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Actualités - CHRONOLOGIE

SPECTACLE - «Les voleurs de Bagdad», jusqu’à samedi, au théâtre Le Tournesol Taoufik Jebali, un militant de l’art théâtral

Après avoir présenté, il y a une semaine, sa pièce « Ici Tunis » au théâtre Monnot, Taoufik Jebali retourne cette fois-ci sur les planches du Tournesol avec une autre œuvre actuelle intitulée «Les voleurs de Bagdad». Une occasion de plus de voir ce que l’artiste tunisien a concocté. Sur scène, Taoufik Jebali n’est pas un homme qui se prend au sérieux. Il joue. Comme un enfant. Il s’amuse à surprendre le spectateur, à l’étonner et, par la même occasion, à s’étonner lui-même. Cependant les choses de la vie, qui sont la matière première de ses œuvres, ne sont pas, selon lui, à prendre à la légère. C’est pourquoi il leur consacre la plupart de son temps. En effet, sur les planches tunisoises, ce curieux monsieur, si curieux de tout, a fait d’El Teatro, qu’il a fondé il y a quelques années à Tunis, un espace de liberté, un laboratoire d’expériences. Entouré d’une poignée d’artistes et d’amis déterminés à monter sur pied une discipline artistique dont la seule marque de fabrication serait de couleur humaine donc vivante, Jebali s’engage dans cette folle aventure, qui s’est actuellement taillée une place de choix dans le paysage culturel tunisien. Un homme de terrain L’artiste a auparavant bien roulé sa bosse. Des petites saynètes composées dans le cadre scolaire et universitaire, jusqu’à la formation théâtrale classique poursuivie dans son pays natal et en France; des parenthèses ouvertes dans son parcours d’autodidacte pour expérimenter d’autres voies, comme l’univers de la radio (où il a été présentateur et producteur d’émissions culturelles). Ce sont autant de rencontres et d’explorations qui achèveront de confirmer ses choix dans la vie. «Je suis un homme de terrain, confie-t-il, pas d’académie.» Pour l’artiste, la scène est ce lieu où tout est permis et où on remet tout en question. De Klem Ellil à Ici Tunis, en passant par Le fou de Gibran ou ContreX et l’adaptation d’Othello, autant de démarches artistiques qui prouvent la quête interminable de l’artiste vers toujours d’autres horizons. Le travail de Jebali (à la fois comédien, auteur et metteur en scène) s’inscrit dans une recherche incessante et inclassable d’un théâtre nouveau où il rejette complètement tout ce qui est conventionnel. Sa trame, un univers particulier, l’artiste et artisan la tisse avec son écheveau. À la lisière du mot ou en contorsionnant le verbe et tel un funambule, il va assurer l’équilibre entre le public et l’œuvre. S’infiltrant dans l’inconscient de ce dernier, il communique avec lui tout en préservant sa liberté de pensée et de moyens. Des risques à prendre dans cette entreprise? «Fort peu, répond-il, car l’enjeu du théâtre est purement artistique. Tout ce que je risque de perdre, c’est un nombre de spectateurs.» «Or je milite, poursuit-il en rigolant, pour un théâtre sans public.» Et d’expliquer: «S’engager dans une œuvre en pensant à la réaction de ce dernier, c’est considérer l’art théâtral comme un produit consommable. L’artiste n’est pas là pour assurer un service après vente, mais pour donner une forme à une pensée et pour faire parvenir cette pensée avec les moyens que, lui seul, juge bons.» Une pensée qui prend forme Cette pensée est véhiculée par les différents comédiens dont il s’entoure et qu’il considère comme «la matière première de l’œuvre théâtrale». «Déterminants dans le déroulement d’une pièce, ce sont eux qui décident dans quelle direction elle va aller, affirme-t-il. Ce ne sont pas des bagagistes, encore moins des simples porte-parole.» Ils portent cette pensée en eux, dans leurs secrets enfouis ou dévoilés sur scène, dans leur gestuelle magnifique et dans la complicité qui se noue avec le public. Sans cesse réinventé, le théâtre de Jebali est en perpétuelle mouvance. Il ne se fige pas dans un cadre professionnel, mais s’adapte aux temps, aux lieux. «Je considère, poursuit-il, que je fais de la récupération à partir de petites choses que je trouve dans la société. Et je ne crains pas de casser sur mon passage.» La destruction est le thème de prédilection de l’artiste, qui n’hésite pas à démonter son spectacle dans la dernière scène de Ici Tunis. Non pas pour le plaisir de détruire, mais pour reconstruire par la suite et «revaloriser les valeurs», comme il le dit si bien. Ce même thème de démolition est repris dans Les voleurs de Bagdad. Démarrant sur un fait actuel, sur les pillards des musées dans un Bagdad en guerre, la pièce de Jebali propose alors de cogiter sur le rôle de l’art qui casse pour reconstruire, contrairement à ce que fait le siècle actuel. Taoufik Jebali n’est certes pas un militant politique et surtout pas un prêcheur de dogmes. Si l’appellation existe, il serait un militant de l’art. Les voleurs de Bagdad, qui se joue au théâtre Le Tournesol jusqu’à samedi, en est, encore une fois, la preuve. Colette KHALAF
Après avoir présenté, il y a une semaine, sa pièce « Ici Tunis » au théâtre Monnot, Taoufik Jebali retourne cette fois-ci sur les planches du Tournesol avec une autre œuvre actuelle intitulée «Les voleurs de Bagdad». Une occasion de plus de voir ce que l’artiste tunisien a concocté.
Sur scène, Taoufik Jebali n’est pas un homme qui se prend au sérieux. Il joue. Comme...