ÉDITION - Les écrits d’un orientaliste du XIXe siècle recomposés, en format broché, par Wadih Audi «Mission au Liban. Extraits de la Terre sainte» par Victor Guérin: un texte de référence (Photo)

Du temps où il était libraire, il adorait conseiller les gens sur leur choix de lecture. Dédicace n’étant plus, Wadih Audi n’a pas pour autant perdu l’envie de faire découvrir, aux vrais amateurs du livre, les textes qui provoquent son enthousiasme. Sauf que cette fois, c’est en rééditant des ouvrages anciens, dénichés au gré de ses voyages et de ses recherches chez les bouquinistes ou dans les bibliothèques en France, qu’il entend partager ses coups de cœur. Premier d’une série sur le Liban qu’il s’apprête à lancer, Mission au Liban (éd. Librairie Antoine) est composé d’extraits de La Terre sainte de Victor Guérin (1821-1890). En parcourant ce volumineux livre ancien, pesant plus de 6 kg, qu’il avait acheté, il y a trente ans, à Paris, Wadih Audi avait relevé qu’une grande partie était consacrée à une description minutieuse du Liban du XIXe siècle, et s’était promis « d’en tirer un jour quelque chose ». C’est aujourd’hui chose faite, avec la réédition, en format broché, des quelque 300 pages du livre de Guérin portant sur le Liban. «Son regard érudit, minutieux, objectif et dénué de tout parti pris offre une vision intéressante du Liban du XIXe siècle », indique Audi. Dans la lignée de Léon Laborde et d’Ernest Renan, Victor Guérin, docteur ès lettres, avait été chargé d’une mission d’étude dans les pays du Levant. Il avait donc parcouru, «souvent à pied », les pays faisant partie de l’itinéraire de la Terre sainte, c’est-à-dire la Syrie, le Liban et la Palestine. En 1884, il avait publié la somme de ses observations dans un ouvrage intitulé La Terre sainte, qui avait alors été récompensé du prix Montyon de l’Académie française. Ce qui caractérise le rapport de Guérin, c’est sa description minutieuse de la géographie, de l’histoire, des sites, mais aussi de la mosaïque sociale et de la vie quotidienne des pays sillonnés. «(…) Il s’avance lentement, regardant les moindres vestiges, interrogeant les habitants, notant avec un soin méticuleux les distances par le temps qu’il met à les parcourir…», écrit à son propos le Bulletin Bibliographique. Preuve de cette exploration minutieuse du pays du Cèdre, il est même fait mention dans le livre de Guérin des fameuses fermes de Chebaa ! Document historique certes, mais dénué de toute sécheresse, Mission au Liban offre une lecture aussi plaisante qu’érudite. Guérin donne des chiffres sur le nombre d’habitants des différentes régions, évoque les diverses communautés, leur importance, leur historique…Il décrit les activités productives du pays (agriculture, élevages de vers à soie, dans la montagne, comptoir commercial à Beyrouth, etc.), dépeint la vie dans les couvents, les villes et les villages (mœurs et coutumes spécifiques), va même jusqu’à dresser des portraits psychologiques des habitants du Liban et narrer des épisodes particuliers, à l’instar de celui de la terrible Hindié, religieuse excentrique à la personnalité contestée. Illustré de reproductions d’illustrations d’époque et écrit dans un vocabulaire d’une modernité étonnante (simple, descriptif, très éloigné du style ampoulé cher aux auteurs du XIXe siècle !), Mission au Liban propose aux lecteurs de partir à la redécouverte du Liban du XIXe siècle. Pour mieux appréhender la composition du Liban d’aujourd’hui. Disponible dans toutes les librairies. Z.Z.