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Actualités - OPINION

Eclairage - Damas et une partie des prosyriens désespérément attachés à une seule bouée : la perpétuation de l’actuel Parlement Berry sur le point de rater sa seule chance de survie politique

Apparemment décidé à prouver à ceux qui en doutaient encore la validité et la pérennité du « jamais deux sans trois », apparemment peu soucieux de subir une nouvelle fois les foudres impitoyables de la rue ou celles, encore plus graves, des organismes économiques, Omar Karamé a opté hier à Baabda pour un retentissant « J’y suis j’y reste », au moins jusqu’à ce que le Rassemblement de Aïn el-Tiné « accepte » son désistement. Pire que cela : cet homme qui s’est suicidé politiquement tente aujourd’hui de miner la rue sunnite en lui faisant croire à une farce maronito-maronite entre Bkerké et Baabda, et dont il serait le pauvre dindon. « Le président Lahoud nous a tous trahis, et m’a trahi moi en particulier, en s’entendant avec le patriarche maronite et en lui promettant d’œuvrer pour former un gouvernement qui ne soit pas nécessairement d’union nationale. Si le président Lahoud veut former un gouvernement tout seul, qu’il le fasse. Il veut conclure un marché (avec Mgr Sfeir) dont je serai le dupe », a déclaré Omar Karamé dans des propos publiés hier par notre confrère d’al-Hayat. La volonté du Premier ministre désigné de retarder encore davantage sa décision a ainsi braqué les projecteurs sur plusieurs points aujourd’hui fondamentaux. Un : l’affolement désordonné du tuteur syrien, qui semble s’accrocher comme un noyé à l’une des rarissimes bouées qui lui restent pour compenser, fût-ce pour un temps très limité, ses retraits militaro-sécuritaires : le report des élections et une perpétuation du Parlement libanais qui lui demeure, du moins pour l’instant, acquis. Deux : les tiraillements au sein du camp prosyrien, formé d’une flopée d’hommes politiques dont la quasi-totalité est totalement incapable d’obtenir le moindre strapontin ou un poste quelconque sans le coup de pouce de Anjar, dont le démantèlement a d’ailleurs débuté hier. Ce groupe archihétéroclite dès le départ commence à se fissurer sérieusement de par la célérité des uns à fuir un navire sur le point de sombrer, et l’attachement des autres à une prorogation du Législatif. Principal corollaire : les soubresauts, les « éveils de conscience », multipliés au quotidien, d’un apprenti sorcier qui s’est brûlé les doigts et qui est visiblement déterminé à sauver, à n’importe quel prix, son poste : Émile Lahoud. Trois – last but not least – : l’avenir politique de Nabih Berry, tant sur le plan communautaire qu’au niveau national, puisque le n° 2 de l’État, cloîtré chez lui depuis des semaines et muré dans un silence quasi autistique, est le seul capable de trancher tout cela. Omar Karamé n’a plus rien à perdre ; l’immense hiatus entre son discours de Baabda et ses actes le prouve. Son entêtement, son déni de la réalité, son inconscience politique, sa dépendance vis-à-vis d’une Syrie dont l’impressionnant pouvoir (politique et de nuisance) au Liban s’érode lentement mais sûrement de jour en jour sont illimités. Face à lui, Émile Lahoud joue son va-tout. « Il paie aujourd’hui le prix de la constance de ses positions », disent les sources proches de Baabda. « Le président a toujours défendu l’option d’un cabinet d’union nationale, il continue d’espérer que Karamé réussira à en former un, mais devant l’impasse, il lui est impossible de continuer à priver le pays d’un gouvernement qui sera chargé de suivre l’enquête internationale sur l’assassinat de Rafic Hariri et d’organiser les législatives. Ainsi, si le président Karamé n’annonce pas officiellement son désistement, le président Lahoud sera forcé de recourir à des mécanismes constitutionnels », ajoutent (et menacent) ces mêmes sources. Lesquels mécanismes existent : le chef de l’État peut imposer une date butoir au Premier ministre afin que celui-ci se prononce, a assuré il y a quelques jours pour L’Orient-Le Jour un constitutionnaliste de renom, Hassan Rifaï. Face à Omar Karamé et un nombre encore consistant de prosyriens, Émile Lahoud, quelles que soient ses motivations – refus de jouer, pour la Syrie, les Iphigénie prêtes à se sacrifier ; volonté de terminer ses illégitimes trois ans ; besoin de partir avec un minimum de popularité, de crédibilité... –, est devenu, quelques heures avant l’annonce du rapport Fitzgerald, le prinicpal garant de l’exécution quasi exhaustive du cahier des charges de l’opposition nationale plurielle. Entre eux : Nabih Berry. De plein gré ou contraint, le président de la Chambre a visiblement opté, ne serait-ce qu’en attendant vendredi pour convoquer le Rassemblement de Aïn el-Tiné, pour les résidus de la carte syrienne. Démentant ainsi, du moins pour l’instant, toutes ces rumeurs qui disaient qu’il attendait « le moment idéal » pour naviguer publiquement dans le sens des vagues et du vent, se rapprocher de l’opposition, du peuple. Est-il seulement possible que le chef de Aïn el-Tiné n’ait pas compris que ce « moment » en question, c’est maintenant ou jamais ? Qu’est-ce qui – ou qui : Damas ? Le Hezbollah sans lequel Aïn el-Tiné ne serait rien ? – l’a empêché de réunir son rassemblement hier et pas demain, lui qui se voit volontiers en « sauveur », l’équivalent de cette utlime carte que viendraient réclamer auprès de lui ses collègues loyalistes et opposants ? Qu’est-ce qui l’empêche de convoquer la Chambre pour qu’elle adopte le projet de loi électorale que lui a transmis le gouvernement Karamé avant qu’il ne soit démissionnaire ? Pourquoi refuse-t-il de se garantir ne serait-ce que la bienveillante neutralité de l’opposition nationale et de la population libanaise afin d’éviter une catastrophe pour lui-même et pour Amal aux prochaines législatives, quelle que soit leur date et dont le Hezb de Hassan Nasrallah tirerait tous les dividendes ? D’autant que cette fois, Nabih Berry n’a même pas besoin de prendre le chemin de Bkerké et d’attendre qu’il en ait atteint le perron, comme en novembre 2000, pour tenter de sauver quelques meubles. Il serait étonnant qu’un homme aussi pétulant professionnellement passe à ce point à côté de sa seule chance de survie politique. Ziyad MAKHOUL
Apparemment décidé à prouver à ceux qui en doutaient encore la validité et la pérennité du « jamais deux sans trois », apparemment peu soucieux de subir une nouvelle fois les foudres impitoyables de la rue ou celles, encore plus graves, des organismes économiques, Omar Karamé a opté hier à Baabda pour un retentissant « J’y suis j’y reste », au moins jusqu’à ce que le...