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Malgré les critiques, les émissions battent tous les records de popularité La téléréalité déferle sur l’Indonésie

Ayez votre maison croulante refaite à neuf, dépensez mille dollars en trente minutes, tirez un trait sur vos dettes : la téléréalité s’impose en Indonésie, malgré les critiques d’exploitation de la pauvreté sous les paillettes. Des programmes larmoyants à souhait pulvérisent les scores d’audience au côté des inévitables copies locales de la Star Academy. L’Indonésie, avec 220 millions de personnes, est le quatrième pays le plus peuplé du monde. Une des émissions vedettes s’appelle Uang Kaget (Cash surprise). Elle met en scène un miséreux tel un ramasseur d’ordures se démenant pour dépenser en trente minutes la somme de 10 millions de roupies (1 000 dollars) qui lui a été offerte. Tout l’argent qu’il n’arrive pas à dilapider lui sera retiré. Vêtu de ses haillons, l’heureux bénéficiaire court d’un magasin à l’autre, achetant ici une télévision, là un sac de riz, tandis qu’il est suivi par une équipe le filmant et un public rigolard. Le moment est comique et en même temps pathétique dans un pays où la moitié de la population dispose de moins de deux dollars par jour pour subsister. Dans un autre programme intitulé Bedah Rumah (Maison transformée), une famille a son logis entièrement rénové lors d’une journée qu’elle passe aux petits soins dans un hôtel de luxe. « Je ne suis jamais montée dans une voiture aussi luxueuse », a déclaré une participante, une mère conduite par un chauffeur jusqu’à l’hôtel. Il y a pire dans le mauvais goût. Dans l’émission Lunas (Payé), un homme criblé de dettes est harcelé par des faux créanciers munis d’une caméra cachée. L’infortuné cobaye est même poussé à vendre ses biens. Jusqu’à ce qu’il reçoive la visite des animateurs de Lunas, qui lui annoncent ravis que ses dettes ont été réglées et lui rendent ses affaires rachetées chez l’usurier. Cash surprise et Payé, toutes les deux diffusées sur la chaîne privée RCTI, ont battu tous les records de popularité selon la société d’étude marketing AC Nielsen. Ce qui n’a pas manqué d’attirer les annonceurs, dédaigneux des critiques. « Je pense que ces programmes se moquent des spectateurs. Ce dont les pauvres ont vraiment besoin n’est pas de l’aide ponctuelle, mais des chances de sortir de leurs difficultés d’une façon rationnelle », a dit à l’AFP Effendy Ghazali, un spécialiste des médias. Le gouvernement indonésien a dû se résoudre en octobre 2005 à une hausse radicale du prix des carburants qui a provoqué une flambée des prix et plongé dans le marasme les couches sociales les plus défavorisées. « Nous ne devrions pas faire croire aux gens que des bons Samaritains seront toujours là pour les aider. Cela ne favorise pas les efforts pour réduire la pauvreté », a commenté M. Ghazali. L’homme à l’origine de la plupart des émissions de téléréalité dans l’archipel, Helmy Yahya, a au contraire rétorqué que ses programmes incitaient des habitants à s’entraider. « Nous n’exploitons pas la pauvreté. Tout le monde a des rêves. Certains rêvent de rencontrer leur idole, d’autres simplement d’avoir une maison décente », a-t-il assuré. Helmy Yahya, qui produit au moins six émissions censées aider les pauvres, assure que ces derniers sont choisis car méritants et particulièrement dans le besoin. L’un de ses programmes, intitulé Voyage gratuit du Hadj, offre à des musulmans chanceux de financer leur pèlerinage aux lieux saints de La Mecque. L’Indonésie envoie chaque année 200 000 pèlerins en Arabie pour un coût unitaire de 3 000 dollars.

Ayez votre maison croulante refaite à neuf, dépensez mille dollars en trente minutes, tirez un trait sur vos dettes : la téléréalité s’impose en Indonésie, malgré les critiques d’exploitation de la pauvreté sous les paillettes.

Des programmes larmoyants à souhait pulvérisent les scores d’audience au côté des inévitables copies locales de la Star Academy....