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Actualités - CHRONOLOGIE

CONCERTS - À Masrah al-Madina – Hamra Charbel Rouhana, maître du oud et chantre de la vie

Une salle comble et enfiévrée à Masrah al-Madina qui clôt son chapelet de soirées ramadaniennes avec Charbel Rouhana. Salle comble, on comprend, car les fans du jeune et sympathique maître du oud libanais sont nombreux. Et salle enfiévrée ? Oui, cela est de taille car Charbel Rouhana, à l’instigation de Nidal el-Achkar et Randa Asmar, en bon trouvère des temps modernes, a cédé aujourd’hui à la tentation de chanter aussi en grattant les cordes. Et le résultat, avec cet artiste au talent immense à qui tout semble réussir, est bien plus que convaincant…. Chemise bleu-gris, jeans sombre, barbe de quelques jours, cheveux courts, lunettes de myopie vissée sur son nez, sourire ravageur, le oud empoigné, voilà Charbel Rouhana sur scène, la simplicité incarnée. Assis derrière lui en demi-cercle, ses onze musiciens (violoniste, accordéoniste, percussionnistes, oudiste, «tabliste» et chœur). Bonne humeur, humour, poésie, pointes (douces, tendres mais jamais corrosives!) à une société libanaise grippée dans ses rouages. Voilà les ingrédients de cette délicieuse soirée où le chant populaire, tout en parlant d’amour, évite les mouchoirs et les poses appuyées. Comme pour saluer son auditoire, Charbel Rouhana commence son tour de chant (tant attendu) par de la musique pure. «Sahbaat» au oud, mélodies délicatement égrenées, voilà la voix tout en plaintes et tendresse de l’instrument ventru, à peine ponctuée par quelques «allah» de la part de ceux qui sont déjà partis, comme sous l’effet d’une bouffée de narguilé… «ajami», «mouais» ou «mayaz», le oud est le «keif» populaire, distillé comme une eau parfumée qu’on savoure en douceur. Et puis cette fraîche coulée du qanun (magnifique Imane Homsi) vient se greffer aux sonorités nues et sourdes du oud… Sa voix n’est pas particulièrement singulière, c’est-à-dire ni rauque, ni argentée, ni plus forte qu’une autre, ni voilée, ni brisée, ni grave. Encore moins marquée par la blessure des fumeurs… Mais c’est une voix belle dans sa simplicité et qui porte juste et haut les mots et la mélodie. Un Charbel Rouhana silencieux devant le micro, c’est déjà du passé. Recueilli, le public écoute, ravi, un nouveau Charbel Rouhana, aussi séduisant que le oudiste à qui on voue une grande admiration. Des chansons de son cru, comprendre paroles et musique, telles que Bihbik (je t’aime) et Chawki et Laura, ont conquis d’emblée le public par leur charme et leur spontanéité. Et puis des poètes paroliers sont venus à la rescousse de ses notes. Talal Haïdar (sa poésie, hélas, est souvent peu heureuse), Boutros Rouhana, Ibrahim Sémaan, Hassan Youssef, Albert Rouhana se sont glissés dans les cordes du oudiste pour donner aux mots et à la musique une autre dimension. Mais toujours une dimension de «keif» populaire, dans le bon sens du terme. Activement impliqué dans la vie Si l’amour a décliné ses couleurs, ses ramages et ses tourmentes dans la voix et la musique de Rouhana, le regard critique n’a pas cédé pour autant la place à une vague rêverie bovarienne au masculin. Au contraire, Charbel Rouhana, comme les jeunes de sa génération, est activement impliqué dans la vie, et ses piques sont à retenir. Sur l’emploi d’un multilinguisme tarabiscoté des Libanais, il y a matière à méditer. Souriez en pensant à une phrase banale et commune: «Hay, kifak, ça va, tchao…» La tour de Babel n’a pas fait mieux dans le genre… Et puis les intermittences du cœur, qui ne connaît pas? Petits bobos qui se soignent avec des… chansons! Surtout celles que chante Charbel Rouhana, où la vie est un grand sourire désarmant. Pour conclure, sur un tempo de tambourin agilement battu, comme un chant guerrier et patriotique, un hymne aux changements souhaités (en dénonçant le terrorisme, terme d’une brûlante actualité) tout en gardant la distance avec les espoirs démesurés. Belle chanson faite de rythme et d’enthousiasme. Délire et ovation du public qui retrouve dans ce récital inédit sa «star» newlook . Du nouveau pour Charbel Rouhana investi à présent dans la chanson «chabablakia», populaire, tout en ne trahissant pas son image de marque de musicien-oudiste rompu au métier. Edgar DAVIDIAN

Une salle comble et enfiévrée à Masrah al-Madina qui clôt son chapelet de soirées ramadaniennes avec Charbel Rouhana. Salle comble, on comprend, car les fans du jeune et sympathique maître du oud libanais sont nombreux. Et salle enfiévrée ? Oui, cela est de taille car Charbel Rouhana, à l’instigation de Nidal el-Achkar et Randa Asmar, en bon trouvère des temps modernes, a...