éventail de sujets permettant de dégager certains dénominateurs communs n’est nullement négligeable. Et, en tout état de cause, le seul fait que le face-à-face soit maintenu et entretenu entre les quatorze leaders et chefs politiques (réunis entre quatre murs) est en soi un acquis historique sur lequel il est impératif de capitaliser si l’on désire réellement aller de l’avant dans l’entreprise d’édification d’un Liban nouveau et, surtout, d’un État fondé sur des institutions fonctionnant sur des bases équilibrées, préservant les spécificités libanaises. C’est, en définitive, au niveau de ce point précis que se situe le véritable enjeu national à moyen et long terme. Et c’est autour de ce projet d’avenir que les leaders réunis place de l’Étoile ont le devoir de conjuguer leurs efforts s’ils ne veulent pas rater le coche. Michel TOUMA
Sauf coup de théâtre de dernière minute, ils seront sans doute tous présents, ce matin, les quatorze leaders et chefs politiques à la table du dialogue, place de l’Étoile. Depuis la subite suspension des réunions, mardi dernier, les protagonistes multiplient les déclarations et les concertations tous azimuts afin d’entretenir un climat positif et d’assurer ainsi la relance des...