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Actualités - CHRONOLOGIE

Rustom Ghazalé a exprimé « sa joie de rentrer dans son pays », au cours d’une cérémonie à Rayack À 13h40, le dernier bus militaire syrien a traversé la frontière, sans fanfare mais avec des sirènes hurlantes (photo)

C’est un départ sans gloire mais avec les honneurs militaires. Lorsque, à 13h40, le dernier convoi militaire syrien, escorté par des jeeps libanaises toutes sirènes hurlantes, a traversé pour la dernière fois la frontière libanaise se dirigeant vers la Syrie, la population s’est bien gardée de se poster sur le bas-côté de la route. Seuls quelques changeurs indifférents, quelques chauffeurs attendant des passagers de plus en plus rares, et une foule de photographes ont observé la scène, qui clôture trente ans de présence syrienne au pays du Cèdre. Une présence qui a revêtu différentes formes et a été marquée par la controverse. Contrairement à ce qui avait été annoncé, la route militaire n’a pas été immédiatement fermée, mais le drapeau libanais flotte désormais seul sur le point de passage entre les deux pays. Les cinq autobus, transportant les 250 soldats venus participer à la cérémonie organisée par le commandement de l’armée libanaise à la base aérienne de Rayack, résumaient à eux seuls les dernières années de la présence syrienne au Liban. Venus d’un autre âge, poussiéreux et presque poussifs, ces véhicules avaient à leur bord des soldats fatigués et presque pitoyables, saluant à travers les fenêtres sales une foule inexistante, ou brandissant un dérisoire « V » de la victoire. La scène avait quelque chose de surréaliste, et les photographes postés à Masnaa, avec leurs immenses téléobjectifs, n’en revenaient pas de constater qu’un moment aussi historique peut paraître visuellement aussi banal. Ghazalé : Je reviendrai en visite privée et familiale Apparemment, l’histoire peut emprunter les chemins les plus anodins lorsqu’elle décide de se mettre en marche. Et cette fois, c’est bien fini, les soldats et les SR syriens ont bel et bien quitté le Liban. Le général Rustom Ghazalé, chef des SR au Liban depuis près d’un an, après avoir été longtemps le responsable de Beyrouth, a bien essayé de paraître enthousiaste, déclarant aux journalistes qu’il éprouve en ce moment même « une grande joie », parce qu’il va enfin « rentrer chez lui, dans sa patrie », mais son regard figé et dur n’exprimait aucune allégresse. À la question de L’Orient-Le Jour sur son retour éventuel au Liban, il a répondu : « Je reviendrai certainement, mais en visite familiale et privée. » La présence militaire ou même des SR semble donc terminée. Toujours à L’Orient-Le Jour, Rustom Ghazalé a déclaré qu’il était confiant dans l’avenir des relations libano-syriennes. « Elles resteront excellentes », a-t-il précisé, avec une sorte de défi dans le ton, en marchant rapidement vers la Mercedes qui devait le ramener en Syrie. Ghazalé ainsi qu’une délégation militaire syrienne de haut rang et les soldats dans les bus étaient venus au Liban le matin même, pour participer à la cérémonie organisée en leur honneur par le commandement de l’armée. C’est à la base aérienne de Rayack, où le président Élias Hraoui avait entamé les premiers mois de son mandat (plus précisément au domicile de l’officier Jamil Sayyed, alors responsable des SR libanais dans la Békaa), que le commandant en chef de l’armée, le général Michel Sleimane, avait décidé d’organiser la cérémonie. Des mesures de sécurité très strictes ont été prises et un déploiement militaire impressionnant tout au long de la route veillait pour éviter le moindre incident. La cérémonie était pourtant d’une grande simplicité et visait essentiellement à « remercier la Syrie pour sa présence au Liban pendant près de trente ans et l’aide qu’elle a fournie à ce pays, notamment à l’armée ». En fait, grâce à cette cérémonie, le commandement de l’armée a surtout voulu faire une distinction entre le retrait des soldats israéliens en mai 2000 et celui des militaires syriens en avril 2005. D’ailleurs, tout au long de la route et à l’intérieur de la base aérienne, il était clair que nul ne voulait froisser les Syriens, ou leur faire sentir que leur départ était un soulagement pour beaucoup de Libanais. Après la pose de la première pierre pour ce qui sera un jour un monument dédié aux martyrs syriens tombés au Liban, le chef de l’état-major syrien, le général Ali Habib, a prononcé un discours dans lequel il a fait l’historique des relations libano-syriennes. Le général syrien a insisté sur le fait que les relations entre les deux armées resteront excellentes, « même si, selon lui, les ennemis du Liban souhaitent s’en prendre à cette relation, pourtant nourrie par le sang des deux peuples ». Le général a précisé que sans l’aide de la Syrie, le Liban n’aurait pas pu retrouver son unité et « sa santé ». « Maintenant que c’est fait et en application de l’accord de Taëf et pour répondre à la demande du gouvernement et du peuple libanais, la Syrie a retiré ses troupes du Liban exécutant sa part de la résolution 1559 du Conseil de sécurité. » Le général Habib a critiqué cette résolution et rappelé que son pays reste attaché au processus de Madrid et à une paix globale dans la région. Le général Sleimane a aussi pris la parole pour affirmer que les relations entre les deux armées resteront excellentes et il a précisé que les troupes syriennes ont entamé leur retrait du Liban à partir de 2000 et aujourd’hui, elles achèvent la dernière étape, l’armée libanaise ayant montré ses capacités et retrouvé la confiance du peuple. Les deux commandements ont ensuite échangé des médailles (il y en a même eu une de la part de la Syrie pour le général Raymond Azar, absent) et les officiers supérieurs, ainsi que le secrétaire général du haut comité libano-syrien, Nasri Khoury, ont été conviés à un cocktail. Pendant que les hauts gradés prenaient le dernier « verre de l’amitié » (sans alcool bien sûr), les soldats recevaient l’ordre de s’en aller. « Au bus ya chabab », leur criait-on. L’avant-dernière séquence d’un film qui a duré près de trente ans était en train d’être jouée. Quelques minutes plus tard, le rideau tombait, à Masnaa, que la population boudait. Le 26 avril 2005, une page d’histoire a été tournée. Pour le meilleur, les Libanais sont nombreux à le croire. Scarlett HADDAD
C’est un départ sans gloire mais avec les honneurs militaires. Lorsque, à 13h40, le dernier convoi militaire syrien, escorté par des jeeps libanaises toutes sirènes hurlantes, a traversé pour la dernière fois la frontière libanaise se dirigeant vers la Syrie, la population s’est bien gardée de se poster sur le bas-côté de la route. Seuls quelques changeurs indifférents,...