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THÉÂTRE - Ils ont de 58 à 77 ans ; ils étaient graphiste, interprète ou secrétaire… La « longue vie » des vieux danseurs de Pina Bausch

Ils ont de 58 à 77 ans, ils étaient graphiste, interprète ou secrétaire et s’attendaient à une retraite tranquille mais, depuis cinq ans, en robe de satin et costume sombre, ils dansent à travers toute l’Europe une pièce de la chorégraphe allemande Pina Bausch. « Jamais nous n’aurions imaginé ce qui nous attendait, on pensait donner trois représentations et s’arrêter là : hier (jeudi) soir, c’était notre cinquantième », raconte Jutta Geike, 58 ans, entre deux répétitions à la Comédie de Clermont-Ferrand en France, où la troupe se produira encore demain (samedi) et dimanche. En 2000, Pina Bausch a remonté Kontakthof, l’une des pièces maîtresses de son Tanztheater Wuppertal, créée en 1978. Mais cette fois avec des danseurs âgés, non-professionnels, recrutés par petites annonces. Au lendemain de la dernière des trois représentations prévues parut un article élogieux dans le grand quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung. « Et le téléphone n’a plus arrêté de sonner : on nous voulait partout », se souvient Jutta Geike, interprète tout juste retraitée, aux boucles blondes platine et au sourire lumineux. Depuis, avant chaque série de trois représentations, les danseurs répètent pendant six semaines à Wuppertal, deux ou trois soirs par semaine. « Nous n’avons pas de contrat et sommes payés, un peu, pour chaque représentation », explique Peter Kemp, 63 ans. « Mais nous sommes tous tellement fans de Pina Bausch qu’on le ferait pour rien », dit en riant cet ancien technicien en jean et chemise vieux rose, aux allures de cow-boy. Plus authentiques Cinq ans après, presque tous les danseurs des débuts sont encore là. « Quatre ou cinq seulement ont dû arrêter : l’un est mort, les autres sont tombés malades », explique Josephine Ann Endicott, 55 ans. Danseuse de la première version de Kontakthof, elle a transmis la chorégraphie à la nouvelle troupe et dirige répétitions et représentations. Dans une salle de bal aux murs gris, des femmes blondes, rousses ou grises, toutes en robe de satin et pieds nus, séduisent ou repoussent des hommes en costume, pendant près de trois heures. Ils courent, dansent, rient à pleine gorge, s’effondrent et se relèvent, exprimant amour, haine ou chagrin. « Nous, nous avons vécu la vie, nous jouons donc moins et sommes plus authentiques que des danseurs jeunes », souligne Heinz Meyer, un ancien graphiste de 75 ans. « Beaucoup de jeunes sont emballés par la pièce, ils nous remercient de leur montrer que la vie veut encore dire quelque chose après quarante ans », renchérit Peter Kemp. Mardi, ils ont enchaîné deux répétitions de quatre heures, sans se plaindre. « Quand je monte sur scène, je suis tellement bien, cela me maintient jeune, malgré mon âge, je n’ai mal nulle part », dit Thea Koch, 77 ans, carré court de cheveux gris, ancienne secrétaire et doyenne de la troupe. « Au début, j’avais de sacrées courbatures le lendemain, plus maintenant, mais mes genoux me font plus mal qu’il y a cinq ans », regrette Jutta Geike. Son mari, Bernd, 63 ans, danse avec elle depuis cette année. « Je ne pourrais rien faire qui me rendrait plus heureux et nous voudrions tous danser encore ensemble pendant dix ans, mais là nous serons vraiment trop vieux », regrette en souriant Heinz Meyer.

Ils ont de 58 à 77 ans, ils étaient graphiste, interprète ou secrétaire et s’attendaient à une retraite tranquille mais, depuis cinq ans, en robe de satin et costume sombre, ils dansent à travers toute l’Europe une pièce de la chorégraphe allemande Pina Bausch.
« Jamais nous n’aurions imaginé ce qui nous attendait, on pensait donner trois représentations et...